Covid-19Vaccins: les 33 millions de doses qui fâchent à Berne
Alain Berset défend sa stratégie de commande d’achats de vaccins en 2022 à large échelle, pour parer à toutes les éventualités et éviter de nouvelles mesures qui toucheraient la vie sociale.
- par
- Eric Felley
Pour la seule année 2022, le Conseil fédéral a décidé d’acquérir 33 millions de doses de vaccins. Alors que la vaccination est au point mort, depuis la levée des dernières mesures le 1er avril dernier, alors que des vaccins périmés doivent être jetés et que d’autres peinent à trouver preneur à l’étranger dans le programme Covax, le chef du Groupe du Centre, Philipp Matthias Bregy (C/VS) s’étonne: «Acheter 33 millions de doses n’est-il pas un peu exagéré, alors que la Suisse ne compte même pas 9 millions d’habitants?», demande-t-il à Alain Berset.
Le chef de la Santé lui a fait savoir mardi que 15,7 millions de doses de vaccin ont déjà été utilisées en Suisse, depuis le début de la pandémie: «La stratégie d’approvisionnement du Conseil fédéral vise à assurer à tout moment l’approvisionnement de la population suisse en vaccins Covid-19 les plus récents et les plus efficaces». Il confirme qu’en 2022, 33 millions de doses seront «disponibles», dont 4 millions de doses «transférées de 2021 à 2022».
Une «décision consciente»
Il y a donc 29 millions de doses de plus pour cette année: «C’était une décision consciente du Conseil fédéral dans le cadre des crédits d’engagement qui ont été émis, précise Alain Berset. C’était une décision consciente de le faire parce que nous voulons le meilleur, les derniers vaccins. Mais nous ne savons pas lesquels fonctionneront le mieux».
Pour avoir les plus efficaces
Le conseiller national Bregy n’en démord pas que 29 millions de doses, pour la seule année 2022, lui paraît toujours un peu exagéré. Alain Berset ne veut pas polémiquer sur les chiffres: «La Confédération a acheté autant de doses pour trois raisons: premièrement, elle veut s’assurer que la population suisse ait un accès rapide aux vaccins nouvellement développés. Deuxièmement, les risques de défaillance des fabricants individuels doivent être minimisés. Troisièmement, avec les vaccins nouvellement développés, il est impossible de prédire quel fabricant produira le vaccin le plus efficace».
Une enquête ouverte
L’achat de tant de vaccins a fait l’objet d’un vif débat au Parlement. La semaine dernière, le Conseil des États a mis en doute cette politique, en contestant un supplément de 314 millions de francs au budget 2022. Dans la foulée, il semble qu’avant même que le Parlement ait avalisé ces dépenses hors budget, l’Administration fédérale en aurait déjà dépensé une bonne partie. Jeudi dernier, Alain Berset a annoncé rapidement l’ouverture d’une enquête administrative sur l’achat prématuré de ces vaccins.
Supplément revu à la baisse de 80 millions
Ce mercredi, Alain Berset a présenté les premiers résultats de l’enquête annoncée jeudi dernier. Il en résulte que, à deux exceptions près (en 2020 et en 2021) «tous les contrats d’achat de vaccins et les paiements effectués étaient couverts par des crédits». Cependant, l’exercice de vérification mené durant le week-end de la Pentecôte par l’Administration fédérale n’aura pas été inutile: «Cet examen a permis de réévaluer les crédits sollicités pour 2022, qui s’élèvent désormais à 234,3 millions de francs au lieu de 314 millions. Cette différence s’explique, notamment, par des frais de réservation qui ont été comptés deux fois par mégarde, des frais de logistiques moins importants, des quantités de matériel sanitaire moins importantes et l’achat de quantités moins importantes de petits conditionnements de doses de vaccin».
Pour une campagne de rappel à l’automne
Bref, en un week-end, l’Administration fédérale a tout de même réussi à économiser 80 millions de francs. Et, finalement, les 33 millions de doses de vaccins sont toujours à l’ordre du jour pour 2022. «Grâce à cette décision, la population suisse aura, à l’automne, accès aux vaccins les plus récents s’il s’avère nécessaire de procéder à une campagne de rappel», écrit le Département fédéral de l’intérieur.