EnergieRéduire la température chez les locataires à 19 degrés serait illégal
Propriétaires immobiliers et défenseurs des locateurs réfutent la règle du chauffage réduit à 19 degrés en cas de pénurie d’énergie, préconisée par Berne. Le cas échéant, les locataires pourraient alors avoir droit à une baisse de loyer.
«La menace de la règle des 19 degrés brandie par le Conseil fédéral transforme les adversaires en camarades de combat», constate la «SonntagsZeitung» dimanche. Associations des locataires et des propriétaires estiment en effet toutes deux qu’une limitation officielle de la température ambiante à 19 degrés dans les pièces d’habitation telle que prévue par Berne en cas de pénurie serait inappropriée. Elles l’ont chacune fait savoir à Berne par un courrier.
A l'Association suisse de l'économie immobilière (Svit), on motive l’opposition à cette mesure par la crainte que de nombreux locataires déposent plainte si leur logement est trop froid. Selon la jurisprudence, des températures ambiantes différentes de la norme dans les appartements en location sont en effet illégales. Les locataires pourraient ainsi obtenir entre 5 et 50% de réduction de loyer. Et en cas de panne totale du chauffage, cette réduction pourrait même aller jusqu’à 100%. Reste à savoir si les juges obligeraient également les bailleurs à réduire les loyers si Berne mettait en vigueur la règle des 19 degrés en cas de pénurie d’énergie.
20 à 21 degrés chez les locataires
Sur le plan juridique, les tribunaux divergent sur la température minimale à respecter. C’est un arrêt du Tribunal fédéral de 2017 qui sert en général de référence. Il situe la température dans la norme entre 20 et 21 degrés pour un appartement ordinaire, avec certains écarts tolérables. Ainsi, de façon surprenante, le TF a défini la température minimale pour les logements Minergie un degré plus bas que pour les logements ordinaires, soit entre 19 à 20 degrés, note la « SonntagsZeitung ».
Pour l’heure, les juristes se disputent sur la question. Et même au Département de l’économie (DFE), on n’exclut pas que les locataires pourraient dès lors exiger une réduction de loyer. Les juristes de Guy Parmelin notent certes que dans la pratique suisse du droit du bail, une température inférieure d'environ 3 degrés peut encore être considérée comme admissible. Mais, au final, les tribunaux des baux devraient veiller à la clarté, selon ces juristes. Critique, le Svit note que l'on pourrait s'attendre à ce que le Conseil fédéral clarifie lui-même cette question.
Appartements à 19 degrés « pas acceptables »
L’ASLOCA (Association Suisse des locataires), plus intransigeante, estime que des appartements à 19 degrés pour tous ne sont tout simplement «pas acceptables», notamment pour les personnes âgées, vulnérables et malades. Ce d’autant plus que dans les institutions de soins, même en cas de pénurie, la température ne doit pas être réduite par respect pour les personnes affaiblies: «Rien ne justifie que les personnes âgées vivant à domicile doivent supporter des températures plus basses que celles qui vivent dans une maison de retraite ou de soins», souligne Rosenkranz, secrétaire générale.
Une règle inapplicable dans la pratique
Pour rappel, Migros, Manor et la Coop ont déjà annoncé leur décision d’appliquer une température maximum de 19 degrés dans leurs établissements cet hiver. Le canton de Genève va lui limiter les bâtiments de l’administration publique à 20 degrés, alors que le canton de Fribourg a lui-aussi choisi un maximum de 19 degrés.