FootballLa première de Balotelli passée au crible
Samedi, contre Bâle, l’Italien de 32 ans a touché beaucoup de ballons, tout en courant peu. Mais il est resté dangereux, en étant à la source du 2-1 décisif.
- par
- Valentin Schnorhk
Ce sont les mots d’un entraîneur. Il faut les prendre pour ce qu’ils sont, et leur apporter la nuance nécessaire: «Pour moi, en termes de qualité pure, Mario Balotelli fait partie des quinze meilleurs joueurs du monde», se persuadait Paolo Tramezzani en conférence de presse samedi. L’attaquant italien venait de faire ses premiers pas sous le maillot du FC Sion, participant donc au succès 2-1 contre Bâle.
Le fait est que cette première sortie de Balotelli n’avait rien d’un candidat au Ballon d’Or. Avec toutes les excuses qu’on peut lui trouver: il s’est très peu entraîné avec Sion en plus d’avoir été touché au genou dernièrement. Le public, pourtant, s’en est contenté, ravi de voir un tel joueur fouler la pelouse de Tourbillon. Où se situe la vérité? Décryptage des trente-et-une premières minutes sédunoises de Mario Balotelli.
Cherché plus que de raison?
Un point chiffré, d’abord: samedi, Balotelli a été impliqué sur vingt-sept actions. Autrement dit, à vingt-sept reprises, il a été soit dans la zone du ballon (détenu par l’adversaire), soit en possession du ballon, soit ciblé par un partenaire. Concrètement, il a été touché une vingtaine de fois. Compte tenu du temps de jeu qu’il a passé sur la pelouse, c’est beaucoup.
Un élément relatif: Filip Stojilkovic, celui qu’il a remplacé, a reçu autant de passes que lui en passant deux fois plus de temps sur le terrain. Signe qu’il a été beaucoup cherché, notamment par Heinz Lindner qui l’a visé sur chacun de ses longs ballons. Et qu’il a souvent voulu être trouvé. Ainsi, sur ses deux premiers ballons, l’Italien de 32 ans a sollicité la balle très proche de son porteur, presque dans le rond central. Sans doute un moyen de se mettre en confiance.
Globalement, Balotelli a demandé le ballon dans les pieds. Ses appels se seront faits rares. Pas forcément surprenant, et cela a participé à augmenter son nombre de ballons touchés. Notamment sur les phases de transitions où il a très souvent constitué le joueur-cible pour ses partenaires. Qui ont parfois peut-être fait preuve d’un peu de révérence puisque la passe ne faisait pas toujours sens. Elle a parfois contribué à ralentir l’action. Et a eu tendance à le mettre dans des situations peu favorables: au total, Balotelli aura perdu 9 des ballons qu’il a touchés, soit proche de la moitié.
Des efforts partiels
Mario Balotelli est probablement à court de rythme. Il y a des signes qui ne trompent pas. Il n’a certes jamais vraiment été dans l’abatage tout au long de sa carrière. C’est pourquoi on se préoccupe peu de son pressing alibi, qui lui a toutefois permis une fois de mettre Comas en difficulté à la relance. Son replacement aura été parfois appréciable, parfois inexistant. Qu’importe, ce n’est pas pour ça que Tramezzani l’aligne, il l’a d’une certaine façon reconnu en comparant sa présence dans le groupe à celle de Diego Maradona dans le Naples d’Albertino Bigon.
En revanche, avec ballon, il y a eu des attitudes plus dérangeantes. Notamment avec des détails négligés. À commencer par son orientation: Balotelli a le plus souvent attendu d’être servi pour se mettre dans le sens du jeu. Ce qui l’a mené à perdre son premier ballon, parce qu’il s’est emplâtré dans deux Bâlois qui avaient resserré le marquage autour de lui. Il a aussi été avare en petits pas de déplacement pour se démarquer, même si cela n’a pas forcément de grosse incidence sur sa première touche.
On peut aussi lui reprocher sa négligence lorsqu’il s’est agi d’accompagner les actions. Ainsi, on l’aura très peu vu finir dans la surface les actions qu’il a initiées. Pour preuve, il n’a touché qu’un seul ballon les 16 mètres adverses, là où Stojilkovic en a compilé 6. C’est une présence qui a pu manquer. À l’instar de cette action où il oriente le jeu vers Lavanchy, qui peut progresser jusqu’aux abords de la surface. Le Vaudois n’a eu aucune solution de centre, précisément parce que Balotelli avait préféré venir demander le ballon dans les pieds à proximité de lui. La suite de la séquence n’aura rien donné.
Autre exemple? L’intention répétée de l’ancien attaquant de Manchester City de jouer en une touche, presque en déviation. Il y a parfois eu du génie dans ces gestes-là, et d’autres fois une forme d’abus: là où le jeu commandait une prise de balle vers l’avant pour fixer la défense, il a pu privilégier un ballon par-dessus une défense qui avait déjà reculé et n’était pas vraiment mise en difficulté.
Quand le talent prend le dessus
Malgré tous ces indéniables freins, il y a toujours un moment où plein de choses trouvent une justification avec Mario Balotelli. Généralement, c’est parce qu’il fait basculer le match, ou au moins il y contribue largement. Le but décisif de Giovanni Sio trouve sans doute l’une de ses sources dans un geste de Super Mario. D’ailleurs, c’est une des rares fois où Balotelli a sollicité un appel vers l’avant, dans la course.
La passe de Musa Araz n’était pas parfaite, mais elle a pourtant permis à l’Italien de réaliser un coup du sombrero sur Comas et obtenir un coup franc. Il l’a tiré lui-même, l’a cadré et obtenu une touche. Dans la continuité de celle-ci, Sion a marqué, par Sio. Pas par Balotelli, certes, mais ce dernier était sur le coup dans la surface et il a surtout trouvé le moyen de passer devant son vis-à-vis (Adams). Si Bua avait visé le premier poteau, Balotelli aurait sûrement inscrit son premier but en Valais.
Cela n’a pas été le cas. Pourtant, il a tout de même fait vibrer le public sur les deux tirs qu’il aura tenté: le coup franc donc, et un tir des vingt-cinq mètres. À chaque fois, Hitz a dû repousser. Pourtant, il s’agissait de deux situations de qualité très moyenne (0,09 xG, puis 0,03xG). La bonne exécution des frappes a légèrement valorisé l’occasion (un total de 0,15 Post-shot Expected Goal, qui se calcule en fonction de la destination du tir).
Il faut imaginer que c’est dans ce domaine qu’il pourra faire parler son côté fuoriclasse: en donnant beaucoup d’impact à la moindre petite situation. Et en même temps, quelle autre filière peut encore lui correspondre sur la durée?