Qatar 2022Pour qui ne pas tenir, maintenant qu'il ne reste que quatre équipes?
Les Helvètes se sont arrêtés en 8es de finale du Mondial 2022 de football. Plein de cadors sont passés à la trappe. Lematin.ch s'est donc essayé à l'exercice inverse de la semaine dernière et vous aide cette fois à trouver qui ne PAS soutenir.
- par
- Robin Carrel
La Suisse? Rentrée après avoir perdu le set son plus important depuis des lustres, tel un Roger Federer contre Hubert Hurkacz à Wimbledon en 2021. Le Portugal, les Pays-Bas, le Brésil, l'Allemagne, la Belgique, l'Angleterre, l'Espagne et compagnie ont tous pris la porte. De façon surprenante pour certains, un peu moins quand même pour d'autres. Et leurs supporters sont restés sur le carreau, avec la furieuse envie de ne plus regarder les matches qui suivent.
Mais on connaît les fans de foot et le téléspectateur moyen. A l'instar de ceux qui ont annoncé boycotter la Coupe du monde au Qatar, ils retrouvent toujours leur télécommande ou le chemin du bistrot quand il y a des gros matches au programme. Alors pour qu'ils trouvent quand même un enjeu autre au fond de leur cœur à ces demi-finales autre que d'écluser des vins chauds ou de mettre une piécette sur Jouez Sport, lematin.ch leur conseille qui détester.
On avait fait le contraire la semaine dernière en trouvant qui soutenir (ici et ici), cette fois, on va y mettre encore un peu plus de mauvaise foi... «Grâce» aux réseaux sociaux, qui font la part belle aux «haters» – d'autant plus depuis l'arrivée aux commandes d'un certain Elon M.* (nom connu de la rédaction) –, il est désormais permis de détester à haute voix tout le monde. Il semblerait même que ce soit recommandé. Alors on s'est prêté à l'exercice.
Et pourquoi ne pas être contre la Croatie?
Franchement, ce serait ridicule que le football mondial, le sport roi, l'opium du peuple soit dominé par une contrée de moins de quatre millions d'habitants. Si la Suisse et ses huit millions de citoyens n'y arrivent pas, pourquoi eux? On parle quand même d'une contrée qui compte deux millions de personnes de moins que la Suisse allemande. Qui est peuplée comme la moitié de la région française d'Auvergne-Rhône-Alpes. Franchement, ce serait une gifle dans la face de la discipline la plus globale de la planète terre. Les Croates ne peuvent pas en laisser un peu aux autres, non? Imaginez le Koweït et ses 4'380'000 habitants, en finale de Mondial? Ça aurait de l'allure? Ou la Moldavie (4'013'000)? Ou l'Érythrée (3'662'000)? Ou la Mongolie (3'378'000)? Ou l'Uruguay (3'496'000)? Ah zut, ça ne marche pas pour celui-là.
L'équipe de Croatie, cette année, a éliminé le Brésil aux penalties, certes, mais surtout à cause d'un but venu d'ailleurs de Bruno Petkovic. Un grand machin d'1m93 et dont le CV ferait tache même dans le parcours d'un attaquant... suisse. Le type est rentré au pays en août 2018, après avoir échoué en Italie. Il y a écumé des clubs aussi prestigieux que Trapani, le Virtues Entella, avant de toucher à son plus haut niveau personnel à Bologne et à l'Hellas Vérone. Genre: en 42 matches de Serie A, cet attaquant de pointe a marqué 0 but. Bon, cette saison, c'est quand même 8 goals en 15 matches de championnat croate, hein. Une Ligue dans laquelle Mario Gavranovic avait claqué 17 pions en 27 parties il y a deux ans.
Il ne faut pas oublier non plus que cette sélection, aussi loin qu'elle aille dans les grands tournois, ne sert pas à grand-chose au moment de faire tomber l'équipe de France, la bête noire de la majorité des Romands. Les «Welches» y avaient déjà cru fort en 1998, quand l'incroyable Davor Suker avait ouvert le score au Stade de France, à la 46e minute de la demi-finale de la Coupe du monde française. Mais Lilian Thuram est ensuite passé par-là (46e et 70e). Et puis il y a eu la finale du Mondial 2018 en Russie... Et les cocoricos ont recommencé pour quatre ans de plus, tout ça parce que la Croatie n'a pas fait le job que la Suisse a su faire à l'Euro 2020. Non, franchement, ça fait plein de bonnes raisons de ne pas soutenir les «Valtreni».
Et pourquoi ne pas être contre l'Argentine?
Dans le monde de la sphère de cuir (ou plutôt, en 2022: dans le monde du latex naturel ou du caoutchouc butyle, un latex synthétique), il y a une bonne partie d'aficionados de Lionel Messi, un tas de fondamentalistes de Cristiano Ronaldo, ainsi qu'un certain nombre de personnes au milieu qui, soit n'ont pas fait de choix par désintérêt, soit trouvent que se positionner entre deux cadors de cet acabit est une hérésie footballistique et je les comprends très fort. Les premiers seront impossibles à retourner, tandis que les deuxièmes sont déjà conquis à la détestation de l'Albiceleste. Ce sont donc les quelques «neutres» auxquels les deux prochains paragraphes sont adressés, histoire de ne pas écrire pour du vent, il fait assez froid comme ça.
Il est toutefois nécessaire d’évoquer le cas Messi, au milieu de cette équipe entièrement dévouée à son leader. Est-ce que le football moderne peut encore tolérer qu’un collectif entier soit à la solde d’une seule personne, si géniale soit-elle? Cristiano Ronaldo était limite traîné comme un boulet par un Portugal finalement meilleur sans lui, cette année. Mais l’Argentine, sans Messi, aurait-elle réalisé un tel parcours? Poser la question, c’est y répondre. Et au milieu d’une Coupe du monde qui est en train de sacraliser la solidité des groupes, que ce soit sur le terrain ou dans les vestiaires, une victoire d’un soliste exceptionnel malgré son âge, au milieu d’un orchestre plutôt moyen, ça ferait tache. Ce serait mettre Renaud Capuçon au milieu des frappeurs de tambours de la Jeunesse de Montricher et cet attelage gagnerait à la fin une victoire de la musique. On ne devrait jamais être prêt à ça.
L‘Argentine version 2022 ne doit également pas être championne du monde au vu de ce qu’elle montre pour l’instant car il lui manque un moment de légende. Elle ne sent pas assez le souffre. Une main ou un solo à la Maradona comme en 1986, des décisions arbitrales vraiment honteuses avec un contexte géopolitique vicié comme en 1978… Ca c’est l’Argentine qu’on aime. Les expulsions oubliées de Paredes et/ou Messi ne sont pas assez honteuses par rapport à tout ce qu’il s’était passé à cette époque. On ne devrait pas être prêt à soutenir une formation argentine trop lisse (comme le caractère de son No 10, diront les mauvais es langues dont je ne fais pas partie, vous en conviendrez). Bon, il reste deux matches, tout n’est pas encore perdu…