ParisPesticides et chute de la biodiversité: la France face à la justice
L’État français se retrouve au tribunal de Paris, jeudi, pour une audience inédite sur sa responsabilité dans l’usage massif de pesticides et dans l’effondrement de la biodiversité.
Après le climat et la pollution de l’air, l’Etat français se retrouve au tribunal de Paris, jeudi, pour une audience inédite consacrée à sa responsabilité dans l’utilisation massive de pesticides et dans l’effondrement de la biodiversité.
Dans cette procédure baptisée «Justice pour le vivant» et lancée en 2021, cinq ONG veulent faire reconnaître par le tribunal administratif de Paris une «carence fautive» de l’administration dans la mise sur le marché de pesticides et dans le suivi «lacunaire» de leurs risques environnementaux.
Insectes et oiseaux touchés
L’État français, qui a déjà été condamné pour ses manquements dans la lutte contre le changement climatique ou la pollution de l’air, devra également s’expliquer sur le non-respect de l’engagement pris en 2007 de réduire de 50% de l’usage des pesticides de synthèse en dix ans. Ces 30 dernières années en Europe, les populations d’insectes volants ont diminué de 75% et les populations d’oiseaux des champs ont chuté de 30% en France, selon des études citées par les ONG qui confirment le lien avec l’agrochimie.
Des scientifiques viennent ainsi de publier une étude, fondée sur une masse de données inédite, soulignant l’intensification de l’agriculture comme principale cause du spectaculaire déclin des oiseaux en Europe, qui sont quelque 20 millions à disparaître en moyenne chaque année.
L’impact des pesticides
«Principale cause de cet effondrement, les pesticides sont aujourd’hui autorisés à l’issue d’un processus d’évaluation lacunaire, qui ne permet ni d’identifier ni d’interdire les produits responsables du déclin des insectes, des oiseaux et de toute la biodiversité ordinaire», affirment les ONG à l’origine de la procédure.
Dans ses conclusions déposées au tribunal pour sa défense, l’État français, représenté par le ministère de l’Agriculture, assure avoir peu de marge de manœuvre par rapport au droit européen, qui régirait «entièrement» la procédure d’homologation des produits phytopharmaceutiques.
Objectifs «non contraignants»
L’État estime également que les objectifs fixés en 2007 de réduction de l’utilisation des pesticides n’ont qu’une simple «valeur programmatique et ne sauraient avoir une portée contraignante.»
Phyteis, le lobby professionnel qui regroupe les géants des pesticides comme BASF, Bayer ou Syngenta, s’est mêlé à la bataille en déposant, il y a quelques semaines, un mémoire en soutien de l’État auprès du tribunal administratif. La décision du tribunal est attendue dans les prochaines semaines.
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