Jura bernoisIncendie criminel: «le feu a détruit 5000 heures de travail»
Le propriétaire d’une bâtisse historique détruite samedi dernier à Villeret n’était pas la cible de l’incendiaire. Mais c’est lui qui a tout perdu.
- par
- Vincent Donzé
Après l’eau en 2021, le feu en 2023. Les éléments se sont acharnés contre Didier Othenin-Girard, propriétaire d’une bâtisse deux fois sinistrée à Villeret, mais si l’inondation du 23 juin 2021 est venue du ciel, l’incendie de samedi dernier n’était pas accidentel: un homme de 33 ans s’est rendu à la police cantonale bernoise pour dire qu’il avait bouté le feu à l’ancienne ferme.
Didier Othenin-Girard ne se connaît aucun ennemi. Ce n’est pas lui qui était visé par l’incendiaire, ni la propriétaire de la voiture incendiée dans le garage. Mais c’est lui qui a tout perdu: «Le feu a détruit 5000 heures de travail», indiquent le propriétaire et l’associé qui ont rénové deux fois la maison, après son acquisition en 2020 et après l’inondation de 2021.
«Labyrinthe de couloirs»
Située en contrebas de la gare, au bord de la Suze, l’habitation détruite date de 1636. Selon le cadastre, elle était la première du village. Cette bâtisse était dépossédée de sa substance patrimoniale lorsqu’elle a été reprise par Didier Othenin-Girard à un centre de formation de yoga.
«C’était un labyrinthe de couloirs et de locaux», rapporte le propriétaire. Mais son passé horloger la rendait «très attachante»: c’est là que l’horloger Jehan-Jacques Blancpain a posé les premiers rouages d’une marque qui porte son nom.
À peine la bâtisse a-t-elle été rénovée que le 23 juin 2021, un orage inondait Villeret. L’eau est montée jusqu’aux fenêtres du rez-de-chaussée. Didier Othenin-Girard et son associé Rico Greidenweis ont remis l’ouvrage sur le métier: «Il a fallu repartir à zéro, alors que tout était bien fait», disent-ils.
Tout était prêt, un locataire devait entrer dans le nouvel appartement le 1er février prochain, au rez-de-chaussée. Ce sont trois étages qui ont été anéantis dans l’incendie de samedi dernier, le feu s’étant propagé par une isolation faite de paille, de foin, de crin et des scories. L’arrêt est brutal pour la fabrication d’aliments pour chiens, une activité gérée par la résidente des combles qui nécessite notamment des congélateurs.
Pas classée
«Il faudra tout vider pour ne garder que les murs», prévoit le propriétaire, tandis que trois agents de la police scientifique s’affairent autour de la voiture incendiée. Son enveloppe est digne de protection, mais cette bâtisse n’est pas classée par l’Office du patrimoine bernois.
Son caveau voûté est d’époque, avec ses pierres de taille, mais c’est surtout pour sa situation et son volume que Didier Othenin-Girard a eu un coup de cœur pour la Maison Blancpain. C’est pour ça qu’il repartira à zéro, encore une fois.