AfghanistanL’EI revendique l’attentat contre l’hôpital militaire de Kaboul
La branche afghane du groupe État islamique a revendiqué l’attaque contre l’hôpital militaire de Kaboul, qui a fait au moins 19 morts et 50 blessés mardi.
Au moins 19 personnes ont été tuées et 50 blessées mardi dans une attaque contre l’hôpital militaire national de Kaboul, revendiquée par la branche afghane du groupe État islamique et qui confirme la persistance des violences en Afghanistan malgré le changement de régime et le retour au pouvoir des talibans en août.
Le chef des forces militaires talibanes à Kaboul, Hamdullah Mokhlis, figure parmi les victimes, a-t-on appris mercredi de source officielle. Le commandant Mokhlis membre du réseau Haqqani, qualifié de terroriste par les États-Unis, et des forces spéciales talibanes, appelées «Badri 313», est le plus haut responsable taliban tué depuis que les islamistes ont pris le pouvoir en Afghanistan, à la mi-août.
Dans un communiqué publié sur les chaînes Telegram de l’organisation djihadiste, l’EI-K, rival et principal adversaire des talibans au pouvoir, affirme que «cinq combattants du groupe État islamique ont mené des attaques simultanées et coordonnées» sur le site. Un djihadiste a déclenché une ceinture explosive à l’entrée de l’hôpital avant que d’autres entrent dans le bâtiment et ouvrent le feu, ajoute le groupe.
Dès l’après-midi, le porte-parole des talibans, Zabiullah Mujahid, avait accusé l’EI-K. «Les assaillants de l’EI-K voulaient viser des civils, des médecins et des patients» de l’hôpital Sardar Mohammad Dawood Khan, le plus grand hôpital militaire du pays, avait-il ajouté, assurant que les talibans avaient mis fin à l’attaque en 15 minutes après avoir notamment héliporté des «forces spéciales» sur le toit du bâtiment.
Un kamikaze à moto
C’est dans cet établissement que mercredi dernier le ministre taliban de la Défense Mohammed Yaqoub, fils du fondateur des talibans, le mollah Omar, avait fait sa première apparition publique, pour demander notamment aux hommes d’affaires afghans d’investir dans les hôpitaux. L’attaque a été lancée avec «un kamikaze à moto qui s’est fait exploser à l’entrée de l’hôpital», a déclaré à l’AFP un responsable au sein du gouvernement taliban, qui a également évoqué une seconde explosion.
Plusieurs autres assaillants ont ensuite réussi à entrer dans l’hôpital, où ils ont fini par être abattus par les talibans dépêchés sur place, a-t-il précisé. «Dix-neuf corps et environ 50 blessés ont été emmenés dans les hôpitaux» de la capitale afghane, a déclaré à l’AFP sous couvert d’anonymat un responsable au ministère de la Santé.
«L’EI est là!»
Zabiullah Mujahid n’a de son côté fait état que de quelques victimes, indiquant que deux combattants talibans, deux femmes et un enfant avaient été tués aux abords de l’hôpital. Lorsque l’attaque a commencé dans cet hôpital qui peut accueillir jusqu’à 400 patients, «on pensait qu’on allait mourir», a déclaré à l’AFP Rowana Dawari, une femme qui se trouvait à l’intérieur.
Elle a d’abord entendu «une explosion à la porte» puis les assaillants arriver et ouvrir le feu, des vitres se briser. Elle s’est aussitôt, avec d’autres, «cachée dans des toilettes». Après la déflagration, «des gens ont crié ‘‘L’EI est là’’» et «on a entendu beaucoup de coups de feu», a raconté à l’AFP Amanudhin, 28 ans, agent d’entretien à l’hôpital.
Il a indiqué avoir fui l’arrivée des assaillants, poussant une patiente âgée et fragile dans son fauteuil roulant. «On était au 7e étage et on s’est enfermé dans une pièce. Il y avait des blessés partout». Médecins, employés et patients «se sont cachés» jusqu’à l’arrivée des talibans, «qui ont cassé la porte pour entrer», a précisé Amanudhin.
Déjà attaqué
Un médecin a indiqué à l’AFP avoir craint que les assaillants n’aillent «de chambre en chambre» pour tuer plus de gens, «comme ce fut le cas la première fois où l’hôpital a été attaqué». L’hôpital militaire avait déjà été visé en mars 2017 par des assaillants habillés en personnel médical, une attaque revendiquée par le groupe État islamique.
Cette fusillade de six heures à l’intérieur du bâtiment avait fait 50 morts selon le bilan officiel, et plus du double selon des sources sécuritaires. Depuis leur arrivée au pouvoir le 15 août, les talibans, qui font du retour de la sécurité dans le pays leur priorité après 20 ans de guerre, sont confrontés à une vague d’attentats sanglants menés par l’EI-K, une autre organisation islamiste d’origine sunnite encore plus radicale.
L’EI-K a ciblé ces dernières semaines aussi bien les talibans que la minorité chiite afghane. Ces derniers jours, une série de meurtres, présentés par la presse locale comme des représailles entre combattants talibans et de l’EI-K, ont eu lieu en particulier dans la province de Nangarhar (est), connue pour être le principal fief de l’EI-K.
La dernière attaque contre des civils dans la capitale afghane remonte au 3 octobre. Au moins cinq personnes avaient été tuées dans une explosion survenue près de la mosquée Id Gah à Kaboul, dans une attaque revendiquée par le groupe État islamique. D’autres ont eu lieu depuis, visant notamment la police talibane. «Cibler des professionnels de la santé et des patients est odieux et n’a pas de justification», a quant à lui réagi mardi Ned Price, le porte-parole du Département d’État américain.