FootballDans l’arbitrage suisse, une base qui se dérobe
Le niveau des arbitres d’élite dépend par essence de la qualité du bassin régional. Or, les associations cantonales s’inquiètent d’une pénurie de personnel alarmante.
- par
- Florian Vaney
Durant toute la semaine, Le Matin.ch élargit le débat autour du thème de l’arbitrage en Suisse. Voici le quatrième épisode.
Le canton de Vaud a trouvé la solution! Pour l’instant. Une légère réorganisation dans un secteur clé, un changement d’homme et de discours pour accompagner l’importantissime passage des arbitres les plus débutants jusqu’au niveau 2 de leur cursus et magie, grand bonheur et soulagement: l’association cantonale vaudoise de football a sorti la tête de l’eau. Ses arbitres en herbe crochent davantage. Bénéfice direct, ils permettent au compteur d’être repassé au-dessus de la barre des un peu plus de 400 directeurs de jeu. Soit le nombre d’hommes et de femmes nécessaires pour arbitrer chacune des rencontres se déroulant sur sol vaudois sans que ceux-ci ne doivent se multiplier.
Dans ce coin-là de Romandie, on préfère ne pas crier victoire trop vite. Les contraintes nées de la récente période de vaches maigres continuent d’exister, forçant certaines rencontres à se dérouler à une heure et une date du week-end imposées. Le jour où le compteur d’arbitres a atteint 380, ce sont les équipes qui ont perdu en liberté. Et puis, la prudence vaudoise puise sa source un peu partout autour de ses frontières.
Vaud partage, Fribourg s’alarme
Le sort de ce canton de Vaud désormais un peu mieux loti que la moyenne, c’est de partager ses arbitres. Si bien que certains d’entre eux reçoivent des convocations venant de l’association neuchâteloise, notamment. Pour remplir les cases. Puisqu’à Neuchâtel aussi, les temps sont durs et les contraintes de timing des matches appliquées.
À la fin du premier tour, le président de la commission de l’arbitrage de l’Association valaisanne de football, Alexander Schmid, s’agaçait dans les colonnes de 20 minutes. «C’est difficile d’attirer de nouveaux venus dans nos rangs alors que l’arbitre n’est parfois plus considéré comme un être humain.» Ce n’est pas l’association fribourgeoise, qui s’alarmait début avril de manquer de près de 130 arbitres pour la saison à venir, qui dira le contraire. Elle qui a dû se résoudre à reporter certaines rencontres, tout en voyant plusieurs de ses arbitres diriger jusqu’à six matches par semaine, avertissait La Liberté en septembre.
Plus la base de la pyramide est fragile, plus son sommet est menacé. Moins d’arbitres régionaux signifie moins de concurrence dans les premières couches. Et à long terme, moins de concurrence en bas a toutes les chances de vouloir dire moins de qualité en haut. Particulièrement dans la période charnière qu’est en train de traverser le football suisse.
Ouverture des vannes
Depuis le début de la saison, la majorité des clubs de Challenge League ont appris à vivre avec cette opportunité: à la fin de l’exercice, trois équipes rejoindront potentiellement une Super League qui s’étend de 10 à 12 formations. Sauf que cette réalité-là existe également pour les arbitres. L’extension du nombre d’équipes appartenant au giron du football professionnel constitue une chance pour eux. Et un défi pour l’arbitrage suisse, qui met en jeu une partie de sa crédibilité.
Dans les faits, l’académie regroupant les arbitres les plus prometteurs pour les amener en direction de deux plus hautes divisions nationales a commencé à ouvrir les vannes. Le nombre de directeurs de jeu réclamés à chaque association régionale a augmenté en même temps que les critères d’admission se sont élargis. Là où les profils visés avaient tendance à correspondre à ceux d’arbitres dans la première moitié de leur vingtaine, l’académie s’ouvre désormais à des candidats allant jusqu’à 30 ans. Le message envoyé n’est pas naturellement mauvais, puisqu’il valorise la diversité parmi les aspirants. Reste qu’il symbolise un appel d’air du haut de la pyramide. Face auquel le bas ne se trouve pas nécessairement au mieux pour répondre.