Basketball: Randoald Dessarzin: «Pour Pully Lausanne, c’est le moment de monter»

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BasketballRandoald Dessarzin: «Pour Pully Lausanne, c’est le moment de monter»

Sacrés champions de deuxième division, les Foxes ont acquis le droit d’évoluer dans l’élite la saison prochaine, sous réserve de leur surface financière. Leur entraîneur emblématique dresse le bilan.

Brice Cheneval
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Brice Cheneval
Randoald Dessarzin entraîne Pully Lausanne depuis 2017. Après trois ans en deuxième division, son équipe pourrait retrouver l’élite du basket suisse.

Randoald Dessarzin entraîne Pully Lausanne depuis 2017. Après trois ans en deuxième division, son équipe pourrait retrouver l’élite du basket suisse.

Photo S.Kury - foxesbasketball.ch

Randoald, on imagine que la nuit de samedi à dimanche a été courte pour vous…

En effet, j’ai dormi deux heures (rire). Les joueurs sont partis fêter de leur côté. Nous, le staff, sommes allés manger avec le comité. J’ai poursuivi la soirée avec des amis d’enfance à la maison. On a ouvert une bouteille de champagne et on a refait le monde jusqu’à 6 heures du matin. Après, j’ai commencé à répondre à tous les messages que j’avais reçus. Il restait de l’adrénaline en moi.

Que représente, pour le club et pour vous, ce titre de champion de LNB?

Pour le club c’est un accomplissement, trois ans après avoir quitté l’élite. On a rebondi avec un projet basé sur la jeunesse. On s’était fixé trois ans pour retrouver le plus haut niveau et nous y sommes parvenus. C’est la consécration d’un travail de fond, autour d’une équipe qui possède une identité lausannoise très forte. Et en ce qui me concerne, cela a beau être le 11e titre de ma carrière, il possède une saveur nouvelle. Ici, le contexte est différent de ce que j’ai connu à Lugano, par exemple, où il y avait la pression du résultat. À Lausanne, la montée n’était pas impérative mais c’est une exigence que je me suis imposée et que j’ai essayé de transmettre à mes joueurs. J’avais le sentiment que cette année était la bonne. 

«J’avais le sentiment que cette année était la bonne»

Randoald Dessarzin, entraîneur de Pully Lausanne

Jusqu’à la finale, vous aviez remporté tous vos matches de championnat, entre la saison régulière et les deux premiers tours de play-off. Comment expliquez-vous votre difficulté à vous défaire de Morges?

Les trois matches qu’on remporte, à domicile, c’est avec un écart de près de 30 points à chaque fois (ndlr: 100-71, 92-63 et 96-70 lors des actes I, II et V). Morges a fait preuve d’un caractère remarquable pour remettre les compteurs à zéro. Déjà lors des deux tours précédents, ils étaient revenus de situations extrêmement défavorables. On s’attendait à affronter une équipe accrocheuse et dans leur salle, ils nous ont énormément gênés (ndlr: défaites 71-62 et 78-74). On a balbutié notre basket. Mais on ne pouvait pas demander mieux que de terminer le travail chez nous, devant un public passionné. Ces deux défaites nous auront davantage appris que les 29 victoires de la saison.

Depuis votre descente en deuxième division, vous n’étiez pas encore parvenu à atteindre la finale. Est-ce dur de s’extirper de ce championnat?

Oui, parce qu’il y a chaque année trois à quatre prétendants à la montée, des équipes talentueuses. Je pense aux deux clubs zurichois que sont Grasshopper et Wallabies, qui possèdent une base de joueurs suisses exceptionnelle, à Morges…

Quel regard portez-vous sur la progression du club ces trois dernières années?

