Haute-Savoie (F)Condamné, un propriétaire de coqs défend leur droit de chanter
Les chants du coq sont-ils un «inconvénient normal» de la campagne? C’est ce qu’a argué, mardi, l’avocate d’un agriculteur français condamné pour «troubles du voisinage».
Un fils d’agriculteurs, dont la famille habite depuis plusieurs générations au hameau de La Gruy, sur la commune de Saint-Sylvestre (Haute-Savoie), a été condamné, en juillet 2019, par le Tribunal d’instance d’Annecy, pour «troubles anormaux du voisinage» au détriment d’un couple, gêné par les chants émanant de son poulailler. Il a fait appel contre ce jugement.
«La question se pose de l’inconvénient normal. Nous sommes dans une commune rurale. C’est une tradition», a plaidé son avocate, affirmant, témoignages et factures d’achats d’animaux à l’appui, que la basse-cour existait déjà de longue date lorsque les voisins s’étaient installés dans la maison voisine, dans les années 1990. «Ils ne sont pas pris en défaut, ils savent très bien dans quel environnement ils sont venus s’installer, à l’époque!»
Même à 142 décibels, le coq fait partie du patrimoine
Elle rappelle en outre que le Parlement a adopté, en janvier dernier, un texte protégeant le «patrimoine sensoriel des campagnes» et que le chant du coq en fait partie, tout comme le coassement des grenouilles ou les effluves de crottin de cheval ou d’étable. La loi, qui ne pourra pas s’appliquer en raison de sa non-rétroactivité, atteste que «les sons et les odeurs sont consubstantiels à la vie à la campagne», souligne-t-elle.
Pour l’avocate de la partie adverse, le problème est surtout que «le poulailler chante toute la nuit», impactant gravement le sommeil des voisins. Des études ont même montré qu’un chant du coq peut atteindre «142 décibels, grâce à la position de son cou», fait-elle valoir. Au final, la procédure en appel est «dilatoire et abusive», argue-t-elle.
Agriculteur «optimiste»
L’agriculteur lui-même admet qu’il est «stupide d’en arriver là», mais se déclare «optimiste» quant à l’issue de la procédure. Il possède actuellement trois coqs. «C’est vrai qu’à partir de 5h du matin, ça chante», mais «si vous venez à 2h du matin, ça ne chante pas».
En 2019, il avait été condamné à 3000 euros (3250 francs) de dommages et intérêts, avec l’obligation de faire cesser les «nuisances sonores excessives». Le jugement en appel a été mis en délibéré au 25 novembre.