Ciné et téléSissi va faire un retour en force!
L’impératrice rebelle, jadis incarnée par Romy Schneider, revient dans différentes productions pour le petit comme pour le grand écran.
Elle était la Lady Di du XIXe siècle et, 125 ans après sa mort, Sissi, impératrice rebelle au destin tragique, inspire à nouveau des réalisateurs en quête d’une personnalité féminine avant-gardiste et romanesque.
Pas moins de deux longs-métrages et deux séries reviennent actuellement sur la vie d’Elisabeth de Wittelsbach (1837-1898), immortalisée après la Seconde Guerre mondiale en mode kitsch par Romy Schneider au cinéma.
Tous les regards se porteront vendredi sur la présentation en avant-première du film «Corsage» sur la Croisette à Cannes, tandis qu’un autre projet monté en Autriche est attendu pour l’automne.
Et la série «Sissi» conçue par la chaîne allemande RTL+, diffusée en France fin 2021, aura droit à une suite après une première saison saluée par la critique, alors qu’avec «The Empress», Netflix livrera bientôt sa version.
Un regain d’intérêt porté par le désir de «trouver plus de récits de femmes», explique l’actrice Dominique Devenport, qui a prêté ses traits outre-Rhin à l’impératrice d’Autriche dans la force de sa jeunesse.
Première star
Mariée à François-Joseph alors qu’elle n’a que 16 ans, Sissi, star glamour en perpétuelle représentation, a vécu une vie «extrême et pleine de douleur», en butte constante au rigide protocole de la cour des Habsbourg.
«Comment rester soi-même, quelles décisions prendre, comment répondre aux attentes?», autant de questionnements qui reflètent des enjeux très contemporains, souligne l’actrice de 26 ans.
D’autant «qu’entrée dans l’histoire au moment de l’avènement des médias de masse», Sissi fut «l’une des premières femmes confrontées à une immense célébrité en Europe», comme le rappelle l’historienne Martina Winkelhofer, auteure d’un livre sur cette personnalité iconique.
L’invention de la photographie a accéléré la renommée de cette excellente cavalière: «Soudain, on pouvait vraiment voir la femme d’un empereur», poursuit-elle.
Sissi a fait figure de pionnière dans l’utilisation de son image à des fins politiques, oeuvrant à l’union avec la Hongrie, et a tenté de la contrôler jusqu’à l’obsession.
Elle se dérobait du regard de la Cour par des passages secrets en se réfugiant dans l’élégante Villa Hermès nichée au coeur d’une réserve de chasse des environs de Vienne, offerte par son époux.
La conservatrice du musée Michaela Lindeinger y montre des équipements de sport fabriqués sur mesure lui permettant de conserver une silhouette, fine à l’extrême, d’éternelle jeune fille.
Mythe à l’eau de rose
C’est là qu’elle passa, recluse, les dernières années de sa vie après le suicide de l’héritier du trône, son fils Rodolphe en 1889.
On peut encore y voir aujourd’hui dans sa chambre à coucher la statue morbide réalisée sur sa commande d’une femme portant le voile du deuil, symbole d’une mélancolie l’accompagnant jusqu’à son assassinat à 60 ans par un anarchiste italien.
C’est cette Sissi en fin de règne, frustrée par un système qui ne lui permettait jamais d’exprimer une opinion, qu’interprète Vicky Krieps dans le drame présenté cette année à Cannes, en sélection «Un Certain Regard».
Aux antipodes de Romy Schneider, la Luxembourgeoise incarne une impératrice qui désespère de s’émanciper de son mari et ne goûte aucun des plaisirs de la Cour.
Biopic féministe réalisé par Marie Kreutzer, Sissi y apparaît comme une femme mélancolique, ne parvenant à s’échapper que lorsqu’elle quitte Vienne, loin des yeux de François-Joseph qui lui refuse toute ingérence dans la vie de l’Empire.
De quoi casser le mythe à l’eau de rose d’une jolie princesse de conte de fées à l’existence faite de voyages et de faste lui valant d’orner les boîtes de chocolat dans les boutiques de musées.
Car aujourd’hui encore, les touristes consomment un rêve vendu à Vienne de paillettes et de valses, sous les dorures des appartements impériaux attirant jusqu’en Chine, où Sissi reste adulée.
Les droits de la série allemande ont été achetés au Brésil comme en Europe centrale et orientale. Ces multiples facettes permettent à «chaque époque d’avoir sa propre Sissi», résume Martina Winkelhofer.