On a mis énormément l’accent sur la jeunesse, à tel point – et ça me fend le cœur de le dire – qu’on a 125 jeunes sur notre liste d’attente, faute d’équipements. On possède le label CPE (ndlr: Centre de Promotion des Espoirs), on a à cœur d’être au niveau de ce type d’exigence. On sait que le basket suisse dépendra encore longtemps de sa capacité à recruter des joueurs étrangers, mais on est l’un des clubs les mieux équipés en matière de développement de la jeunesse. J’ai bon espoir qu’on soit notre propre réservoir, pour envisager sereinement l’avenir. Et dans cette optique, une promotion en Swiss Basketball League est primordiale car on offre une autre perspective à nos jeunes. En matière d’exposition et de recherche de moyens, c’est le moment de monter.

On vous a connu coach à succès à Lugano et Boncourt ainsi qu’adjoint en équipe nationale. Voilà plusieurs années que vous passiez sous les radars en LNB, que ressentez-vous à l’idée de revenir au plus haut niveau du basket suisse?

Je ne cache pas une certaine fierté. J’ai le sentiment du devoir accompli. Parce qu’on est resté droit dans nos bottes par rapport au projet qu’on a établi. J’aurais pu rester au premier plan car j’ai reçu des offres très alléchantes, mais j’ai beaucoup aimé disparaître des radars. Je voulais rester loyal à Pully Lausanne, cela me tenait à cœur de mener ce projet. 

«J’aurais pu rester au premier plan car j’ai reçu des offres très alléchantes, mais j’ai beaucoup aimé disparaître des radars. Je voulais rester loyal à Pully Lausanne»

Randoald Dessarzin, entraîneur de Pully Lausanne

Vous êtes sensible au développement des jeunes et on vous sent épanoui chez les Foxes, dans un projet conforme à vos attentes…

Je suis entièrement d’accord. Je ne me suis jamais autant décrit comme entraîneur qu’enseignant du jeu. C’est mon métier en dehors du basket, je crois fortement aux valeurs de la pédagogie. Ça me tient à cœur de contribuer à un développement sain et exemplaire de notre jeunesse.

Pour l’heure, votre club n’est pas certain de posséder le budget nécessaire pour évoluer dans l’élite la saison prochaine. La possibilité que vous restiez en LNB est-elle grande?

Elle existe. On doit surfer sur l’engouement autour de notre titre. La priorité des prochaines semaines réside dans la recherche de sponsors.

Jusqu’à quand vous laissez-vous le temps de prendre une décision définitive?

Swiss Basketball a fixé une date butoir autour de la fin juin. On doit avoir une visibilité à ce moment-là, pour être en mesure de boucler un budget de 500’000 francs. 

La promotion serait la prochaine étape dans le développement du club. Quelles seraient les suivantes?

La sagesse. En début de saison, on aura le droit aux sempiternelles questions sur les objectifs sportifs. Mais je crois qu’on doit avancer par petits pas, comme on le fait depuis trois ans. D’abord, il faut stabiliser Pully Lausanne en première division sans changer notre ADN.

C’est-à-dire continuer à vous appuyer sur les jeunes?

Oui, sans pour autant leur brûler les ailes. Parmi nos M23, aucun n’a survolé le championnat cette saison. L’écart avec l’équipe première est énorme, il s’agira d’accompagner ceux qui nous rejoindront. Mawuli-Kplim Asase (ndlr: 23 ans), par exemple, a été énorme samedi soir mais on travaille avec lui depuis sept ans. On ne peut pas faire miroiter à nos jeunes qu’ils deviendront instantanément des tauliers. Cela demande du travail, de la persévérance, de l’abnégation et du professionnalisme.

Et à court terme, si la promotion est confirmée, comment envisagez-vous la structuration de votre équipe?

On souhaite garder un gros noyau de l’effectif actuel. Il y a une volonté commune de poursuivre l’expérience. De mon côté, je dois commencer à prendre un peu de recul pour des raisons personnelles. J’arrive bientôt à ma 30e année de coaching, je dois aider à créer des vocations. J’ai été épaulé par deux assistants extrêmement précieux cette saison (ndlr: Annissa Toumi et Luigi Scorrano), je crois en eux ainsi qu’en des joueurs proches de la fin de carrière. Il me semble important de transmettre le pouvoir, pour perpétuer l’ADN du club.

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