En musique, l’appropriation culturelle est la règle

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CommentaireEn musique, l’appropriation culturelle est la règle

Les oreilles nous en tombent, quand un groupe bernois doit renoncer à se produire, accusé d’être trop blanc ou pas assez noir pour jouer du reggae. 

Eric Felley
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Eric Felley
Bernie Constantin s’est approprié le reggae à la sauce «yodle» en 1982 déjà

Bernie Constantin s’est approprié le reggae à la sauce «yodle» en 1982 déjà

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On ne pensait pas en arriver là un jour. Le groupe de musiciens bernois Lauwarm a dû renoncer à une série de concerts la semaine dernière dans un café de Berne. Une partie du public lui reprochait de chanter du reggae avec des paroles en dialectes alémaniques. Ces détracteurs dénonçaient une «appropriation culturelle», soit un sacrilège envers cette musique venue de Jamaïque, la parole des opprimés, qui ne devrait être jouée que par des personnes de couleur.

Face à la pression de ses clients mécontents, le patron a préféré renoncer à faire jouer le groupe de musiciens blancs et aurait même présenté des excuses aux personnes qui se sont senties offensées. Comment ne pas s’étrangler devant une telle absurdité sur fond de respect des différences culturelles. Toute l’histoire de la musique du XXe siècle s’est construite dans le métissage des genres et de la fusion des styles, des rythmes et des harmonies.

De Clapton à Constantin

La musique est un langage universel. Le reggae, en particulier, est devenu ce langage universel avec Bob Marley dans les années 70. Le premier cas notoire d’appropriation de sa musique est sans doute celui d’Eric Clapton. En 1973, six mois après la version de Bob Marley, le chanteur britannique reprenait «I shot the Sheriff» pour en faire un tube planétaire. Quelques années plus tard, en 1979, Serge Gainsbourg, dans l’album «Aux armes et cætera», mélangeait les paroles de «La Marseillaise» au «one drop» de Kingston. En Suisse, c’est le chanteur Bernie Constantin qui s’est taillé une bonne part de notoriété avec son Switzerland Reggae sorti en 1982.

En musique, on aimerait dire que l’appropriation culturelle est la règle. N’importe quel musicien peut se mettre au service de n’importe quelle musique. Qui oserait affirmer que seuls les Argentins ont le droit de jouer du tango, seuls les Africains peuvent jouer du Djembé ou seul les Suisses peuvent souffler dans un cor des Alpes?

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