CommentaireÉlus Verts au régime sec, sans viande, ni kérosène
Après la décision genevoise, il semble de plus en plus difficile d’être un élu écologique sans prêter le flanc à la critique sur sa consommation. Si ce n’est pas l’entrecôte, c’est l’avion.
- par
- Eric Felley
En politique, la consommation de viande est devenue un champ hautement symbolique. Certains élus agrariens se plaisent à publier des images de leurs assiettes débordantes de saucisses et de côtelettes. C’est une forme de doigt d’honneur à la crise climatique et un acte militant pour défendre la liberté d’en manger comme on veut et tant qu’on veut. Cela relève aussi de la défense des traditions, du terroir et des campagnes contre les «Khmers verts» des villes.
Surveiller sa ligne carbone
La décision du congrès des Vert-e-s genevois d’imposer à leurs élu-e-s un régime végétarien lorsqu’ils sont en représentation semble logique de prime abord. Mais il y a quelque chose d’infantilisant dans cette volonté du parti de régler le menu des élus jusqu’au sommet de l’État. Sur d’autres fronts politiques, les Vert-e-s ont pourtant défendu ces dernières années une meilleure idée de la liberté individuelle.
Un élu écologiste doit surveiller sa ligne carbone, c’est clair, il y va de la cohérence de son action politique. Mais tous les écologistes sont-ils végétariens? On ne dispose pas de chiffres, une certaine proportion sans doute, plus qu’au PLR et à l’UDC en tout cas. Ceux qui ne le sont pas seraient-ils en délicatesse avec le programme du parti? Contribuent-ils à la disparition des insectes? C’est le talon d’Achille du parti en ce moment, tiraillé entre les mouvements climatiques qui exigent des changements rapides et des militants qui évoluent à un rythme plus consensuel.
Le précédent de l’avion
La clause genevoise permettra d’éviter d’avoir à gérer une photo d’Antonio Hodgers en train de rigoler autour d’un barbecue fumant. L’année dernière, une députée Verte valaisanne avait publié des images d’un long voyage en avion en famille vers Les Comores. Elle avait subi une attaque dans les règles d’un compatriote conseiller national du PLR, suivie d’une remise en place musclée de notre confrère du «Blick». Dans les milieux anti-écologistes, on sent une certaine jubilation à prendre l’adversaire en flagrant délit de contradiction entre vie privée et discours politique. Certains n’ont toujours pas digéré la percée écologiste de 2019 avec le succès planétaire de Greta Thunberg. Ils feront tout pour que cela ne se reproduise pas en 2023.
50 kilos par habitant en Suisse
Quant au steak, l’effort des Vert-e-s genevois pour s’en passer sera une goutte d’eau dans un océan de viande. Les Suisses ne sont pas près d’arrêter d’en manger. En 2018, la consommation par habitant était de 52,06 kilos. En 2019 de 51,14 kg et en 2020 de 50,91 kilos. On constate donc une très légère tendance à la baisse. Mais la Suisse en a une consommation plutôt modérée en comparaison avec les pays de l’OCDE, où la moyenne est de 71,6 kilos par individu par an et avec une pointe de plus de 130 kilos au Luxembourg.