AstronomieGenève contribue à montrer notre galaxie en trois dimensions
Le troisième catalogue de données du satellite Gaia est sorti, avec des informations sur plus de 2 milliards d’astres et auquel l’Université de Genève a participé.

Les étoiles sont en mouvement constant. Pour l’œil humain, ce mouvement (appelé mouvement propre) est imperceptible, mais Gaia le mesure avec de plus en plus de précision. Les traces sur cette image montrent comment 40 000 étoiles, toutes situées à moins de 100 parsecs (326 années-lumière) du système solaire, se déplaceront dans le ciel au cours des 400 000 prochaines années.
© ESA/Gaia/DPAC, CC BY-SA 3.0 IGOCartographier en trois dimensions notre galaxie, la Voie lactée, avec une précision encore inégalée, c’est l’objectif de la mission Gaia lancée en 2013 par l’Agence spatiale européenne (ESA), à laquelle participent une cinquantaine d’institutions et centres de recherche, dont l’Université de Genève.
Positionné à 1,5 million de kilomètres de la Terre, dans la direction opposée à celle du Soleil (point de Lagrange L2), le satellite Gaia collecte de précieuses données sur les étoiles grâce à son télescope à deux champs de vision et à sa caméra d’un milliard de pixels. Celles-ci sont traitées par près de 500 chercheurs et chercheuses, principalement basés en Europe.
1% des étoiles de notre galaxie recensées
«La mission Gaia est sans équivalent, explique Marc Audard, maître d’enseignement et de recherche au sein du Département d’astronomie de la Faculté des sciences de l’UNIGE. Près de 2 milliards de sources ont été recensées (soit environ 1% du nombre total d’étoiles de notre galaxie) et chacune d’entre elles a été observée en moyenne 50 fois. C’est un vrai projet Big Data».
Le satellite Gaia recense et observe en continu des étoiles se situant parfois à plusieurs dizaines de milliers d’années-lumière, mais aussi des astéroïdes, des étoiles ayant des planètes extrasolaires et des galaxies lointaines. Son lancement a multiplié par 10’000 le nombre d’objets observés et par un facteur 100 la précision des données.
Après la publication de deux catalogues, en 2016 et 2018, la mission Gaia dévoile aujourd’hui une nouvelle moisson Gaia Data Release 3 (DR3) qui pousse encore plus loin les limites de nos connaissances. «Chaque nouvelle publication de données Gaia permet une croissance exponentielle des sources et du type de données recensées. Ici, non seulement les positions, les distances et les mouvements des étoiles sont beaucoup plus détaillés, mais nous publions près de dix millions de sources dont l’intensité lumineuse est variable, classifiées et étudiées en détail. De plus, nous avons pu le faire pour près de 30 types de sources variables (telles des étoiles binaires à éclipses ou des étoiles pulsantes, par exemple) contre seulement 6 pour le DR2», explique Laurent Eyer, maître d’enseignement et de recherche au sein du Département d’astronomie de la Faculté des sciences de l’UNIGE et coordinateur de l’unité sur la variabilité du consortium.
L’UNIGE mesure les changements de lumière des étoiles
Sur son site d’Ecogia, à Versoix, l’Université de Genève a notamment mesuré la variabilité de la lumière émise par les étoiles. Un élément particulièrement utile pour déterminer leurs caractéristiques (leur masse et leur rayon par exemple) mais aussi pour calculer les distances dans l’Univers. «Notre travail, à l’UNIGE, est de digérer et préparer ces données, très complexes à manier en l’état, pour que la communauté scientifique puisse les utiliser», indique Laurent Eyer. Pour traiter cette masse colossale d’informations (2 milliards de sources et près de 400 milliards de mesures photométriques) l’équipe de l’UNIGE a eu recours à l’intelligence artificielle, et plus précisément au «machine learning» («apprentissage automatique»).
«Nous faisons de la science dans une optique de service à la communauté, poursuit Marc Audard. Chaque Gaia Data Release a un impact très important en astronomie et engendre la publication de nombreux articles scientifiques. Certains centres de recherche anticipent même le développement d’algorithmes en vue de traiter les données qui figurent dans le catalogue.» Ces données sont dès à présent à la disposition de la communauté scientifique mais également du grand public.
Beaucoup d’articles de l’UNIGE
Le consortium annonce d’ores et déjà la publication de près de 50 articles scientifiques basés sur le DR3, la plupart signés comme premier auteur ou coauteur par l’équipe de l’UNIGE, dont 17 proviennent de l’analyse de la variabilité. La parution du catalogue précédent avait généré au total 6000 articles. Les papiers traitant spécifiquement des données Gaia figurent régulièrement parmi les plus cités dans le domaine de l’astronomie. Pour l’équipe de l’UNIGE, le défi sera d’augmenter encore la quantité d’informations traitées à Genève. Elle espère atteindre les 100 millions de sources variables d’ici quelques années.