Formule 1Vers la fin d’Aston Martin?
Reprise en 2018 par le Canadien Laurence Stroll, la célèbre marque et l’écurie de F1 du même nom risquent la disparition prochaine au tribunal de Londres.
- par
- Luc Domenjoz Silverstone
En bourse, la tempête fait rage actuellement pour l’action Aston Martin Lagonda (et pas seulement celle-là, d’ailleurs). Alors qu’elle valait encore 22 livres sterling en février 2021, l’action AML est tombée à moins de 4 livres la semaine dernière. Rien ne va plus au sein de la marque légendaire. Son patron, Laurence Stroll, l’a acquise en 2018 avec un consortium de proches qui ont tellement perdu d’argent qu’ils ne lui adressent plus la parole.
Mais ce n’est pas tout: pour développer la super-car Valkyrie, Aston Martin n’avait pas les moyens de financer son développement très complexe. La marque, en 2016, s’était donc associée avec la société suisse Nebula Project SA, basée à Teufen, dans le canton d’Appenzell. Cette dernière a avancé 100 millions de dollars pour développer la Valkyrie, en échange d’une commission de 4% sur la vente de toutes les Aston Martin (la 4x4 DBX exceptée).
Contrat dénoncé
Lorsque le nouveau patron, Laurence Stroll, s’est rendu compte de cet accord dont il n’avait pas conscience au moment de l’achat de la marque, il a dénoncé le contrat avec Nebula et a fait fermer la concession Aston Martin de St-Gall, détenue par Nebula, par qui passait 80% des Aston Martin vendues en Suisse - un très gros marché pour la marque britannique.
Toute l’affaire part désormais en procès à Londres, Nebula Project demandant 190 millions de dollars à Aston Martin pour rupture abusive de contrat au sujet de la Valkyrie et 50 millions de plus pour la fermeture de sa concession. Une affaire qui pourrait signifier la fin pour une marque que plus personne ne veut aider à soutenir financièrement.
Usine louée
En attendant, tout va encore plus mal sur les circuits pour les deux Aston Martin, conduites par Sebastian Vettel et Lance Stroll – tous deux éliminés dès les premières minutes des qualifications du Grand Prix d’Angleterre, samedi.
À Silverstone, la rumeur veut que Sebastian Vettel en ait assez et qu’il ait décidé de prendre sa retraite à la fin de la saison. Il pourrait être remplacé par Mick Schumacher. Laurence Stroll, le propriétaire de l’équipe et papa de Lance, aimerait bien avoir un «Schumacher» dans son écurie, certain qu’il est que son fils le battrait à la régulière. Ce qui ferait la fierté du père!
En attendant, la nouvelle usine de 40’000 mètres carrés que l’écurie est en train de construire à côté de son bâtiment actuel, juste à l’entrée du circuit de Silverstone, n’a pas pu être financée par l’émission d’obligations comme Laurence Stroll l’aurait souhaité. Il a dû se résoudre à vendre le terrain à une société tierce, qui construit l’usine et la louera à l’écurie pour le montant déjà décidé de 16 millions de dollars par an. Pour autant bien sûr que la marque Aston Martin n’ait pas disparu d’ici là.
Sainz, Leclerc et la stratégie
Au terme d’une séance qualificative à rebondissements, Carlos Sainz a signé la première pole-position de sa carrière en F1 – après 150 tentatives. L’intéressé était tout surpris: «Quand j’étais plus jeune, dans les autres formules de course, j’adorais la pluie, lâchait-il après les qualifications. Sur le mouillé, je me qualifiais facilement une demi-seconde devant tous les autres. Mais en F1, ce sont tous des surdoués, et plus personne n’a un tel avantage sous la pluie. Alors je suis surpris d’être devant, parce que mon tour n’était pas spécialement génial, vol était bon, sans plus. »
Charles Leclerc, sur l’autre Ferrari, partira troisième. Il espère que l’écurie demandera à Carlos Sainz de le laisser passer au cas où tous deux se retrouveraient en tête de la course - ce qui n’est pas dans son contrat. D’autant qu’il y a Max Verstappen entre eux sur la grille. Le Néerlandais, lui, a dû ralentir en raison de drapeaux jaunes pendant son dernier tour, tandis que Lewis Hamilton rechargeait sa batterie au moment où la piste était la plus rapide.
À la fin des qualifications, le pilote Red Bull a été hué par la foule. Il a dit qu’il se moquait de cette attitude, qui a été condamnée par le pilote Mercedes. «Nous (les Britanniques) valons mieux que ça», a déploré Lewis Hamilton.
Le contrôle des coûts en question
Cette année, le budget des écuries de F1 est plafonné à 141.2 millions par an (soit 140 millions + 1.2 pour compenser l’inflation). De leur propre aveu, il sera dépassé par quatre écuries au moins, avec amendes à la clé.
En théorie, ce budget devrait encore être réduit de 5 millions l’an prochain. Mais peut-être pas: la semaine prochaine, dans le cadre du Grand Prix d’Autriche, une réunion regroupant les patrons d’écurie, Liberty Media (qui détient les droits commerciaux de la F1) et la Fédération Internationale de l’Automobile (la FIA) discutera d’une autre version du budget plafonné: un budget incluant tout, soit les dirigeants des écuries, les pilotes et le moteur. Ce budget pourrait être fixé à 350 millions par an, ce qui semble plus facile à vérifier que la solution actuelle.
Aujourd’hui, en effet, les pilotes, les patrons et les moteurs ne sont pas compris dans le budget plafonné, ce qui ouvre la porte à plusieurs tricheries, double comptabilité et autres déplacements de factures ici ou là. À suivre.