Fourgon attaqué sur l’A1Le convoyeur menacé: «Vous avez détruit la vie de ma fille»
Les deux Genevois nient toute implication dans le braquage de Chavornay (VD) en février 2018. Le père de la jeune fille séquestrée comme monnaie d’échange se confie.

Ils nient toute implication active dans le casse à 25 millions de francs perpétrés le 8 février 2018 sur un parking de Chavornay (VD) à proximité de la sortie d’autoroute. Tout au plus ont-ils fonctionné comme des messagers entre deux autres acolytes plus haut placés dans la hiérarchie, ont-ils effectué des repérages, assisté à quelques réunions où l’on parlait braquage et de «tas d’autres choses aussi». Ils étaient comme deux frères avant leur arrestation en 2019. Aux débats, chacun rejette les responsabilités sur l’autre. Un manège aberrant qui agace, alors que des preuves tangibles existent. V., 31 ans, et C., 32 ans, ne font clairement plus partie de la même famille. C’est à qui s’en sortira le mieux ou le moins mal.
Licencié en arrêt maladie
Sur place très tôt ce lundi matin, il y a surtout le convoyeur qui a été pris en otage par l’entremise de sa fille de 22 ans, enlevée à Lyon peu avant le braquage vaudois, ligotée, séquestrée et relâchée seule au bord d’une route. Ses ravisseurs l’ont contrainte de supplier son père par téléphone à ne pas déclencher d’alarme et à suivre les consignes. Sous cette menace insupportable, il s’est exécuté. Depuis les faits, il est fragilisé. Il ne s’en cache pas. «Mon employeur n’a jamais pris de mes nouvelles et encore moins de ma fille. J’ai été en congé maladie. Je devais reprendre le 7 juillet 2018. Au lieu de cela, j’ai été licencié deux mois après le braquage du 8 février 2018. J’ai bien essayé d’attaquer mon entreprise et de me battre tout seul, mais sans succès. J’ai fini par laisser tomber», raconte, désabusé, le père de famille installé en France.
Psychologiquement blessé
Depuis un mois, l’homme psychologiquement blessé est représenté par une avocate. Il est également encadré par une représentante d’un centre LAVI (loi fédérale sur l’aide aux victimes d’infractions). Il y a sa fille bien sûr et les répercussions qu’a eues «l’opération Chavornay». Il y a encore ce qu’il a vécu, lui, sur le terrain. Il a été tenu en joue par des assaillants lourdement armés, il a ouvert les portes arrière du fourgon de SOS Surveillance avec la clé de contact grâce à une faille de sécurité. «Zurich ne l’avait pas verrouillée avec les vérins» est venu expliquer le directeur de SOS. Le convoyeur menacé a encore dû vider le fourgon de son contenu, déplomber les caisses métalliques et attendre le feu vert des kidnappeurs pour donner l’alerte et s’assurer que sa fille avait été relâchée.
«Tout s’est arrêté»
Interrogé en audience, il explique que convoyeur n’est pas sa profession initiale: «Ce qui m’est arrivé, c’est quelque chose que l’on ne peut pas oublier». Sur la note retrouvée chez un des coprévenus, c’est bien son adresse et l’indication «trois filles» qui a été découverte. «Je suis désolé pour lui», lâche V. S’adressant aux deux auteurs présumés: «Ça, il faut le dire à quelqu’un d’autre, pas à moi. Vous avez détruit la vie de ma fille, vous le savez? Elle avait des projets, un mariage en vue, elle était heureuse et tout s’est arrêté. J’ai écrit à mon ancien collègue en prison. Il a tout nié, comme ces individus». Sur le plan professionnel, il travaille sur appel toujours dans la sécurité et concède avoir de la peine à remonter la pente. «Aux entretiens de travail, on me parle plus de l’affaire que de mes compétences.»
Le procès se poursuit.