Conflit Israël-HamasAvoir ses règles à Gaza, un calvaire pour les femmes
Dans la bande de Gaza pilonnée par Israël, les protections périodiques sont soit introuvables, soit hors de prix. Alors les femmes doivent faire avec les moyens du bord.
Des bouts de tissus ou des couches pour remplacer les protections menstruelles. Pour les femmes palestiniennes, avoir ses règles à Gaza, au milieu de la guerre, est une épreuve de plus. «Le manque d’eau rend difficile la gestion des menstruations dans des conditions d’hygiène et de dignité», souligne l’ONG Action contre la Faim. De nombreuses jeunes filles se retrouvent «à utiliser des produits menstruels plus longtemps que prévu, augmentant ainsi le risque d’infection».
«Je découpe les vêtements de mes enfants ou tous les morceaux de tissu que je trouve et je les utilise comme serviettes pour mes règles», confirme Hala Ataya, 25 ans. «Je me douche à peine toutes les deux semaines», se désole la jeune mère. Contrainte d’abandonner son domicile dans le camp de Jabalia (nord), elle survit avec ses trois enfants dans une école gérée par une agence de l’ONU, où elle partage une douche et une toilette avec des centaines d’autres.
Des chiffons qui provoquent abrasions et infections cutanées
«Nous sommes revenus à l’âge de pierre. Il n’y a ni sécurité, ni nourriture, ni eau, ni hygiène. J’ai honte, je me sens humiliée», lâche Samar Shalhoub. Fuyant la ville de Gaza (nord), elle vivote dans les différents refuges de fortune débordant de «crasse» depuis le début de la guerre. La jeune femme, âgée de 18 ans, substitue aussi les protections périodiques par des chiffons jusqu’à lui provoquer «des abrasions et des infections cutanées».
Le Comité d’hygiène de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens a constaté «une demande croissante des femmes en médicament pour soigner les infections cutanées», indique Intisar Al-Derawi, une de ses salariés. «Les demandes en contraception ont quadruplé car les femmes ne veulent plus avoir leurs règles», et la prise en continu de la pilule les interrompt, explique Marie-Aure Perreaut Revial, coordinatrice des urgences pour Médecins sans frontières à Gaza.
La toilette intime est un combat quotidien
De nombreuses femmes et filles vivent «dans des établissements surpeuplés, avec dans certains endroits seulement une douche pour 700 personnes et une toilette pour 150 personnes. Elles ont peu d’eau pour se laver, pas d’intimité, pas de savon pour les garder propres ni de protections menstruelles», déplore l’ONG ActionAid.
«La toilette intime est un combat quotidien», raconte Ahlam Abu Barika. «Les femmes portent des couches ou des langes. L’eau est insuffisante», assure la mère de cinq enfants. Si bien qu’elle a réduit «son alimentation et consommation de liquides», d’abord pour «les réserver à mes enfants», et ensuite «pour réduire le nombre de fois où je vais aux toilettes». «J’ai perdu 15 kilos», ajoute Ahlam Abu Barika, qui entame son troisième mois d’exil.
Des Pampers découpés en guise de serviettes périodiques
Depuis une salle de classe qui sert de chambre et entourée de ses enfants, Umm Saif explique que ses cinq filles «utilisent toutes des Pampers» en guise de protection. Pour maximiser ce produit rare, «chaque couche est découpée en deux morceaux». Mais même avec ce système D, il est difficile de s’en procurer et leurs prix ont augmenté de «14 shekels (3 fr. 30) à 25 shekels (5 fr. 90)».
Pour la plus jeune de ses filles, cette mère s’est résolue à remplacer sa ration de couches par des chutes de tissu. «Elle a commencé à pleurer, mais je ne peux rien faire», raconte-t-elle, impuissante. «J’ai acheté une pommade à la pharmacie pour traiter les infections à la fin des règles.»