Procès du «violeur de la Sambre»«Il m’a attrapée par derrière, traînée dans un garage, et plaquée au mur»
Une victime de Dino S. a livré un témoignage glaçant mercredi devant la cour, plus de 30 ans après les faits.
«Je pensais avoir fait quelque-chose de mal»: tremblante, au procès de Dino S., une victime a dit mercredi s’être «toujours sentie coupable» depuis son agression sexuelle, en 1991, et n’avoir été libérée «qu’à l’ouverture du procès», au contact des autres victimes.
«Un individu m’a attrapée par derrière, m’a soulevée»
«Pour moi, j’étais coupable. D’une chose que je n’ai pas commise. Je me suis toujours demandé, pourquoi moi ? Je me suis dit «j’ai fait quelque chose de mal», (...) Est-ce que c’était mes vêtements ?", frémit Sylvie (prénom modifié), retenant ses larmes devant la Cour d’assises du Nord. «La culpabilité a été longtemps là, jusqu’à vendredi, l’ouverture du procès». Mais après avoir «vu les autres femmes (...) je sais», poursuit-elle, tournée de manière à ne pas voir l’accusé. «Je ne suis plus coupable, je suis victime.» «J’avais 19 ans, j’allais au lycée», se souvient Sylvie. Puis elle chancelle, se recroqueville: «Un individu m’a attrapée par derrière, m’a soulevée», «traînée» jusqu’à un garage, où il m’a «plaquée contre le mur». «Il m’a dit «ne bouge pas, j’ai un couteau».»
Déboutonnant manteau et chemise, «il m’a palpée, tripoté la poitrine». En fuyant, raconte-t-elle, «il m’a dit: «je te retrouverai»». «Je me suis renfermée»: «je ne sors pas le soir, je ne me permets pas de décolleté, de robe. Je garde toujours une écharpe. Mon mari s’approche de moi, je sursaute, après 31 ans. Mes enfants, je ne peux pas les prendre, les embrasser, ça me bloque». Elle évoque ses cauchemars, «violents», qui lui faisaient «taper les armoires, tordre les lampes de chevet».
«Ca aurait pu être quelqu’un d’autre»
«C’est moi, le coupable», reconnaît Dino S. Mais sur le pourquoi, «il n’y a pas de réponse. Elle était là», «une belle fille que je vois passer». «Ca aurait pu être quelqu’un d’autre». «Peut-on présenter des excuses à cette dame ? Va-t-elle les accepter ?», tente l’accusé. Fébrile, Sylvie ne répond pas. «Je m’étais rendu compte déjà, des dégâts. Aujourd’hui, c’est encore pire», lâche Dino S., qui comparaît pour des viols et agressions sexuelles sur 56 victimes.
Puis il évoque son propre mal-être: après, «on se demande: «pourquoi j’ai fait ça ?» On espère que ce sera fini, puis ça recommence». «On a envie de se flinguer aussi. J’y ai pensé souvent.» Un peu plus tôt, il avait nié les agressions sexuelles de Véronique et Marianne, attaquées le même jour en 1988, à trente minutes d’intervalle et 1,6 km. «J’ai pas de souvenir d’une agression à cet endroit», a-t-il martelé. «Deux agressions le même jour, c’est pas possible», car après chacune «y a une prise de conscience». La cour s’est aussi heurtée à l’effet du temps. Sur les 56 plaintes initiales, trois ont été perdues. D’autres sont succintes, réduites à une demi-page.
Initialement, «vous ne parl(i)ez pas d’attouchements», a lancé la défense à Véronique. «Je suis formelle, il m’a palpée. Ca n’a pas été mentionné» par les policiers, a-t-elle répliqué. Interrogée par l’AFP, elle a estimé que sa plainte avait à l’époque été «prise rapidement», sans «entrer dans les détails».