États-UnisL’avenir incertain de la pilule abortive se jouera devant la Cour suprême
Le gouvernement américain a annoncé jeudi qu’il allait saisir le plus haut organe judiciaire du pays pour contester les restrictions d’accès à la RU 486 imposées par une Cour d’appel.
L’avenir de la pilule abortive aux États-Unis se décidera devant la Cour suprême: l’administration Biden a annoncé jeudi qu’elle allait saisir le temple du droit pour contester les restrictions d’accès à ce cachet, décidées quelques heures plus tôt par une Cour d’appel. Le gouvernement «défendra le jugement scientifique» de l’Agence américaine des médicaments (FDA) ayant autorisé la pilule abortive depuis plus de vingt ans, a déclaré le ministre américain de la Justice, Merrick Garland.
Trois visites chez le médecin, une autorisation limitée aux sept premières semaines de grossesse, une interdiction d’envoyer la pilule par la poste… Un panel de trois juges basés dans le Sud conservateur a posé de strictes conditions mercredi soir à la distribution de la mifépristone. Avec des conséquences potentiellement immenses sur l’accès à l’avortement: combinée avec un autre cachet, la mifépristone est utilisée pour plus de la moitié des avortements aux États-Unis.
Un arrêt jugé «extraordinaire et sans précédent»
À l’origine de cette saga judiciaire: la décision la semaine dernière d’un juge, connu pour ses vues ultraconservatrices, qui avait retiré son autorisation de mise sur le marché. En dépit du consensus scientifique, il a estimé que la mifépristone présentait des risques pour la santé des femmes et suspendu son autorisation pour l’ensemble du territoire américain.
Il avait prévu un délai d’une semaine avant que sa décision ne s’applique, afin de laisser le temps au gouvernement fédéral de faire appel. L’administration du président démocrate Joe Biden avait demandé à une Cour d’appel de La Nouvelle-Orléans d’intervenir pour bloquer l’arrêt «extraordinaire et sans précédent» du juge Matthew Kacsmaryk, nommé par Donald Trump, «en attendant l’examen de fond» du dossier.
Autorisée par la FDA en 2000
Dans son recours, le gouvernement rappelait que plus de 5 millions de femmes ont utilisé la mifépristone, combinée avec un autre cachet, depuis son autorisation par la FDA en 2000. Quand elle est prise correctement, les effets secondaires graves sont extrêmement rares, plaidait-il. Mais la décision de la Cour d’appel ne donnait pas raison à l’administration Biden, puisqu’elle limitait considérablement l’accès à cette pilule.
La Cour suprême, dominée par les conservateurs depuis son remaniement par Donald Trump, est donc appelée à trancher. C’est cette même institution qui avait annulé en juin dernier la protection constitutionnelle de l’avortement, provoquant son interdiction dans une quinzaine d’États. L’avenir de ce cachet est donc très incertain.
Parallèlement, une coalition d’États démocrates a saisi un autre tribunal à la fin du mois de février pour tenter de préserver cette pilule. Moins d’une heure après la décision du juge Kacsmaryk, un de ses confères, le juge Thomas Rice, nommé par Barack Obama et siégeant dans l’État de Washington, avait estimé que la mifépristone était «sûre et efficace» et avait interdit à la FDA de retirer son agrément dans les 17 États à l’origine du recours.
La Floride critiquée
Quelques heures plus tard, la Maison-Blanche a dénoncé jeudi comme «extrême et dangereuse» la nouvelle loi interdisant l’avortement après six semaines de grossesse adoptée par le parlement de Floride. «Aujourd’hui, le parlement de Floride à majorité républicaine a envoyé une nouvelle loi extrême et dangereuse sur le bureau de gouverneur (Ron) DeSantis pour qu’il la signe», a fustigé la porte-parole de l’exécutif américain, Karine Jean-Pierre, dans un communiqué.
Approuvée à 70 voix pour et 40 contre par les élus de cet État du sud-est du pays, la loi doit en effet être signée par l’étoile montante de la droite populiste américaine et possible prétendant à la Maison-Blanche, Ron DeSantis, qui a déjà indiqué son intention de la promulguer.
L’entrée en vigueur de cette interdiction fera de la Floride l’un des États qui restreignent le plus l’avortement sans l’interdire. Les seules exceptions prises en compte par la loi de Floride sont celles d’un «risque grave» pour la santé de la femme ou d’une anomalie létale du fœtus, ainsi qu’en cas de viol ou d’inceste, dans la limite de 15 semaines de grossesse.