Carlo Ancelotti dénonce le racisme en Liga espagnole

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FootballVinicius victime de racisme, l’Espagne s’enflamme

L’attaquant du Real Madrid affirme avoir été insulté par le public de Valence dimanche soir. Son entraîneur et le président du Brésil, entre autres, sont montés au créneau pour le défendre. La justice espagnole a ouvert une enquête.

Vinicius Junior a, semble-t-il, été victime de nouvelles insultes racistes à Valence.

Vinicius Junior a, semble-t-il, été victime de nouvelles insultes racistes à Valence.

AFP

Le championnat d’Espagne «a un problème avec le racisme», s’est insurgé l’entraîneur du Real Madrid, Carlo Ancelotti, après les nouvelles insultes proférées contre son joueur brésilien Vinicius Junior, qui ont suscité de nombreuses réactions de soutien à l’exception notable du patron de la Liga.

«Penser à faire sortir un joueur pour cause de racisme, ça ne m’était jamais arrivé. Ce qui s’est passé aujourd’hui (ndlr: dimanche) nous est déjà arrivé, mais de cette manière, non. C’est inacceptable. La Liga espagnole a un problème avec le racisme. Et le problème, ce n’est pas Vinicius. Vinicius est la victime. Mais il y a un problème très grave», s’est exclamé l’entraîneur italien devant la presse à l’issue du match disputé dimanche soir à Valence.

Lors de cette rencontre perdue à 1 à 0 par le Real, le joueur brésilien a affirmé avoir été insulté par le public. Autour de la 70e minute de jeu, Vinicius a pointé du doigt un supporter, puis les joueurs sont allés rapporter les faits à l’arbitre. Carlo Ancelotti a de son côté indiqué avoir entendu le cri «mono», soit «singe» en espagnol, ce qui a amené l’arbitre à «ouvrir le protocole racisme», selon l’Italien.

Vinicius expulsé

«Je lui ai demandé (ndlr: Vinicius) s’il voulait continuer à jouer, et il voulait continuer. L’arbitre m’a dit qu’il devait aussi continuer, qu’il allait appliquer le protocole si cela se reproduisait. Mais cela s’est reproduit, parce que quand il l’a expulsé sur carton rouge, tout le stade s’est mis à chanter «singe, singe»... Cela ne peut pas continuer... Je suis très triste», a encore regretté Ancelotti.

Une échauffourée entre l’attaquant brésilien et Hugo Duro a en effet conduit à l’expulsion de «Vini» à la 90e+7, mais l’arbitre a décidé de ne pas sanctionner le joueur de Valence. «Ce qu’ont gagné les racistes, c’est mon expulsion. Ce n’est pas du foot. C’est la Liga», a dénoncé Vinicius sur Instagram après le match.

«Ce n’était pas la première fois, ni la deuxième ni la troisième. Le racisme est normal en Liga. […] Je suis vraiment triste. Le championnat qui appartenait autrefois à Ronaldinho, Ronaldo, Cristiano et Messi appartient aujourd’hui aux racistes», a assené le jeune joueur. Les marques de soutien à son égard ont afflué dans le monde du football, et au-delà.

Une enquête ouverte

Au lendemain de ces incidents, le parquet de Valence a, de sa propre initiative, ouvert des investigations pour un «délit de haine» présumé.

Dans le rapport remis comme chaque semaine aux autorités compétentes, la Liga a déclaré lundi soir avoir identifié «distinctement» des insultes racistes et des cris de singe.

Devant la presse, le président de la Fédération espagnole de football (RFEF), Luis Rubiales, a reconnu que le football espagnol avait «un problème de racisme», qui, a-t-il ajouté, «entache toute une équipe, tous les supporters, tout un pays». La Fédération a également demandé l'adoption de «mesures plus vigoureuses», qui pourraient aller jusqu'à la fermeture de tribunes, voire de stades en cas de récidive, ainsi que la saisine de la Commission d'État contre la violence, la xénophobie et le racisme dans le sport.

Le Conseil supérieur des sports (CSD) espagnol a affirmé qu'il était en train d'analyser les images afin d'identifier «les auteurs de ces insultes et comportements pour proposer les sanctions appropriées». Le CSD a aussi rappelé que, pour des faits similaires de racisme, il a déjà proposé cette saison 4000 € d'amende et une interdiction de stade d'un an pour les auteurs de ces insultes.

