DiplomatieRiyad se rapproche de Pékin, sans tourner le dos à Washington
La visite du président chinois Xi Jinping en Arabie saoudite a consacré le rapprochement des deux pays et représenté un exercice d’équilibre pour Riyad, entre Pékin et Washington, son allié traditionnel.
Le président chinois, Xi Jinping, a plaidé pour des liens étroits, sécuritaires et énergétiques, lors de sommets en Arabie saoudite avec les monarchies arabes du Golfe, une région riche en hydrocarbures longtemps perçue comme le pré carré des États-Unis. Il a également signé, avec les dirigeants saoudiens, une quarantaine d’accords dans différents domaines, allant de l’hydrogène au logement.
Mais l’absence apparente de percées sur des dossiers sensibles, comme la défense et les télécommunications, devrait calmer le jeu auprès des États-Unis, qui n’avaient pas manqué de mettre en garde contre «certains partenariats» éventuels, susceptibles d’endommager les relations américano-saoudiennes.
Depuis des décennies, l’Arabie saoudite et les États-Unis sont liés par un partenariat dit «pétrole contre sécurité». Riyad garantit une offre abondante de pétrole, tandis que Washington promet son appui militaire au travers de ventes d’armes massives, entre autres. Toutefois, ces relations historiques se sont tendues, notamment, sur la question des violations des droits humains et du pétrole.
Influence «croissante»
Les Américains, exaspérés par une récente baisse de la production de pétrole de l’Opep+, ont annoncé revoir leur relation avec l’Arabie saoudite. L’Opep+ comprend les 13 membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), menés par l’Arabie saoudite, et leurs dix partenaires, conduits par la Russie.
Mercredi, en pleine visite de Xi Jinping à Riyad, la Maison-Blanche s’est aussi dite «consciente de l’influence» croissante de la Chine au Moyen-Orient, non propice, selon elle, à la préservation «de l’ordre international». Mais Washington a précisé qu’il ne demandait «à aucun pays de choisir entre les États-Unis et la Chine».
Riyad a fait savoir qu’il n’en avait aucune intention: «Nous continuerons de travailler avec tous nos partenaires. Nous ne croyons pas à la polarisation», a dit, vendredi, le chef de la diplomatie saoudienne, Fayçal ben Farhan. «La concurrence est une bonne chose», a-t-il ajouté, tout en assurant que son pays continuerait à entretenir des relations solides avec les États-Unis, «dans tous les domaines».
Échanges axés sur l’énergie
Avec la Chine, le partenariat est plus récent. L’Arabie saoudite fut le dernier pays arabe à établir des relations diplomatiques avec le pays asiatique, au début des années 1990, et les relations bilatérales n’ont pris leur essor qu’au cours des vingt dernières années, très axées sur les échanges dans le domaine de l’énergie. La Chine est le premier importateur de pétrole brut au monde et l’Arabie saoudite en est le premier exportateur au monde. Le pétrole d’Arabie saoudite représentait à lui seul 17% des importations chinoises en 2021.
Désormais, Riyad s’engage «avec beaucoup de prudence» dans des domaines qui préoccupent davantage Washington, notamment la défense, les télécommunications et l’énergie nucléaire, pointe Naser al-Tamimi, expert des relations Golfe-Chine à l’Institut italien d’études politiques internationales.
«Explorer de nouveaux champs»
Lors du sommet Chine - Conseil de coopération du Golfe, vendredi, Xi Jinping a ainsi souhaité «explorer» avec les pays arabes «de nouveaux champs d’action comme l’aéronautique, le spatial, l’économie numérique et l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire». Le géant asiatique cherche notamment à relancer et élargir sa sphère d’influence, notamment à travers son initiative de «nouvelles routes de la soie», un vaste projet international d’investissements.
Les pays du Golfe, quant à eux, ont pour objectif de diversifier leurs relations stratégiques et de réduire la dépendance de leurs économies aux hydrocarbures.