CommentairePierre Maudet et la métaphore des cornichons
Retour gagnant pour l’ancien conseiller d’État qui a pu mesurer sa popularité. Mais saura-t-il dissiper le malaise qui accompagne sa personne, durant ces prochaines années?
- par
- Eric Felley
Pierre Maudet retrouve le Conseil d’État genevois, dont il avait été éjecté en 2021, à la suite de l’affaire du voyage à Abu Dhabi. Ironie de l’histoire, il est élu alors qu’il attend toujours la sentence que doit lui infliger la justice genevoise, selon la décision du Tribunal fédéral. Peu importe. Sur la RTS dimanche, Pierre Maudet a rétorqué qu’une condamnation «n’était pas éternelle» et qu’il devrait bénéficier du droit à l’oubli.
Pas de pivot
Formellement, il a raison. Mais dans les esprits, cela ne marche pas comme ça. La nouvelle élue socialiste Carole-Anne Kast a résumé son sentiment mitigé sur la RTS: «Il faudra bien travailler avec… Le parcours de Pierre Maudet n’incite pas à la confiance et pour ma part j’aurai de la peine à lui faire confiance». Dans quelques semaines, il va donc retrouver les séances du Gouvernement, mais il ne sera plus le président omnipotent, après sa brillante élection de 2018. D’aucuns l’ont présenté hier comme un nouvel homme du fort du gouvernement, fonctionnant en pivot entre les élues de droite et ceux de gauche. Il n’est pas certain que ses collègues vont lui laisser jouer ce rôle. Lui n’a pas intérêt à le faire, non plus. S’il veut faire passer ses dossiers, il devra prioriser des décisions unanimes du conseil.
Pas de guéguerre personnelle
Toutefois, pour y parvenir, il devra surveiller son langage. A la RTS qui l’interrogeait sur sa revanche et les raisons de son succès: «Ce serait dommage que la politique, ça aboutisse à une forme de calibrage de cornichons, où personne ne dépasse et où rien ne se tente». Quels sont les «cornichons» qui se seront reconnus dans cette définition? En tout cas pas la grande gagnante de ce 2e tour, Nathalie Fontanet, qui le dépasse de 22 000 voix. Elle a sobrement résumé la situation nouvelle avec son ancien collègue du PLR: «Pas de guéguerre personnelle. Donc on va travailler ensemble». Pas question, donc, que cela tourne au vinaigre.
«Pas de cadeau»
Mais rien n’est joué, car on sent encore de l’amertume chez Pierre Maudet: «La confiance, elle se construit à deux, a-t-il déclaré dimanche. La façon dont on m’a éjecté du Gouvernement, il y a deux ans, avait été qualifiée de coup d’État institutionnel par le Parlement et sa commission de gestion, et montre que c’est quelque chose à rétablir». Interrogé encore sur cette condamnation pour acceptation d’un avantage, pour son voyage à Abu Dhabi, Pierre Maudet a conclu: «Ce que je retire de cette affaire et je le démontrerai au Conseil d’État, c’est qu’il n’y aura pas de cadeau».
Son interview s’est donc terminée sur un double sens. Il n’y aura pas de cadeau…