Le gouvernement espagnol, par la voie de son ministre de la Consommation, Alberto Garzon, a réclamé «une réponse ferme» contre ce phénomène qui «montre que le racisme est très ancré chez certains groupes spécifiques de supporters». Quant au président du gouvernement, Pedro Sanchez, il a affirmé lundi soir sur Twitter que «la haine et la xénophobie ne doivent pas avoir de place dans notre football ni dans notre société», réitérant son vœux de «tolérance zéro avec le racisme dans le football».

Soutien de Neymar, Mbappé, Lula et Infantino

Ces propos et ces actes s'ajoutent aux nombreux soutiens reçus depuis dimanche soir par Vinicius. «Si «Vini» avait dit «je quitte le terrain», je serais parti avec lui. C’est quelque chose que l’on ne peut pas tolérer», a souligné le gardien belge du Real Madrid Thibaut Courtois, qui lui aussi a dit avoir entendu «des cris de singe autour de la 20e minute». «Avec toi», a de son côté réagi sur Instagram Neymar, son coéquipier avec la Seleçao.

Un autre international brésilien Richarlison, la légende à la retraite Ronaldo ou encore l’icône de la musique Gilberto Gil ont aussi exprimé sur les réseaux sociaux leur solidarité, tout comme l’attaquant français, Kylian Mbappé. «Tu n’es pas seul. Nous sommes avec toi et te soutenons», a écrit en anglais la vedette du PSG sur son compte Instagram.

«Il n’est pas possible, en plein XXIe siècle, d’avoir des préjugés raciaux aussi forts dans autant de stades de football»

Lula, président du Brésil

Lors d’une conférence de presse à Hiroshima, au Japon, le président brésilien Luis Inazio Lula da Silva a lui-même condamné le «racisme» dont a été victime le joueur. «Il a été attaqué. On l’a traité de singe». «Il n’est pas possible, en plein XXIe siècle, d’avoir des préjugés raciaux aussi forts dans autant de stades de football», a-t-il ajouté. Dans son sillage, le gouvernement brésilien a appelé l'ambassadrice d'Espagne – Maria del Mar Fernandez-Palacios – pour lui faire part de son «mécontentement». Brasilia a exprimé à la diplomate son «espoir que des mesures soient prises dans cette affaire» par le gouvernement et les autorités sportives espagnoles.

Gianni Infantino, président de la FIFA, a de son côté exprimé sa «pleine solidarité» à Vinicius à travers un communiqué. «Il n’y a pas de place pour le racisme dans le football ou dans la société et la FIFA soutient tous les joueurs qui se sont retrouvés dans une telle situation», indique le dirigeant italo-suisse. Gianni Infantino a rappelé les trois étapes mises en place lors des compétitions organisées par la FIFA en cas d’insultes racistes et a souhaité qu’elles soient «appliquées dans tous les pays et dans toutes les ligues»: «Premièrement, vous arrêtez le match. Dans un second temps, les joueurs quittent le terrain et le speaker annonce que si les attaques continuent, le match sera suspendu. Le match recommence, puis, troisièmement, si les attaques continuent, le match s’arrêtera et les trois points iront à l’adversaire.»

Tensions avec Javier Tebas

Dans un communiqué diffusé après le match, le Valence CF a dit «condamner publiquement toute sorte d’insulte, d’attaque ou de mépris», et «regretter les faits survenus» dimanche, en évoquant toutefois un «acte isolé». «Le club est en train d’enquêter sur les faits qui se sont déroulés et prendra les mesures les plus sévères», a assuré Valence.

Seule voix dissonante – et pas n’importe laquelle: celle du patron de la Liga, Javier Tebas, qui a mal pris les accusations du Brésilien et s’est lancé dans une passe d’armes avec lui sur les réseaux sociaux. «Avant de critiquer et d’insulter la Liga, il serait nécessaire que vous vous informiez correctement», a-t-il cinglé, en réfutant toute inaction de son instance. «Je ne suis pas votre ami pour parler de racisme. Je veux des actions et des sanctions», lui a répondu Vinicius.

«Il y a déjà eu des plaintes, mais qu’est-ce que ça a donné? Rien du tout. La seule et unique solution, c’est d’arrêter le match», avait pour sa part conclu Ancelotti, lors de sa conférence de presse d’après-match.

(AFP)

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