FOOTBALLDenis-Will Poha: «Il vaut mieux être le boucher que la vache»
Le milieu de terrain du FC Sion, auteur d’un très bon début de saison, a tout pour devenir un pilier de la formation valaisanne. À confirmer dès ce dimanche à Zurich (14 h 15).
- par
- Simon Meier
Sur le terrain, il est celui qui met le pied et joue des coudes. Celui qui mouline sans cesse, carbure à plein régime. Denis-Will Poha, comme il l’a démontré lors des trois premiers matches du FC Sion cette saison, a tout pour devenir l’un des moteurs de l’équipe valaisanne. «Par rapport à mes six derniers mois en France (ndlr: à Pau, sous la houlette de l’ex-Sédunois Didier Tholot), j’ai eu l’occasion de plus lâcher les chevaux, de me projeter et d’accompagner les actions, savoure le milieu de terrain de 25 ans. Avant, on me demandait plus d’assurer l’équilibre. J’avais l’impression de ne pas donner tout ce que j’avais à donner. Là, il y a plus de liberté et de créativité dans mon jeu. Ça fait du bien, je n’ai pas de frein.»
Alors le Breton d’origine ivoirienne lâche les chevaux. Il s’éclate sans ménager les autres, à l’image de son exemple Arturo Vidal, fameux combattant chilien de l’entrejeu. «On se fiche des adversaires, ce qui compte, c’est nous, sourit Poha avec l’air du chérubin, lorsqu’on le branche sur son implacabilité dans les duels. Comme on dit, il vaut mieux être le boucher que la vache.» Si les contacts étaient à ses yeux «plus méchants» en Ligue 2, l’ex-junior de Guingamp souligne «l’intensité des courses, plus élevée en Super League».
Dès ce dimanche à Zurich (14 h 15), Denis-Will Poha poursuivra sa découverte d’un football helvétique qu’il juge «moins arrogant et plus respectueux» que ce qu’il a connu de l’autre côté du Jura. Il faut dire qu’à 25 ans, celui qui fut champion d’Europe M19 en 2016 avec un certain Kylian Mbappé a déjà beaucoup bourlingué. Formé à Rennes, prêté à Orléans puis à Nancy, le jeune homme a passé deux ans au Portugal (Guimaraes, Portimonense) avant d’atterrir à Pau. Le voilà en Valais, avec un contrat jusqu’en 2025. Le début d’un équilibre, d’un épanouissement?
«On est dans un métier où la stabilité, c’est compliqué, sourit le jeune papa. Je ne regrette pas le fait d’avoir bougé, d’être allé voir ailleurs. Si j’étais resté, j'aurais eu une histoire moins riche. Maintenant que j’ai deux enfants (ndlr: un garçon de 5 ans et une fille de 3), j’aimerais bien sûr qu’ils puissent ne pas changer d’école, garder les mêmes copains… Je fais comme je peux et je m’adapte, tout comme eux – au Portugal, ils commençaient à parler portugais.»
Paolo Tramezzani, en tout cas, apprécie le langage footballistique de son nouveau joueur. «Je suis très content de tout ce qu’il fait jusqu’ici, applaudit le coach italien du FC Sion. En termes d’engagement et de valeurs sur le terrain, il me fait beaucoup penser à quelqu’un comme Gennaro Gattuso. En terme de positionnement, il peut évoluer devant la défense ou se projeter davantage vers l’avant, entre un No 6 et un No 8. Il doit encore s’affirmer et poursuivre son développement. Mais avec du temps, je pense qu’il peut devenir un leader, quelqu’un qui tire les autres. Il a la volonté, la grinta, le caractère, et c’est ce qui a pu nous manquer la saison dernière.»
Cette «gnaque», cette énergie, Denis-Will Poha la tire d’un enthousiasme naturel. «Je n’ai jamais songé à faire autre chose que du foot, j’adore trop ça.» Et d’une détermination au-dessus de la moyenne. «À l’entraînement, déjà, j’essaie de me mettre ko, explique celui qui impressionne par son volume physique. J’aime bien les sports de combat et, des fois, je suis un peu «matrixé», inspiré en un sens. Il faut se faire mal. J’aime cette mentalité des sports de combat, où on se dit qu’il faut se faire plus mal que son adversaire pour gagner sur le ring.»
La méthode une fois transposée sur une pelouse, ça déménage. Ce dimanche, contre le champion zurichois au Letzigrund, comme samedi passé devant Servette à Tourbillon (0-0), Denis-Will Poha va mettre le pied, jouer des coudes. Se projeter vers l’avant pour créer des brèches, revenir vers l’arrière pour en combler. Il va pistonner, mouliner, carburer. Comme un moteur, avec ses airs de chérubin.