Policiers français«Qu’on nous dise pas: on vous comprend mais vous n’aurez rien»
Gérald Darmanin recevra les syndicats français de policiers, jeudi, dans la soirée, dans un contexte de protestation chez ces fonctionnaires après l’incarcération d’un de leurs collègues accusé de violences.
Depuis près d’une semaine, des policiers de Marseille, dans le sud-est de la France, sont entrés dans une phase de protestation, se mettant en arrêt maladie pour certains ou en n’assurant plus que le service minimum pour d’autres. Le mouvement est difficilement quantifiable mais les organisations syndicales assurent qu’il prend de l’ampleur partout en France.
Policier incarcéré à Marseille
La contestation est née après l’inculpation de quatre policiers pour violences en réunion par personne dépositaire de l’autorité publique, et l’incarcération de l’un d’entre eux. Ils sont accusés d’avoir roué de coups un homme de 21 ans dans le centre de Marseille, dans la nuit du 1er au 2 juillet, alors que la cité phocéenne, comme de nombreuses villes de France, était en proie à de violentes émeutes, après la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué par un policier à Nanterre, en région parisienne, lors d’un contrôle routier.
Hospitalisé, le jeune homme, Hedi, avait affirmé avoir été frappé par un groupe de quatre à cinq personnes, après avoir reçu un tir de LBD (balle de défense) dans la tempe. «Il a été tiré comme un lapin puis roué de coups», avait dénoncé auprès de l’AFP, son avocat, Me Jacques-Antoine Preziosi. Dans un entretien avec le média en ligne Konbini mis en ligne mercredi, il apparaît avec «une partie du crâne en moins», raconte devoir marcher avec un casque et ne pas voir de l’œil gauche.
Un statut spécifique
Après une visite à ses troupes samedi, le patron de la police nationale (DGPN), Frédéric Veaux, avait estimé qu’«avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison, même s'il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans le cadre de son travail». Ces déclarations, issues d’un entretien publié dimanche, par le quotidien «Le Parisien», et qui avait reçu l’aval du cabinet du ministre, ont déclenché un tollé d’indignation chez les magistrats et dans la classe politique rappelant, à l’instar du Syndicat de la magistrature, que «la loi est la même pour tous».
Favorable à la mesure, le syndicat Unité SGP Police demande notamment la création d’un statut spécifique du policier inculpé, excluant la détention provisoire d’un agent agissant en mission. «Avoir une justice d’exception à l’endroit des policiers, ça n’est pas entendable, ça n’est pas acceptable», «ce serait grave dans une République, dans une démocratie», a balayé de son côté le syndicaliste de CGT-Intérieur-Police, Anthony Caillé.
«Nul n’est au-dessus de la loi»
Le ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, resté silencieux depuis ces propos polémiques, recevra les organisations, jeudi, à partir de 20h (18h GMT), dès son retour en métropole, après une visite en Nouvelle-Calédonie. «On attend que ce (jeudi) soir, ce ne soit pas un discours stérile et qu’on nous dise pas: on vous comprend mais vous n’aurez rien», avertit Linda Kebbab, secrétaire nationale du syndicat Unité SGP Police.
Interrogé lundi depuis Nouméa, en Nouvelle-Calédonie, le président français Emmanuel Macron a dit, lui, comprendre «l’émotion» des policiers, tout en rappelant que «nul en République n’était au-dessus de la loi».