Effondrement du Rana Plaza, des manifestants réclament justice

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BangladeshCatastrophe du Rana Plaza en 2013: «Qu’est-il advenu des assassins?»

Dix ans après l’effondrement de l’usine textile Rana Plaza à Dacca, qui a fait 1138 morts et plus de 2500 blessés, des manifestants réclament justice.

Des survivants de l’effondrement du Rana Plaza sont descendus dans la rue, lundi.

Des survivants de l’effondrement du Rana Plaza sont descendus dans la rue, lundi.

AFP

Des centaines de travailleurs, dont des survivants, ont manifesté lundi au Bangladesh pour réclamer justice et rendre hommage aux 1138 personnes mortes dix ans plus tôt dans l’effondrement d’une usine textile. Le 24 avril 2013, une usine de confection de prêt-à-porter s’est effondrée au Bangladesh et les Occidentaux, sidérés, ont découvert les visages des travailleurs morts d’avoir fabriqué leurs vêtements. La tragédie du Rana Plaza, une des pires catastrophes industrielles, a jeté une lumière crue sur la dépendance de l’industrie textile mondiale aux usines implantées dans des pays en voie de développement, où les conditions de travail sont souvent indignes.

Lundi matin dès l’aube, des survivants de l’effondrement du Rana Plaza, dont certains ont été amputés d’un membre ou sont aujourd’hui estropiés, ont déposé des couronnes de fleurs sur le site où se dressait autrefois le bâtiment de l’usine, qui fabriquait des vêtements pour des marques de renommée mondiale, telles Mango ou Primark. «Dix ans se sont écoulés, mais qu’est-il advenu des assassins?» ont scandé des manifestants, se dirigeant lentement vers le mémorial situé à Savar, à l’ouest de la capitale, Dacca.

«C’est un scandale que dix ans se soient écoulés et que les propriétaires de l’usine textile et du bâtiment n’aient pas été punis pour le meurtre des 1138 travailleurs», fustige Niloga, une survivante âgée de 32 ans, laissant éclater sa rancœur. «Je n’ai presque rien reçu. Ma jambe a été écrasée et je ne peux pas travailler dans les usines. Mon mari m’a quittée il y a cinq ans car il ne voulait pas prendre en charge mes frais médicaux», explique-t-elle, en larmes. «Nous voulons une indemnisation complète et un traitement médical à vie, car nous avons perdu notre capacité de travail», réclame Shila Akhter, 42 ans, dont la moelle épinière a été brisée. «Le gouvernement devrait savoir ce que nous avons enduré. Certains survivants sont contraints de mendier dans les rues.»

Le lieu de la tragédie, le 26 avril 2013.

Le lieu de la tragédie, le 26 avril 2013.

AFP

Lenteur de la justice

Depuis la tragédie, les dirigeants syndicaux ont reconnu à l’unanimité les progrès réalisés en matière de sécurité dans les usines du Bangladesh, deuxième exportateur mondial de vêtements après la Chine. Ils ont en revanche critiqué la lenteur de la procédure judiciaire, notamment à l’encontre de Sohel Rana, propriétaire du Rana Plaza, qui fait partie des 38 personnes inculpées par un tribunal du Bangladesh pour meurtre.

M. Rana aurait forcé ses employés à travailler, malgré l’apparition d’une fissure dans le bâtiment, la veille de son effondrement. Son procès a repris l’an dernier, mais le verdict pourrait ne tomber que d’ici plusieurs années. «Moins de 10% des témoins ont subi un contre-interrogatoire», a déclaré à l’AFP le procureur Bimal Samadder. Après l’effondrement du Rana Plaza, deux organismes de surveillance ont été créés pour améliorer les normes de sécurité.

Les salaires des quatre millions d’ouvriers, majoritairement des femmes, fabriquant des vêtements pour les distributeurs occidentaux ont par ailleurs triplé après la tragédie. Les propriétaires d’ateliers de confection du Bangladesh affirment de leur côté avoir investi quelque deux milliards de dollars dans la refonte de la sécurité de leurs usines. Laura Bourgeois, de l’ONG Sherpa, met toutefois en garde contre les audits chargés de vérifier le respect des normes de sécurité, qui pourraient s’avérer «truqués avec des usines un peu montées de toutes pièces».

(AFP)

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