Série TV: Netflix fait «Tapie» et remporte la partie

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Série TVNetflix fait «Tapie» et remporte la partie

La vie romanesque et romancée de Bernard Tapie, incarné par Laurent Lafitte, est racontée en sept épisodes fascinants à voir dès mercredi 13 septembre.

Laurent Flückiger
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Laurent Flückiger

Bernard Tapie ne voulait pas de cette série. Mais voilà, ce n’était pas à lui de décider. Alors, le réalisateur Tristan Séguéla et le romancier et scénariste Olivier Demangel s’y sont attelés. Pour la plate-forme Netflix, avec Laurent Lafitte dans le rôle principal. Mise en ligne mercredi 13 septembre, presque deux ans après la mort de l’homme d’affaires français, malgré les réserves de sa veuve, Dominique. Voici «Tapie», sept épisodes qui retracent le destin d’un personnage hors du commun qui a tout connu ou presque.

Mais attention: tout y est vrai… «à 50%», a averti le réalisateur. On peut d’ailleurs lire en préambule sur l’écran: «Cette série est librement inspirée de faits réels. On reconnaîtra dans le parcours du héros des faits déjà connus du public. Au-delà, le rôle joué par l’entourage, les situations de vie privée et les dialogues sont fictionnels.»

Les punchlines de «Nanard»

Des dialogues, on retient dans «Tapie» des punchlines que «Nanard» aurait tout à fait pu lancer. Comme «Tapie. Souvenez-vous bien de ce nom parce qu’il y aura un avant et un après», quand pas encore trentenaire il essaie d’obtenir un prêt pour créer un magasin d’électroménager. «Je viens vous vendre la France de demain», affirme-t-il à un potentiel investisseur. «La plus grande révolution médicale de notre époque», décrit-il pour vanter sa société Cœur Assistance.

En ce qui concerne les situations de vie privée, là, c’est étrange. Au début de la série, quand Bernard Tapie est marié à Michèle, il a une fille, Stéphanie. Dans la réalité, le couple a eu deux enfants, Nathalie et Stéphane. Même variation concernant son union avec Dominique, qui lui donne Victor, alors que sont nés Sophie et Laurent. Un remodelage censé amener une meilleure dramaturgie. À moins que ce soit pour calmer la progéniture de l’homme d’affaires, qui ne voulait pas non plus de cette production Netflix.

«La série n’est pas méchante»

Laurent Tapie a été invité à commenter, au micro de RMC, la série qu’il a vue en avant-première. «Je suis mitigé, il y avait mieux à faire, explique-t-il. La série n’est pas méchante. On retrouve les caractéristiques de mon père, sa personnalité. Tristan Séguéla a réuni un groupe d’acteurs exceptionnels, franchement, et c’est ça que je trouve dommage. Il avait les ingrédients, entre l’histoire de mon père et le casting, pour faire un truc exceptionnel. Et ce n’est pas exceptionnel.» Pas si négatif, Laurent Tapie. On est assez loin de l’agacement de sa mère et du coup de gueule de sa sœur, Sophie, au printemps. «L’irrespect n’a pas de limites», avait-elle dénoncé.

La bande-annonce de «Tapie».

Netflix

Revenons sur un point de son commentaire: «un groupe d’acteurs exceptionnels». Ils le sont. Laurent Lafitte, tout d’abord, pensionnaire de la Comédie-Française qui peut aussi bien jouer Candide et Dom Juan sur scène, des rôles dans des thrillers que de partager l’affiche de comédies. Dans «Tapie», à 50 ans, avec un physique assez similaire au Wonderman, l’acteur est très bon pour incarner le baratineur (le bonimenteur même), le charmeur, l’homme sûr de lui, qui veut à tout prix être millionnaire. On y croit un peu moins pour les larmes – peut-être parce qu’on n’imagine pas «Nanard» comme ça.

On aime aussi la prestation de Joséphine Japy, 29 ans, en Dominique, lumineuse quand il la voit pour la première fois alors qu’il est marié depuis dix ans. Son personnage est bien plus doué en affaires dans la fiction que Dominique ne l’était en réalité. Une entorse à la réalité qui lui donne plus de corps.

Le Nanard sympathique

Enfin, l’histoire de Bernard Tapie. Effectivement, Séguéla et Demangel avaient tout entre les mains: de l’ambition, du drame, des mensonges, des échecs, du strass, de l’amour. «Tapie» n’a pas de temps mort et raconte tant de choses en sept épisodes qui portent presque tous le nom d’une chanson – interprète de «Passeport pour le soleil», sous le pseudonyme Bernard Tapy, était son premier fait d’armes.

Il y a un côté caricatural, certes, dans les punchlines, la naïveté et parfois la réussite, mais qu’on pardonne tant Nanard paraît sympathique. Les Américains sont parvenus à raconter tant d’histoires de destins exceptionnels en y mettant parfois du kitsch et souvent pas mal de fantaisie. Cette fois, les Français savourent leur moment. Ce «Class Act» («Tapie» en version internationale) peut même viser quelques millions hors de l’Hexagone. Et ça, Bernard Tapie l’aurait probablement voulu.

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