InterviewBianca Costa: «Me retrouver seule et incomprise m’a poussée à composer»
La Franco-Brésilienne était au Dôme du Paléo jeudi 20 juillet. Rencontre avec une jeune artiste qui a la tête sur les épaules et dont la carrière est sur le point d’exploser.
- par
- Fabio Dell'Anna
Elle a la France et le Brésil dans son coeur. En seulement deux ans, Bianca Costa a inventé un genre qui marie la douceur de la bossa-nova avec la trap ultra street. Elle s’est imposée avec des titres comme «Seleção» ou «Olé Olé» et a fait la première partie d’Angèle sur certaines dates du «Nonante-cinq tour». Hatik et Dadju saluent son talent, tout comme Bigflo et Oli avec qui elle a partagé la scène.
Vous l’aurez compris, la chanteuse de 24 ans née à Florianópolis (Sud) est sur le bon chemin pour imposer son style singulier. Elle a été invitée par le Paléo à chanter le 20 juillet au Dôme, dans le Village du Monde dédié au Brésil. Une belle surprise dont elle nous a parlé juste avant de se produire en concert.
Il s’agit de votre première fois au Paléo. Comment vous sentez-vous?
Je n’ai entendu que du bien de ce festival. L’accueil est top et je reçois énormément d’amour de la part du public suisse, comme l’an dernier au Montreux Jazz Festival et au We Hope Festival, à Genève. Je suis surexcitée d’être là. Je ne savais pas que le Village du Monde était dédié au Brésil. J’ai une fan qui est venue en début de semaine au Paléo et m’a envoyé des vidéos des stands de nourriture. J’ai envie de tout goûter!
Comment la musique est arrivée dans votre vie?
Je chante depuis mon enfance. Mon grand-père jouait de la guitare et j’ai toujours su que je voulais faire de la musique. J’ai eu la chance, et parfois la malchance, de beaucoup déménager avec ma mère. Je me suis retrouvée souvent toute seule, incomprise, cela m’a poussée à composer. Tous ces voyages et ces inspirations m’ont permise de construire mon univers musical, un mélange de plein de styles différents.
L’un des endroits où vous avez vécu vous a particulièrement inspirée?
Le Brésil est mon inspiration première, car j’y suis née. Je suis partie jeune du pays et toute ma famille est encore là-bas. C’est une manière pour moi de rester connectée à mes racines. On verra, peut-être que ça évoluera, qu’il y aura d’autres choses.
Vous êtes arrivée en France à l’âge de 10 ans. Vous voyez-vous habiter ailleurs?
J’ai beaucoup aimé faire de la musique en Suède. Mais je suis bien en France pour le moment. J’aime Paris. C’est une thématique que j’aborde dans mon premier album. Je me questionne souvent de savoir si je me trouve au bon endroit.
Qu’en est-il de votre premier album? Quand sortira-t-il?
Je ne sais pas encore, mais il est prêt. On a énormément travaillé pour qu’il soit le plus possible à mon image. J’ai pris des risques musicalement. Avec mon équipe, on a tenté de nouveaux styles et j’aborde de nouveaux sujets. Il y a aussi des collaborations, mais je ne peux pas en dire plus. (Elle sourit.)
Votre titre «Seleção» parle de votre vie sans filtre. De votre père qui vous a abandonnée et de l’amour pour votre mère. Vous êtes toujours aussi directe?
J’aime bien aller droit au but. Et c’est vrai que dans ma musique, surtout sur ce son, j’ai envie d’être plus directe. Même utiliser des mots qui peuvent choquer. Le plus important est d’être 100% vraie.
Que pense votre mère de ce morceau?
J’ai la chance d’avoir une maman qui me soutient beaucoup. Elle adore le passage quand je chante: «J’appelle ma mamãe pour venir les gronder.» Et c’est vrai. J’ai grandi sans présence masculine dans ma vie et j’appelle ma mère lorsque j’ai un souci. Je trouvais ça cool de prendre cette figure maternelle alors que d’habitude on voit plutôt le grand frère ou un homme prendre ce rôle. Pour moi, ça a toujours été une femme.
Votre maman vous a soutenue depuis le début?
Je me rappelle encore quand j’ai voulu arrêter l’université. J’ai fait deux énormes lettres avec des dessins et du graphisme. J’ai demandé à ma mère de s’asseoir et j’ai présenté tous mes plans. Elle m’a soutenue direct. Pendant deux ans, j’ai dû faire de la vente et 20 milliards d’autres trucs, mais le sacrifice en valait la peine.
Avez-vous douté de votre choix?
Il y a des moments où je veux tout remettre en question. Ce métier est tellement difficile. Tu peux lire des choses magnifiques sur toi un jour et des trucs atroces le suivant. Tu peux avoir l’impression que tu es la reine du monde parce que tu as chanté dans le meilleur festival, comme avoir l’impression que ça ne marche pas. Du coup, quand je suis seule, ces pensées me font mal au cœur.
Dans le titre «Olé Olé» vous revendiquez votre liberté suite à une relation dans laquelle vous vous êtes oubliée.
Oui. Je me rappelle quand j’ai fait mon premier tatouage, il m’a reprochée de faire comme tout le monde. Finalement, j’en ai fait plusieurs. Je me suis même teinte en blonde pour un mec. Il y a tellement de meufs qui se sont reconnues dans cette histoire. On passe toutes et tous par cette période où on va se mettre en couple avec des gens sans connaître nos envies et nos limites. C’est très facile de céder dans une relation. Désormais, je ne fais plus de concessions sur des points importants. J’ai envie de trouver quelqu’un qui m’aime pour mon entièreté.
Vous avez l’amour de vos fans. L’un d’eux a même réservé un vol depuis la Grèce pour venir vous voir au Paléo, c’est ça?
Oui, j’ai beaucoup de chance. Mes fans captent tout l’amour et l’énergie que j’ai à donner. Je suis là avant tout pour ça. Cet échange d’énergie me fait beaucoup de bien.