LondresLe Trésor britannique se défend après le camouflet du FMI
Les autorités britanniques ont répondu aux critiques inhabituelles du Fonds monétaire international sur leurs mesures budgétaires et les baisses d’impôts.
Le Trésor britannique a défendu, mercredi, son plan budgétaire annoncé la semaine dernière, qui mêle soutien massif aux factures énergétiques et baisses d’impôts tous azimuts, malgré des critiques abruptes et inhabituelles du Fonds monétaire international (FMI), de l’agence de notation Moody’s et celles de la classe politique.
«Nous avons agi rapidement pour protéger les ménages et entreprises cet hiver et l’hiver prochain, après des hausses sans précédent des prix de l’énergie entraînées» par la guerre en Ukraine, a justifié le Trésor, dans un communiqué.
«Nous nous concentrons sur le fait de faire croître l’économie et le niveau de vie pour tous» et le Chancelier de l’Échiquier Kwasi Kwarteng, qui doit rencontrer des représentants bancaires mercredi, «publiera un plan budgétaire de moyen terme, le 23 novembre, qui assurera que la dette recule dans sa part du PIB», ajoute-t-il.
Critiques du FMI
Dans un communiqué au ton inhabituellement critique, le FMI a indiqué qu’il «surveillait attentivement» la situation au Royaume-Uni, et appelle Londres à rectifier le tir. «Vu les pressions inflationnistes élevées dans plusieurs pays, y compris le Royaume-Uni, nous ne recommandons pas de mesures budgétaires importantes non financées, car il est important que la politique budgétaire ne barre pas la route à la politique monétaire», admoneste le FMI.
«Le budget du 23 novembre présente une opportunité pour le gouvernement britannique de (…) réévaluer ses mesures fiscales, particulièrement celles qui visent les revenus les plus élevés», qui risquent «d’accroître les inégalités», ajoute le FMI dans son communiqué en forme de camouflet pour la nouvelle Première ministre Liz Truss et pour Kwasi Kwarteng.
Dette insoutenable
L’agence de notation Moody’s n’est pas en reste, affirmant dans une note que «de vastes baisses d’impôts non financées» par des réductions de dépenses publiques par ailleurs «vont mener à des déficits structurels plus élevés, qui ont peu de chance de résoudre les problèmes de croissance de long terme» et pourraient conduire à une dette difficilement soutenable.
Pression sur la livre
Interrogée sur le sujet, la ministre des Finances américaine Janet Yellen a indiqué que le Trésor américain suivait également de près la situation économique de Londres. Les annonces budgétaires de Kwasi Kwarteng vendredi avaient fait plonger la livre à son plus bas historique. Mercredi, la devise repartait en légère baisse de 0,37% à 1,0692 dollar vers 11h (en Suisse) après être un peu remontée la veille.
Les dépenses prévues dont seulement une partie du coût a été chiffrée par Londres (les aides aux factures énergétiques pour six mois), sont évaluées à entre 100 et 200 milliards de livres sterling par les économistes. Ces derniers s’inquiètent aussi de l’absence de rééquilibrage des comptes publics en prévoyant des baisses d’impôts en parallèle aux stimuli budgétaires. Enfin, l’impact sur l’économie britannique n’a pas été calculé non plus, même si Kwasi Kwarteng a promis des prévisions officielles d’ici à la fin de l’année.
Action de la Banque d’Angleterre
La Banque d’Angleterre (BoE) a annoncé, mercredi, intervenir sur le marché obligataire britannique en achetant des obligations d’Etat pour «rétablir des conditions de marché normales», alors que le taux d’emprunt du Royaume-Uni a explosé depuis des annonces budgétaires très coûteuses, vendredi. Cette «opération sera entièrement financée par le Trésor». En réaction, le taux d’emprunt à 30 ans, qui était monté à son plus haut depuis 1998 à 5,14% en début de séance, reculait à 4,73%.
La BoE a également indiqué que le paquet budgétaire «conséquent» du gouvernement conservateur de Liz Truss nécessiterait une hausse de taux d’intérêt tout aussi «conséquente».
La responsable de l’opposition britannique travailliste pour les questions économiques, Rachel Reeves, a appelé Downing Street à «expliquer d’urgence comment le gouvernement compte régler les problèmes qu’il a créés par ses décisions inconséquentes».