Ski alpinMarc Rochat: «Je ne suis pas encore là où je dois être»
Le slalomeur vaudois, qui dispute le meilleur début de saison de sa carrière, se réjouit de retrouver des conditions enfin hivernales ce dimanche à Kitzbühel.
- par
- Christian Maillard
À Wengen, ils l’ont tous dit, en français, en allemand ou en anglais: «Les conditions de neige sont extrêmement difficiles, compliquées à skier!» Trop salé, trop mouillé, le revêtement de l’Oberland, comme la majorité des tracés cet hiver, n’a pas convenu aux slalomeurs qui ont dû se battre avec les trous entre les piquets. Comme Tanguy Nef, Clément Noël ou Johannes Strolz, beaucoup de slalomeurs de la Coupe du monde se réjouissent de retrouver des conditions enfin hivernales ce dimanche à Kitzbühel.
«On ne peut pas changer la météo, mais aucun de nous n’a éprouvé de bonnes sensations là-dessus. Essayez de rouler avec votre voiture sur la neige avec des pneus d’été, vous verrez.» Marc Rochat, qui a effectué un travail «monstrueux» cet été pour jouer dans la cour des grands, n’est pas le seul à avoir souffert. Le Vaudois, qui dispute le meilleur début de saison de sa carrière, est prêt à passer encore un cap dans la station autrichienne après sa 7e place à Garmisch, sa 9e à Adelboden et sa 17e à Wengen.
Marc, quelles sont vos ambitions ici à Kitzbühel et mardi à Schladming?
Si j’arrive en bas avec des conditions comme celles à Wengen, c’est de bon augure pour la suite de la saison. On espère simplement que la météo sera de notre côté ce dimanche. Mais je le répète j’ai eu du plaisir malgré tout, sur cette neige artificielle, on est en Coupe du monde et c’est une chance et un plaisir de courir ici.
Vous n’aviez connu que deux tops 10 en sept ans . Et là, deux en 4 jours! Comment l’expliquez-vous?
C’est relativement simple. J’ai eu un très bon été avec un dos qui va mieux et cela fait toute la différence. Le simple fait de se lever tous les matins sans douleur m’a redonné le sourire. Et aussi la capacité de me donner à 100% sur les skis, parce qu’il faut savoir que, quand on souffre d’un mal de dos, c’est comme skier avec un frein à main. On ne peut pas se donner à 100% . Là, je sens que je peux pleinement exploiter mon potentiel et ça me libère.
Il y a eu le dos et d’autres maux ces derniers mois, non?
Pas ces derniers mois, non. Le travail dans la tête s’est fait ces 2 à 3 dernières années, avec de l’expérience en plus. Mais je le répète, ces bons résultats sont le fruit d’une bonne préparation estivale, d’être en bonne santé avec le plaisir d’être là. De courir avec les meilleurs gars de la planète et d’avoir encore la capacité de me battre contre eux, ce n’est que du bonheur.
Maintenant, après vos bonnes performances à Garmisch, Adelboden et Wengen dans des conditions difficiles, qu’attendez-vous de ce slalom de Kitzbühel?
Je pense que, comme Wengen, c’est une piste qui demande beaucoup d’expérience. J’ai longtemps skié dans ma carrière à 100% ou plus, mais je n’avais jamais la philosophie qu’il faut avoir ici au départ. Il faut skier plus intelligemment, être malin sur certaines sections. C’est ce que j’ai appris à faire les deux dernières années.
Après cette bonne période, on imagine que vous visez plus haut: pourquoi pas le podium?
Un podium en Coupe du monde, c’est toujours l’objectif et ça l’a toujours été. Mais je ne veux pas m’affoler, je préfère rester sur mon chemin avec la ligne que j’ai prise depuis début janvier, et les résultats viendront d’eux-mêmes. Je n’essaie pas de vouloir absolument chercher une place sur le podium, j’essaie surtout de prendre du plaisir en produisant mon ski actuel.
Dans votre carrière, vous avez connu des hauts et des bas. Quand on se trouve dans le creux de la vague, comment fait-on pour s’accrocher et remonter?
Excellente question. Je pense avant tout qu’il fut croire en ses propres capacités, garder une ligne directrice et s’y tenir. Ensuite, on se fixe des objectifs qu’on veut atteindre. C’est toujours plus facile de baisser les bras, mais j’estime que si, dans ma carrière, j’ai eu beaucoup de moments difficiles, je me suis toujours accroché à cette philosophie, cette confiance en mes capacités et mon potentiel. Il est clair que j’ai connu des moments compliqués. Je me souviens que des gens me disaient: «ça ne vaut pas la peine, fais autre chose». Mais si au plus profond de soi, on y croit encore, on peut s’y accrocher et c’est ce que j’ai fait. J’estime que je ne suis pas encore là où je dois être, mais dans une bonne ligne. Je vais continuer à croire à une victoire en Coupe du monde.
Dans ces moments de doute, on se tourne vers qui, vers ses coéquipiers, ses entraîneurs, la famille ou les coaches mentaux? Ou alors, qu’est-ce qui vous fait du bien?
La famille avant tout! Ce sont eux, mes parents, mes frères, qui sont les éléments clés et indispensables dans la vie d’un sportif. Ils ont toujours été là en fin de journée pour me remonter le moral. Mais aussi les coéquipiers qui ont grandi avec moi. Hors compétition, on est très soudés, on a créé un lien profond. Après, c’est un sport individuel, du chacun pour soi, au départ nous sommes tous des concurrents.
Un coach mental peut-il être un soutien dans ce genre de moments compliqués?
Certains athlètes ont des coaches mentaux, mais pas tous. Je pense qu’au long d’une carrière, on apprend énormément seul, surtout dans notre sport. Il s’avère que la majorité de ces psychologues avec lesquels j’ai parlé m’ont donné des outils que j’avais déjà appris à utiliser par moi-même. J’ai eu très tôt l’habitude de m’habituer à me débrouiller, à m’occuper de mon matériel, à être ponctuel et performer quand il le fallait. Tous ces éléments font que naturellement un jeune athlète va se développer seul dans sa chambre, la veille d’une course ou d’entraînement ses rituels.
Et vous, avez-vous recours à un psy?
En ce qui me concerne, je n’ai pas de coach mental, mais je répète pas mal d’exercices de méditation. Cela m’aide tous les jours, même pour dormir. Je suis un garçon qui réfléchit pas mal, donc la médiation est un élément clé en course et pour l’entraînement que j’utilise régulièrement. Chacun a ses trucs et ses routines mais le travail de fond se fait par soi-même.