Burkina FasoLa famine menace les habitants d’une ville sous blocus djihadiste
Depuis un mois, Sebba et ses 30’000 habitants sont isolés du monde par des groupes armés. Une véritable catastrophe pourrait s’abattre sur les civils, dont beaucoup ne se nourrissent que de feuilles.
Les habitants de la ville de Sebba, chef-lieu de la province du Yagha, dans le nord du Burkina Faso, soumis à un «blocus» de groupes djihadistes depuis un mois, ont lancé un cri d’alarme, se disant menacés de famine. «L’axe qui relie cette ville à Dori», le chef-lieu de la région du Sahel où se trouve Sebba, «est coupé et la population se retrouve aujourd’hui dans une situation où elle de plus en plus est isolée», a confirmé le chargé de mission de Médecins sans frontières (MSF) au Burkina Faso, Ulrich Crépin Namfeibona.
Selon lui, «il y a un manque criant de nourriture, les gens mangent des feuilles tous les jours». «Si vraiment rien n’est fait pour donner de quoi se nourrir à cette population, dans les jours à venir, nous pourrions assister à une catastrophe, une crise nutritionnelle qui va frapper beaucoup plus les enfants.» Près de 30’000 personnes, dont de nombreux déplacés, vivent actuellement à Sebba.
Interrogé par l’AFP, Abdoulaye Ly, un habitant de la ville, a estimé que «la situation alimentaire est critique». «Les alertes ont été lancées, mais jusqu’à présent, on ne voit pas le bout du tunnel» et «légitimement, la population se sent abandonnée».
Pont saboté, puis détruit
Des commerçants s’étaient organisés pour approvisionner la localité, mais un convoi de 14 camions est resté bloqué à Dori, à la suite du sabotage, le 25 juin, d’un pont sur l’axe reliant Dori à Sebba, a expliqué Abdoulaye Ly. Des habitants avaient tenté de réhabiliter ce pont, mais un nouveau sabotage, le 26 juillet, l’a complètement détruit, coupant la ville du reste du pays.
«Si cet axe n’est pas réhabilité, c’est toute la province, dont Sebba est la porte d’entrée, qui est isolée. C’est donc vital pour toute la province, avec des localités somme Solhan et Mansila, qui souffrent également le martyre», a relevé Mohamed Dicko, un autre habitant de Sebba.
L’Association des ressortissants du Yagha (ARY) a appelé à «une action rapide, pour éviter une catastrophe humanitaire». «Il faut permettre rapidement un accès à la ville de Sebba pour l’approvisionnement en carburant, nourriture et autres produits de première nécessité», indique une note de l’Ary. Les attaques attribuées aux djihadistes sont fréquentes dans la province du Yagha, dont les habitants de localités chassés par les groupes djihadistes se sont réfugiés à Sebba.
Près de 40% du territoire hors contrôle
Le Burkina Faso, où des militaires ont pris le pouvoir en janvier, en promettant de faire de la lutte antidjihadiste leur priorité, est confronté comme plusieurs pays voisins à la violence de mouvements armés affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique, qui y ont fait depuis 2015 des milliers de morts et deux millions de déplacés. Plus de 40% du territoire du Burkina Faso est hors du contrôle de l’État, selon des chiffres officiels, et les attaques se sont multipliées depuis le début de l’année.