Publicité cibléeApple condamné à 8 millions d’euros d’amende en France
Le géant américain a été sanctionné pour avoir imposé des traceurs publicitaires à ses utilisateurs dans l’Hexagone sans leur consentement explicite. Il va faire appel.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés française (CNIL) a infligé une amende de 8 millions d’euros à Apple pour avoir imposé des traceurs publicitaires à ses utilisateurs en France, sans le consentement explicite de ceux-ci, a-t-elle indiqué mercredi. L’enquête avait été lancée par le gardien français de la vie privée sur internet après une plainte de l’association France digitale, qui fédère les start-up françaises, notamment des développeurs de logiciels distribués via le magasin d’applications du groupe américain.
Le caractère relativement limité de l’amende s’explique par le fait que le géant américain s’est mis en conformité rapidement durant l’enquête de la CNIL, qui a eu lieu mi-2021. De plus, ces identifiants publicitaires ne permettaient à Apple de cibler les internautes que lorsqu’ils naviguaient sur l’App Store, donc dans un champ bien borné. Enfin, l’autorité n’a pu sanctionner que les manquements en France.
«Nous sommes déçus par cette décision (…) et nous allons faire appel», a réagi Apple dans une déclaration à la presse. «La CNIL a reconnu que la façon» dont sont désormais distribuées les publicités dans l’App Store «donne la priorité à la protection de la vie privée des utilisateurs», a ajouté le géant américain.
De leur côté, les professionnels français du marketing numérique se sont réjouis de la décision. «Cette sanction (…) témoigne à nouveau de l’ampleur des pratiques abusives d’Apple, contestées actuellement partout dans le monde, du Japon aux États-Unis en passant par la Pologne», a estimé l’Alliance digitale.
Consentement précoché
Dans les faits, l’ancienne version 14.6 du système d’exploitation d’Apple déposait «par défaut» des identifiants sur les appareils mobiles de la marque (iPhone, iPad…). Ces identifiants permettaient à Apple de personnaliser les annonces publicitaires diffusées sur son magasin d’applications. Si l’utilisateur ne voulait pas de ce traçage publicitaire, il lui fallait décocher une case dans les réglages de l’appareil.
«Cela fait des années» que la position de la Cour européenne de justice et des tribunaux est «très claire», a expliqué le secrétaire général de la CNIL Louis Dutheillet de Lamothe: un consentement valable «ne peut pas être une case précochée», a-t-il souligné.
À l’époque de la plainte, le directeur général de France Digitale, Nicolas Brien, avait fustigé le «deux poids, deux mesures» d’Apple. La marque à la pomme s’autorisait en effet une case précochée pour ses traceurs, alors qu’elle imposait depuis peu aux applications tierces de demander un consentement explicite à l’internaute pour leurs propres mouchards.
La sanction ne concerne que la France, car elle relève de la directive européenne e-Privacy, qui ne permet que des sanctions nationales. Le Règlement européen sur la protection des données, qui prévoit des sanctions à l’échelle européenne, ne s’applique pas dans ce cas précis.