GrèceDeux têtes tombent après le scandale d’espionnage
Le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis a été frappé vendredi par une double démission, dont celle du chef des services du renseignement
Le directeur des services grecs du renseignement Panagiotis Kontoleon, nommé en août 2019 à ce poste peu après l’élection du parti de droite Nouvelle Démocratie de Kyriakos Mitsotakis, a démissionné vendredi. Il l’a fait en raison d’ «erreurs» de gestion dans l’exercice de ses fonctions à la tête des services nationaux de renseignements (EYP), ont annoncé les services du Premier ministre. Panagiotis Kontoleon a été aussitôt remplacé par Themistoclis Demiris, jusqu’ici secrétaire général du Ministère des affaires étrangères, au sommet de ces services placés sous l’égide du Premier ministre, selon la même source.
Victime de l’affaire du logiciel espion
Quelques heures plus tôt, un autre responsable du gouvernement Grigoris Dimitriadis, secrétaire général des services du Premier ministre et neveu de ce dernier, a également présenté sa démission. Il est mis en cause par des médias d’investigation pour ses «liens» avec un scandale d’espionnage via le logiciel illégal Predator.
Ces deux démissions interviennent après la révélation la semaine dernière de la tentative de surveillance de Nikos Androulakis, chef du Kinal-Pasok (socialiste), troisième parti parlementaire, dont le téléphone portable aurait été ciblé par Predator. «Découvrir celui qui est caché derrière ces pratiques nocives n’est pas une question personnelle mais un devoir démocratique», avait alors déclaré M. Androulakis, exhortant le gouvernement à s’abstenir de «toute tentative (…) de minimiser l’affaire».
Il s’agit du troisième cas de surveillance présumée en Grèce en moins d’un an: en avril Thanassis Koukakis, journaliste grec spécialisé en affaires financières avait saisi la justice, dénonçant l’attaque de son téléphone par Predator. Et en février, l’écoute présumée par les services secrets d’un autre journaliste grec d’investigation sur les questions migratoires a été portée devant la Cour suprême. Dans les trois cas, le gouvernement a exclu «toute implication de l’État».
«Aveu de culpabilité»
Qualifiée de «scandale immense» par le principal parti d’opposition Syriza (gauche radicale), la tentative de surveillance du patron du Kinal-Pasok avait été abordée vendredi à huis clos par la commission parlementaire des Institutions et de la Transparence. Alors encore à la tête de l’EYP, Panagiotis Kontoleon avait laissé entendre que les deux journalistes auraient été surveillés sur ordre de services étrangers, provoquant un tollé. Le site d’investigation Reporters United a révélé que le second responsable démissionnaire, M. Dimitriadis, «était lié à des personnes physiques et morales directement ou indirectement impliquées dans l’affaire d’écoutes téléphoniques».
Alexis Tsipras, leader de Syriza et ex-Premier ministre de gauche, a qualifié vendredi la démission de M. Dimitriadis comme un «aveu de culpabilité». Il a évoqué «les responsabilités du Premier ministre lui-même». Le gouvernement a nié à plusieurs reprises ces derniers mois toute implication dans ces surveillances présumées soulignant que l’État n’a pas acheté ce genre de logiciels.