ProcèsLa plaignante refuse une conciliation avec Alain Soral
Jugé à Lausanne pour des propos homophobes contre une journaliste romande, l’essayiste a tenté de trouver un accord, mais la victime préfère s’en remettre à la justice.
Une tentative de conciliation entre l’essayiste franco-suisse d’extrême droite Alain Soral et une journaliste l’accusant d’avoir eu à son encontre des propos homophobes a échoué mercredi devant le Tribunal de police de Lausanne, la plaignante souhaitant aller «jusqu’au bout».
De son vrai nom Alain Bonnet, Alain Soral, qui réside à Lausanne depuis octobre 2019, avait été condamné en avril à trois mois de prison ferme par ordonnance pénale par le procureur général du canton de Vaud Eric Cottier pour «diffamation, discrimination et incitation à la haine».
Pluie d’insultes
Cette condamnation faisait suite à la diffusion d’une vidéo où Alain Soral attaquait la journaliste Cathy Macherel, de «La Tribune de Genève» et «24 heures», qui lui avait consacré un article en août 2021. Dans cette vidéo diffusée sur le site internet de son association Égalité et Réconciliation, Alain Soral l’avait traitée de «grosse lesbienne militante» et de «queer», un terme qu’il entend comme synonyme de «désaxé».
Ayant fait opposition à la décision du procureur, l’essayiste, 64 ans, est passé mercredi devant un juge du Tribunal de police de Lausanne. Lors de cette audience publique, Alain Soral a affirmé n’avoir «pas de haine anti-homosexuelle» et a qualifié sa vidéo de «droit de réponse».
Sans véritablement formuler d’excuses, il s’est dit «désolé» d’avoir fait de la peine à Mme Macherel et a expliqué que le ton de sa vidéo s’expliquait notamment par le fait qu’il était au moment des faits «fragilisé psychologiquement» en raison de problèmes de santé. Il a reconnu le ton «trop virulent» de cette vidéo et s’est dit prêt à la retirer ainsi que les commentaires des internautes, suggérant une conciliation.
«Le mal est fait»
La présidente du tribunal, Malika Turki, a saisi au vol cette offre, mais la journaliste a dit vouloir «aller jusqu’au bout». «Pour moi le mal est fait. C’est à la justice de trancher sur cette affaire», a-t-elle dit.
Pendant l’audience, Alain Soral, dont la défense a plaidé l’acquittement, a affirmé faire l’objet «d’une campagne de dénigrement, de harcèlement, notamment de la part de la «Tribune de Genève» et de la communauté LGBT» depuis son arrivée à Lausanne et a accusé Mme Macherel, qui a co-fondé il y a plusieurs années le magazine «LGBT + 360°» d’agir en tant que «militante».
En avril, le procureur général avait estimé que «les propos tenus par le prévenu» à l’encontre de Mme Macherel «sont profondément homophobes et incitent à la discrimination en raison de l’orientation sexuelle de la plaignante et, plus généralement, des personnes homosexuelles». Le verdict est attendu vendredi.
«Sans l’autre, nous ne serions rien»
«La liberté d’expression est tout ce qui ne porte pas atteinte aux autres», a rappelé vendredi le procureur général, qui a maintenu les conclusions de son ordonnance pénale. Il a fait référence à la pénalisation récente de l’homophobie en Suisse. «La paix ne se conçoit que dans la tolérance et dans le respect de l’autre. Il est temps que M. Soral et ses apôtres comprennent que sans l’autre nous ne serions rien», a renchéri l’avocat de la journaliste, Étienne Campiche.
L’avocat de la défense, Pascal Junod, a estimé que l’«on donne trop d’importance à cette affaire qui prend des allures de procès d’inquisition», affirmant que «queer» et «lesbienne» n’étaient pas des injures. Alain Soral, qui a aussi été condamné dans cette affaire en avril à payer 1500 francs d’amende et 1950 francs de frais de procédure, a déjà été condamné à une vingtaine de reprises en France, en grande partie pour des infractions de provocation à la haine, diffamation et injure publique.