FootballL’ASF en prend pour son grade après avoir confirmé Yakin
La décision de laisser la direction de l’équipe de Suisse à Murat Yakin jusqu’à l’Euro a été passablement critiquée par les médias, ce mercredi matin.
- par
- Renaud Tschoumy
Alors que les supporters de l’équipe de Suisse et une – bonne – partie des médias réclamaient un changement de sélectionneur, l’Association suisse de football (ASF) a surpris son monde, mardi, en milieu d’après-midi, en confirmant Murat Yakin à la tête de l’équipe nationale, jusqu’à l’été prochain.
Une clause du contrat signée le 9 août 2021 par Yakin prévoyant une reconduction automatique en cas de qualification, l’ASF n’a dans le fond fait que s’en tenir aux bases qui avaient été prévues, plutôt que de tout chambouler. Les réactions n’ont pas manqué dans les médias, ce mercredi.
Ainsi, le manque d’audace des dirigeants de l’ASF est fustigé par Florian Vaney dans la Tribune de Genève et 24 heures: «L’ASF a peut-être simplement pensé à sa santé financière à court terme, écrit-il. Pour une organisation déficitaire, payer six mois d’un salaire important dans le vide n’a rien d’anodin. Reste qu’à ce constat doit s’opposer le calcul du long terme. L’été prochain, l’association perdra son plus gros sponsor: Credit Suisse. Lui trouvera-t-elle un remplaçant d’un standing similaire? Cela pourrait dépendre de sa cote de popularité. Ces derniers mois, avec la fronde populaire menée autour de Murat Yakin, couplée à des performances vides, celle-ci se trouve au plus bas.»
Dans les mêmes colonnes des deux quotidiens lémaniques, Valentin Schnorhk souligne que le président Dominique Blanc et le directeur des équipes nationales Pierluigi Tami «n’ont pas eu le courage de prendre la décision qui s’imposait pour le bien et la sérénité du football suisse». Il ajoute: «Il y a une cassure entre l’équipe de Suisse et son public, Murat Yakin en est la source, et l’ASF s’en moque.»
Dans Le Temps, Laurent Favre rapelle que «cette polémique avait fini par diviser le pays entre ceux qui, constatant que l’équipe de Suisse a régressé durant l’année 2023, estimaient qu’il était urgent de réagir avant qu’il ne soit trop tard, et ceux qui jugeaient que ces mauvais résultats pouvaient s’expliquer par un manque de réussite offensive, une perte de confiance passagère, la loi des séries que chaque équipe subit à un moment ou à un autre, des performances moyennes ou insuffisantes de joueurs cadres. Bref, par des éléments conjoncturels.»
Outre-Sarine , ce «non-choix» de l’ASF a également fait couler pas mal d’encore. «Un demi-compromis!», titre Thomas Schifferle dans le Tages Anzeiger et la Basler Zeitung. Le journaliste ajoute qu’en ayant maintenu sa confiance en Murat Yakin, l’ASF «embarque avec elle toute une série de problèmes».
Il étaie son propos: «Les discussions sur l’avenir du sélectionneur seront dans l’air pendant six mois: les mois précédant l’Euro et surtout pendant l’Euro. Ensuite, Tami pourra analyser la situation… comme il était censé le faire durant tout l’automne.» Et de dresser un constat implacable: «L’équipe n’a fait aucun progrès depuis un an. Au lieu de traverser ces qualifications en trombe, elle a vu son moteur se mettre à tousser fortement.»
Du côté du Blick, le chef du football Christian Finkbeiner accuse directement le directeur des équipes nationales: «C’est la volte-face de Tami qui surprend le plus, note-t-il. Il a mis Yakin en cause après la mauvaise performance de Bucarest (défaite suisse 0-1), mais le Tessinois s’est laissé convaincre par son discours. La position de Tami est fragilisée. Si l’aventure de l’Euro devait mal tourner, ce ne sera pas seulement l’ère Yakin, mais aussi l’ère Tami qui prendra fin l’été prochain.»
Au Tessin, on n’en pense pas moins. Ainsi Massimo Solari dans le Corriere del Ticino: «Il y a un gagnant: Yakin. Et il y a un perdant: Tami. Cette confirmation risque de désorienter encore davantage le collectif suisse, qui se dirige vers de nouvelles déceptions en Allemagne, tant le passé récent ne laisse rien présager de bon. Murat Yakin est toujours considéré comme l’homme idéal pour diriger la Suisse à l’Euro. Soit, on en prend acte. Mais on craint également que les problèmes ne s’éternisent.»