SidérurgieLe propriétaire d’Ascoval renonce à transférer l’activité en Allemagne
Le site Ascoval de Saint-Saulve dans le nord de la France avait été racheté cet été par le groupe de sidérurgie allemand Saarstahl.
Le propriétaire allemand de l’emblématique usine Ascoval de Sainte-Saulve (Nord) a renoncé à transférer une partie de son activité en Allemagne, a annoncé jeudi soir Bercy après s’être mobilisé pour éviter un revers à cinq mois de l’élection présidentielle.
À l’issue d’une réunion jeudi soir au ministère de l’Économie avec Saarstahl, faisant suite à plusieurs autres rencontres, «Saarstahl a indiqué son accord pour renoncer à son projet de transfert d’activité d’Ascoval vers son site allemand», a indiqué à l’AFP le cabinet de la ministre déléguée chargée de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher. Cette annonce semble refermer une séquence de deux jours dans laquelle s’est engouffrée l’opposition.
Un dossier brûlant à moins de 5 mois de la présidentielle
Mercredi, les représentants des syndicats CGT et CFDT du site racheté il y a quatre mois par Saarstahl, groupe sidérurgique allemand, avaient affirmé que l’aciérie pourrait voir 40% de sa production temporairement transférée en Allemagne. En cause: la hausse des prix de l’électricité qui alimente le site à la pointe en matière environnementale. Saarstahl n’avait pas confirmé, affirmant n’avoir pris «aucune décision», mais reconnu qu’il étudiait des «options temporaires» pour «limiter les effets négatifs» de cette hausse, quand ses hauts fourneaux en Allemagne tournent au charbon, bien moins cher.
Le gouvernement avait rapidement réagi, après plusieurs années de mobilisation pour sauver le site et encore un récent prêt de 20 millions d’euros en début d’année pour payer les salaires. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire avait affirmé jeudi matin qu’il n’était «pas question» que l’aciérie voie son activité délocalisée «définitivement» en Allemagne.
Rappelant qu’il s’était «battu avec beaucoup d’énergie» pour sauver cette usine employant 270 salariés et produisant des barres d’acier dédiées à la fabrication de rails, notamment pour la SNCF, et lui trouver un repreneur, il avait assuré que le gouvernement n’avait pas l’intention de «la laisser tomber». «Nous travaillons à des solutions», avait-il ajouté.
À en croire Bercy, le branle-bas de combat a même débuté il y a «plusieurs semaines» pour alléger les coûts des entreprises touchées par la hausse des prix de l’énergie, avec notamment l’annonce début novembre d’une aide aux entreprises les plus consommatrices d’électricité, dont Ascoval.
Une délocalisation «scandaleuse»
Les réactions politiques n’avaient pas tardé, en pleine pré-campagne électorale, alors que le gouvernement a fait de la réindustrialisation et de la décarbonation de l’industrie un de ses objectifs prioritaires. Dès mercredi, le député du Nord et candidat communiste à la présidentielle Fabien Roussel avait écrit à Bruno Le Maire pour lui demander «d’intervenir sans délai».
Les candidats à l’investiture des Républicains Valérie Pécresse et Xavier Bertrand étaient eux aussi montés au créneau, la première fustigeant une délocalisation «scandaleuse et ubuesque, surtout quelques jours après la COP26 de Glasgow». Cette menace tombait en effet mal pour l’exécutif qui affiche l’ambition de faire de la France une terre de production industrielle et décarbonée, grâce à une électricité nucléaire faiblement émettrice en CO2.
«Il faut que le gouvernement accède à la demande d’Ascoval sur le tarif de l’électricité», avait réclamé jeudi Xavier Bertrand, l’actuel président de la région des Hauts-de-France, en marge d’une séance du conseil régional. «Quand on veut, on peut. Le président de la République vient demain dans la région? Eh bien, il faut que lui-même apporte la réponse très clairement», avait ajouté Xavier Bertrand, alors qu’Emmanuel Macron se rend dans le Nord et l’Aisne vendredi pour un déplacement sur le thème du développement des territoires.
Le sujet est sensible, tant le sort d’Ascoval a mobilisé ces dernières années le gouvernement et Emmanuel Macron, à la fois comme ministre de l’Économie sous François Hollande, puis depuis son arrivée à l’Élysée.
Lors du rachat par le groupe sidérurgique allemand, validé en août dernier, Bruno Le Maire avait salué «une très bonne nouvelle pour l’avenir de la filière sidérurgique française et pour les salariés».