EconomieL’Inde, le prochain eldorado des horlogers suisses
L’étude s’est notamment basée sur l’augmentation du nombre de millionnaires et l’essor de la classe moyenne. La reprise n’est pas aussi forte qu’attendu en Chine après la pandémie.
L’Inde, un marché difficile mais prometteur, apparaît comme le prochain grand relais de croissance pour les fabricants de montres suisses, selon une étude du cabinet Deloitte, qui prédit que le pays se hissera parmi leurs dix plus gros marchés d’ici dix ans. Alors que la reprise en Chine n’est pas aussi forte qu’espéré pour l’horlogerie, l’Inde ressort comme un grand marché à conquérir avec l’essor de sa classe moyenne et l’envolée du nombre de millionnaires.
Le pays le plus peuplé au monde n’était que le vingt-troisième marché d’exportation des horlogers suisses en 2022. D’après la fédération horlogère, la valeur des exportations de montres suisses s’y limitait à 188 millions de francs suisses (196 millions d’euros à taux actuels), loin derrière les 3,9 milliards de francs d’exportations vers les Etats-Unis et près de 2,6 milliards de francs vers la Chine. Mais d’ici 2028, les exportations vers l’Inde devraient dépasser 400 millions de francs, selon les estimations de Deloitte. «Et nous pensons que l’Inde arrivera dans le top 10 des marchés d’exportations suisses dans une dizaine d’années», prédit Karine Szegedi, responsable du secteur de la consommation chez Deloitte, citée dans le communiqué.
Dans son étude annuelle sur l’horlogerie, le cabinet d’audit et de conseils, qui a interrogé 75 cadres et dirigeants du secteur, note que les trois quarts s’attendent à une croissance en Inde durant les douze prochains mois alors qu’ils sont beaucoup plus partagés sur la Chine, le deuxième plus grand marché horloger, où la moitié d’entre eux tablent sur une stagnation ou un repli.
Tous les superlatifs
«Avant, les discussions avec les horlogers tournaient principalement autour de la Chine», a expliqué Mme Szegedi lors d’un entretien avec l’AFP. Mais la reprise depuis la fin de la politique zéro-Covid est moins forte qu’attendu et les discussions portent sur un plus grand nombre de pays, note-t-elle. «Quand on parle aux horlogers, ils nous disent que l’Inde est le pays de tous les superlatifs et de toutes les possibilités».
L’Inde est toutefois un marché difficile à pénétrer, notamment en raison des barrières douanières, prévient Jean-Daniel Pasche, le président de la fédération horlogère. «Les principaux obstacles sont la bureaucratie et la hauteur des taxes», indique-t-il à l’AFP, ce qui freine l’essor des horlogers suisses. Il espère que les négociations menées par l’association européenne de libre-échange permettront de lever ces barrières à l’entrée de ce «marché immense et prometteur».
Vers 1 million de millionnaires
Selon le Fonds monétaire international, le revenu par habitant devrait augmenter de plus de 40% d’ici 2028 pour atteindre 3720 dollars. Malgré d’importantes disparités de revenus, la classe moyenne grandissante et les grosses fortunes représentent une large base de consommateurs potentiels. D’après la banque UBS, l’Inde comptait 849’000 millionnaires en 2022 et ce chiffre devrait grimper à 1,4 million d’ici 2027.
De plus, l’Inde a une longue culture des bijoux, dont la montre est la version masculine, Mme Szegedi voyant un potentiel dans les achats pour les mariages, «de plus en plus fastueux». Selon une estimation du cabinet Euromonitor International, le marché du luxe en Inde (champagnes, spiritueux, voitures de luxe...), pesait près de 6,6 milliards de dollars en 2022 et pourrait grimper à 10,9 milliards de dollars d’ici 2030. Sur les huit premiers mois de 2023, les exportations de montres vers l’Inde ont augmenté de 18,5%, contre 9,2% sur l’ensemble des 30 plus grands marchés pour les horlogers suisses.