Hockey sur glace – Evguenï Chiriayev, la tête à Viège, La Chaux-de-Fonds et Kiev en même temps

Publié

Hockey sur glaceEvguenï Chiriayev, la tête à Viège, La Chaux-de-Fonds et Kiev en même temps

L’attaquant suisso-ukrainien du HC Viège lancera ses play-off dimanche face au HCC; son club formateur, celui qu’a tant marqué son papa. Le tout, dans un contexte de guerre qui le touche personnellement.

Jérôme Reynard
par
Jérôme Reynard
Evguenï Chiriayev a inscrit 27 buts et 26 assists en 53 apparitions cette saison.

Evguenï Chiriayev a inscrit 27 buts et 26 assists en 53 apparitions cette saison.

Marc Schumacher/freshfocus

Sur une terrasse ensoleillée de Martigny, où il vit avec sa femme et ses deux enfants, Evguenï Chiriayev pense à son cousin, à sa tante, à sa marraine, cloitrés dans leur appartement de Kiev. «Ils ont peur de sortir, alors ils se cachent, résume le binational, en contact régulier avec sa famille ukrainienne. Ils ne pensaient pas que ça irait aussi loin avec la Russie, c’est pour ça qu’ils sont restés. Mais maintenant, c’est la guerre et c’est plus compliqué de partir.»

L’homme (32 ans, dont 30 vécus en Suisse) n’en dira pas davantage à ce sujet. Si ce n’est qu’il «essaie de ne pas trop y réfléchir» quand il entre sur la glace, sous le maillot du HC Viège. «Je dois être capable de mettre de côté mes soucis privés pour être performant.» C’est que les play-off de Swiss League débarquent cette semaine.

Un sacré modèle

Pour Evguenï Chiriayev - et comme si le lot d’émotion n’était pas suffisant sans ça -, ils sont synonymes de duel face au HC La Chaux-de-Fonds; son club formateur, celui que son papa, Valeri, a tant marqué quelques années après son arrivée en Suisse (1991). Ce sera dès dimanche pour le compte des quarts de finale. 

«J'avais un champion du monde devant moi, alors disons que je me suis assez vite dit que ce serait très difficile de faire pareil»

Evguenï Chiriayev, attaquant du HC Viège

«J'ai toujours gardé un œil sur le HCC depuis que je suis parti (ndlr: en 2009). Et je dois dire que gagner là-bas, ça fait généralement un peu plus plaisir qu’ailleurs», sourit l’attaquant, dont les souvenirs les plus marquants aux Mélèzes mettent surtout en scène son père. «Le but victorieux de Steve Aebersold (ndlr: sur passe de Valeri Chiriayev) lors de la promotion de 2000, l’euphorie dans la patinoire, c'était un truc de malade», se remémore-t-il.

Une préférence suisse alémanique

Pas trop lourde à porter, l’étiquette de «fils de»? «Durant ma carrière, j’ai essayé de me focaliser sur moi-même, en me disant que je devais écrire ma propre histoire. J'avais un champion du monde devant moi (ndlr: en 1989, avec l'URSS), alors disons que je me suis assez vite dit que ce serait très difficile de faire pareil, se marre-t-il. Les années ont passé et j'ai également fait mon bout de chemin. Je n'ai pas été champion du monde, mais j'ai vécu une promotion forte en émotions (ndlr: avec le LHC en 2013), qui m'a fait grandir.»

«J’ai l’impression qu’avec les Suisse alémaniques, c’est globalement plus dur, plus intense»

Evguenï Chiriayev, attaquant du HC Viège

Jusqu’ici, sa route l’a mené de Lugano à Viège, en passant notamment par Bâle, Langnau et Olten, pour un itinéraire finalement très suisse alémanique. «Ce n’est pas un hasard, explique-t-il. J’ai l’impression qu’avec les Suisse alémaniques c’est globalement plus dur, plus intense. Je ne dis pas que les Romands sont des touristes, pas du tout. Ils ont autre chose aussi: la vitesse, le patinage, l’agressivité offensive… En revanche, j’ai souvent trouvé les entraînements plus rudes et les atmosphères de vestiaire plus «cash» avec les Suisse alémaniques. Ça me convient mieux.»

Saison compliquée

A Viège, l’atmosphère a probablement été plus «lourde» que «cash», cette saison. «Il y a eu pas mal de turbulences, admet Evguenï Chiriayev. On avait de gros objectifs au départ, mais on a manqué de temps pour intégrer les changements que le nouveau coaching staff (ndlr: emmené par le Suédois Per Hanberg, ex-Kloten) voulait opérer. Tout le groupe n'a pas adhéré à la philosophie, qui était bonne mais qui ne convenait pas totalement au profil de l'équipe.»

«Le HCC est une équipe redoutable et en forme. Mais nous aussi on peut être dangereux»

Evguenï Chiriayev, attaquant du HC Viège

Licencié fin décembre, Per Hanberg a cédé son poste à Daniel Wobmann, auparavant à la tête des U20-Top de Valais-Wallis Future et avec qui Viège a «retrouvé le goût de jouer et de revenir dans le vestiaire». Jusqu’à assurer la sixième place directement qualificative pour les quarts de finale des play-off.

Supporters de qui?

Toujours d’actualité, la promotion en National League? «Bien sûr, répond Evguenï Chiriayev (27 buts et 26 assists en 53 apparitions). Les objectifs n'ont pas changé. Maintenant, on va avancer série par série et là, il y en a une belle qui se prépare face au HCC (ndlr: 3e de la saison régulière). C'est une équipe redoutable et en forme. Mais nous aussi on peut être dangereux, d’autant que nos bons matches de la fin du tour de qualification nous ont permis de nous souder, de nous rapprocher.»

Acte I dimanche aux Mélèzes. Sous les yeux de papa et maman Chiriayev. Au fait, qui supporteront-ils? «Le HC... Non, je ne pense pas qu'ils seront pour le HCC, s’arrête le fiston en hésitant. Disons qu’ils seront pour le beau jeu.»

Ton opinion