InterviewNicki Nicole: «J’espère revenir au Montreux Jazz»
La sensation hip-hop d’Argentine aux 12 millions d’abonnés Instagram était jeudi au Lab. Rencontre juste après son show «intimiste».
- par
- Fabio Dell'Anna
«Bullshit», qui signifie «connerie», est tatoué sur son cou. Nicki Nicole aime aller droit au but et cette authenticité lui a permis de devenir l’une des artistes les plus demandées d’Amérique latine. L’Argentine a commencé à chanter avec ses potes dans des «battles» pour le plaisir, avant de se découvrir un talent pour l’écriture ainsi que pour le rap.
Son histoire est similaire à un conte de fées des années 2000. Elle rêve de gloire depuis sa petite chambre à Rosario, poste une vidéo en 2019 sur YouTube et le nombre de vues explose. Aujourd’hui, elle comptabilise 12 millions d’abonnés sur Instagram, a été nommée pour deux Latin Music Awards, a participé à Coachella il y a trois mois et est la première artiste de son pays à avoir été invitée au «Jimmy Fallon Show» à la télévision américaine. Tout cela à seulement 21 ans. Le Montreux Jazz ne pouvait pas passer à côté de ce phénomène. Honorée par sa programmation sur la scène du Lab, Nicki Nicole a proposé une version différente de ses titres pour l’occasion. «J’avais envie de créer un moment intimiste», confie-t-elle avant de nous raconter son succès.
Comment s’est déroulé votre concert au Lab?
C’était la première fois que je chantais en Suisse et j’ai voulu faire quelque chose de plus acoustique et intimiste. J’ai publié plusieurs vidéos sur YouTube dans ce style et j’avais envie de retranscrire cette idée pour le festival.
Revenons à vos débuts, comment avez-vous eu envie de faire de la musique?
J’ai eu un déclic pour la musique la première fois que j’ai entendu Amy Winehouse. Etonnamment, il n’y a personne dans ma famille qui joue de la musique, mais ils en écoutent tous, tout le temps. Je suis la benjamine de quatre enfants qui ont un bagage musical de différentes générations. J’ai grandi avec des amis qui sont passionnés de musique et qui s’affrontaient dans des battles de rap.
Votre première expérience dans la musique a été à travers ces battles?
Oui, exactement. J’ai vu tous mes amis le faire et je me suis dit: «Pourquoi pas moi?» Je n’ai malheureusement pas fait de très bons scores. (Rires.) J’ai tout de même gardé cette manière d’improviser sur le moment pour écrire rapidement mes textes. Mes amis m’ont également énormément inspiré car lorsqu’ils perdaient, ils revenaient avec encore plus de motivation la semaine d’après.
Vous avez ensuite fait le buzz en 2019 sur YouTube avec votre chanson «Wapo Traketero», qui compte 125 millions de vues. Vous espériez cette réaction?
Je ne m’attendais pas du tout à ça. J’espérais que cela fonctionne, mais pas aussi rapidement. Je croyais qu’au fil des chansons publiées, l’engouement allait devenir de plus en plus gros. Mais là, c’était si soudain. Après ce buzz, plusieurs artistes d’Argentine ont commencé à m’écrire. Aujourd’hui j’ai encore du mal à réaliser que c’est de cette manière que tout a commencé. Je suis très reconnaissante.
Cela fait trois ans que vous avez commencé votre carrière, quel est votre plus beau moment?
Tous ont une grande importance, mais il est vrai que tout ce qui s’est passé cette dernière année a une signification plus particulière. Au début, je ne me sentais pas forcément comme une artiste légitime. Je ne pensais pas pouvoir assumer un long show. Alors que maintenant, j’ai plus confiance en moi et j’ai réussi à séparer l’artiste de la personne.
Être la première artiste argentine invitée au late show américain de Jimmy Fallon vous a rendue fière?
Oui, cela a été un moment très important dans ma carrière. J’ai toujours rêvé de pouvoir y participer. C’était une sorte de consécration, bien que je ne parle pas encore l’anglais. J’espère pouvoir y retourner pour participer à une interview et non pas seulement chanter l’un de mes titres. Je ne m’étais pas rendu compte de l’impact de ce show, c’est incroyable.
Comment expliquez-vous que les femmes d’Amérique latine comme Anitta, Nathy Peluso ou vous-même sont au top des classements dans le monde en ce moment?
Il y a toujours eu énormément de talents en Amérique latine. Le public et la société ont simplement changé à travers les années. Les femmes sont mieux acceptées, même s’il reste encore beaucoup de travail à faire.
Votre chanson «Venganza» a été nommée aux Latin Grammy Awards. C’est une sorte de consécration, non?
Oui. D’autant plus qu’il s’agit d’une chanson qui n’a pas été calibrée pour le streaming ou pour plaire en radio. Nous parlons d’un sujet important qui est le harcèlement et l’abus chez les femmes. J’ai reçu beaucoup de messages de soutien de la part d’autres femmes pour me remercier d’avoir mis en avant cette thématique. Au final, le plus important dans cette histoire n’est pas la nomination mais d’avoir pu donner une voix à toutes les femmes qui se sont senties impuissantes face à une expérience similaire. Toutes les personnes que je connais ont été confrontées à cette situation.
Quels sont vos projets?
Beaucoup de musique. J’aimerais bien revenir en Suisse, en particulier dans cette région où l’accueil a été fantastique. Pourquoi pas au Montreux Jazz Festival? Je pourrais montrer une autre facette de moi et connecter avec encore plus de gens. J’ai d’autres projets aussi avec des artistes argentins et internationaux dont je ne peux pas encore parler, mais j’espère vous les montrer très vite.