Football: Au-delà du football, l'équipe d'Israël porte un message

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Les quatre matchs de novembre, dont celui contre la Suisse mercredi (20h45), sont utilisés par la sélection pour honorer la mémoire des victimes du conflit avec le Hamas.

Valentin Schnorhk Felcsut (Hongrie)
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Valentin Schnorhk Felcsut (Hongrie)
Lors du match contre le Kosovo dimanche, les joueurs israéliens ont fait le signe d'un demi-coeur, dédié aux otages retenus par le Hamas.

Lors du match contre le Kosovo dimanche, les joueurs israéliens ont fait le signe d'un demi-coeur, dédié aux otages retenus par le Hamas.

AFP

Mardi après-midi à Felcsut. La nuit tombe déjà. Derrière les contrôles de sécurité très présents autour de la Pancho Arena, il y a une équipe de football qui sort s’entraîner, mais chaque joueur ne porte qu’une seule chaussure.

En conférence de presse, Eli Dasa, le capitaine de la sélection israélienne, en brandit une autre, modèle Adidas, face à l’assistance: «Cette chaussure appartient à Nave, un enfant âgé de huit ans. Je pense que personne ne peut imaginer ce qui lui est arrivé. Cet enfant a été enlevé avec toute sa famille, il est maintenant retenu en otage à Gaza. Dans sa maison, il ne restait que cette chaussure gauche. Nous attendons son retour.»

La soirée de mercredi sera encore plus particulière. L’avant-match de la rencontre contre la Suisse comptera beaucoup pour Israël. Il sera l'occasion de passer ses messages. Sans doute que, comme contre le Kosovo dimanche (défaite 1-0), ses joueurs feront pendant l'hymne national le signe d'un demi-cœur, pour dire qu'une partie du leur est dédiée aux otages retenus par le Hamas depuis l'attaque du 7 octobre.

«Nous ne pouvons pas séparer le contexte ou mettre de côté ces sentiments, parce qu’ils sont en nous.»

Alon Hazan, sélectionneur d’Israël

Ce ne sera qu'une seule partie du protocole qu'entend suivre la sélection israélienne. L'autre, c'est la minute de silence qui interviendra après les hymnes. Elle a été demandée par la fédération israélienne, à la mémoire des «personnes assassinées lors de l'attaque criminelle du Hamas contre des civils le 7 octobre», écrit-elle sur son compte X. L'UEFA l'a approuvée.

Référence constante au conflit

Ces quatre rencontres de novembre qu'Israël a à disputer sont plus que des matchs de qualification à l'Euro 2024. Il y a d'un côté l'objectif sportif, mais il y a surtout le besoin de légitimation. Dans les communications passées par la fédération israélienne, il y a constamment ou presque une référence aux otages, aux victimes de l'attaque du Hamas et au conflit sanglant qui court depuis plus d'un mois.

Avant la rencontre de dimanche dernier, la fédération a par exemple posté sur ses réseaux sociaux une photo du vestiaire israélien, dans lequel un maillot était floqué en l'honneur du petit Nave. Aussi, on a vu ces derniers jours une vidéo de la sélection sur la route, sortant en vitesse de son car pour aller s'abriter au moment où des alarmes annonçaient des tirs de roquettes. «Rien ne nous arrêtera sur notre chemin vers l'Euro 2024», écrivait le compte officiel de la fédération.

Zahavi de retour deux ans après

Le contexte est inévitable. Il raconte tout. Le sportif, aussi. «Nous représentons tout le pays, pas seulement l’équipe nationale, acquiesce le sélectionneur Alon Hazan. Nous portons en nous les émotions de chacun. Nous ne pouvons pas séparer le contexte ou mettre de côté ces sentiments, parce qu’ils sont en nous.»

Il y a une union nationale qui rassemble le peuple israélien. Au cœur de celle-ci, un épisode témoigne de ce paradigme différent: pour la première fois depuis novembre 2021, Eran Zahavi, le meilleur buteur de l'histoire de la sélection, a été rappelé par Hazan. À 36 ans, il ne revenait plus en raison de dissensions internes: il voulait passer les veilles de match seul en chambre, plutôt que de devoir la partager. Cela lui avait été refusé, il avait été écarté.

Et puis, fin octobre, le joueur du Maccabi Tel-Aviv communique via la fédération son retour. Par esprit de solidarité et d'union, les deux parties ont fait un pas dans le sens de l'autre. Pour le bien de la nation.

Il faut forcément ce supplément d'âme pour que la sélection israélienne réponde présent lors de cette trêve internationale. La qualification directe à l'Euro lui est possible, même si elle a été compromise par la défaite contre le Kosovo. Sinon, elle se doit de viser la troisième place, qui lui garantirait une chance supplémentaire, lors des barrages à disputer en mars prochain. Cela serait un moindre mal, vu la situation dans laquelle elle se trouve.

La moitié de joueurs locaux

Parce qu'une partie du groupe retenu par Hazan n'a plus eu de compétition depuis le déclenchement du conflit il y a cinq semaines. Le championnat national est logiquement arrêté. Si Israël peut compter sur une intéressante diaspora (le gardien Glazer évolue à l'Étoile Rouge Belgrade, le talent Oscar Gloukh à Salzbourg, entre autres), près de la moitié des joueurs convoqués par Hazan évoluent sur leurs terres.

Et seuls ceux qui portent les maillots du Maccabi Haïfa ou du Maccabi Tel-Aviv ont pu rejouer la semaine dernière, à l'occasion des matchs de Coupe d'Europe dans lesquels ces deux formations étaient engagées. «Pour ces joueurs-là, ce sera le troisième match en cinq jours, alors que d’autres n’ont plus joué depuis des semaines, souligne le sélectionneur. Mais nous ferons tous de manière intelligente, avec certains qui joueront plus contre la Suisse et d’autres moins.»

Dans ces conditions, le cœur compte peut-être plus que le corps.

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