Affaire Griveaux«J’annonce la règle du silence», déclare Piotr Pavlenski devant la cour
Jugé avec Alexandra de Taddeo pour avoir diffusé des vidéos intimes de Benjamin Griveaux, l’artiste russe Piotr Pavlenski a refusé de répondre au tribunal après un discours chaotique.
Jugé pour avoir diffusé les vidéos intimes qui ont entraîné la chute du ténor de la majorité Benjamin Griveaux, l’artiste russe Piotr Pavlenski a fait valoir mercredi son droit au silence face au tribunal, sa compagne et coprévenue Alexandra de Taddeo défendant la «liberté artistique».
«Liberté artistique»
L’artiste russe de 39 ans et l’étudiante française de 32 ans comparaissent pour avoir enregistré et publié, sans le consentement de l’ancien ministre, des vidéos à caractère sexuel qui ont entraîné sa démission de la campagne municipale et provoqué un scandale politique en février 2020.
Le couple, retenu dans les embouteillages selon ses avocats, est arrivé vers 10h30 au tribunal correctionnel de Paris, une heure après l’heure prévue. «L’art contemporain détruit les zones de confort», a notamment déclaré Piotr Pavlenski, ajoutant que la «liberté artistique» devait être «la plus grande valeur», avant de rentrer dans la salle d’audience remplie de journalistes et de public.
«La règle du silence»
La présidente, qui avait débuté l’audience sans eux, a appelé à la barre l’artiste, tout de noir vêtu, et Alexandra de Taddeo, en longue robe bleue à sequins, tenant à la main le livre qu’elle vient de publier. Alors que la magistrate commençait à décliner leur identité, l’artiste russe a lancé d’une voix forte: «Aujourd’hui aura lieu le jugement de mon huitième événement d’art sujet-objet, l’événement pornopolitique, je serai jugé pour mélanger le style élevé et bas...»
Pendant qu’il continuait, la présidente a tenté de l’interrompre à plusieurs reprises avant de suspendre l’audience, alors que des applaudissements retentissaient. Quelques minutes plus tard, le tribunal a fait revenir à la barre Mme de Taddeo pour lui énoncer ses droits, mais Piotr Pavlenski a refusé de se lever, lançant: «J’annonce la règle du silence, vous ne vouliez pas m’écouter quand je voulais venir parler». «C’est votre choix, la seule chose c’est que les débats doivent se dérouler dans la plus grande sérénité», a répondu la présidente.
«Pas voulu piéger»
Le tribunal a résumé le dossier avant de visionner, à huis clos, des extraits des vidéos de masturbation envoyées par l’homme politique à Alexandra de Taddeo lors de leur brève relation entre mai et août 2018.
Alexandra de Taddeo, aujourd’hui étudiante en histoire de l’art, a quant à elle accepté de s’exprimer. Dans une déclaration liminaire, elle a estimé que, depuis «40 mois», sa parole avait été «manipulée, ridiculisée, ignorée par cette machine à broyer qu’on appelle institution judiciaire et son pendant médiatique». L’étudiante a déclaré avoir «tout exprimé» dans son «roman autobiographique» intitulé «L’amour», ajoutant qu’elle n’avait «à aucun moment voulu piéger» Benjamin Griveaux.
«Une évolution»
Si elle a conservé certaines vidéos envoyées par l’ex-porte parole du gouvernement, c’était «pour (se) protéger» car il s’agissait d’une relation «particulièrement déséquilibrée», a-t-elle fait valoir. Les juges d’instruction ont conclu à son «implication directe» dans la publication des vidéos, mais Alexandra de Taddeo a maintenu que Piotr Pavlenski l’avait fait à son insu.
Lors de la «révélation», «ma première réaction a été de paniquer», venant d’un milieu «plutôt conservateur, machiste et assez fermé à l’art», a-t-elle assuré, affirmant avoir dû faire un «choix du coeur». Aujourd’hui, «je le vois comme une évolution dans toute la séquence artistique des évènements de Piotr», a-t-elle expliqué.