Guerre en UkraineMenace nucléaire et pastilles d’iode: à Berne on garde son sang-froid
L’invasion russe et la menace nucléaire inquiètent de nombreux Suisses qui se demandent s’il faut stocker des comprimés contre la radioactivité. À Berne, les parlementaires gardent la tête froide.
- par
- Christine Talos
La guerre en Ukraine et une potentielle menace nucléaire préoccupent les Européens et les Suisses. Le président Poutine a ordonné dimanche la mise en alerte de la force de dissuasion de l’armée russe qui comprend son immense arsenal nucléaire. Mercredi, un expert a même estimé que le risque d’une attaque nucléaire était plus grand que pendant la guerre froide. Du coup, la peur du nucléaire grandit. En France, la population s’est ruée dans les pharmacies pour acheter des pastilles d’iode ces derniers jours, selon les médias. Certains Suisses ont également ressorti les comprimés distribués aux habitants qui vivent dans un périmètre de 50 km autour des centrales helvétiques. Même l’OFSP a dû répondre à des questions sur le sujet sur sa page Facebook.
Faut-il dès lors s’inquiéter? À Berne, les membres de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS-N) gardent la tête froide. À l’image de Benjamin Roduit (Centre/VS) qui se souvient de la catastrophe de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1986 et du nuage radioactif qui avait traversé l’Europe et la Suisse. «À l’époque, j’avais courbé les cours à l’uni pour profiter de respirer une dernière fois l’air pur dans les jardins», sourit le Valaisan.
Aujourd’hui, le parlementaire refuse de céder à la panique: «La situation est tendue. Cela nous fait réfléchir sur notre propre système de sécurité et c’est peut-être une bonne chose, dit-il. Mais que ce soit bactériologique ou nucléaire, le panel des armes destructives est tellement large que cela ne sert à rien de cibler sur une prévention particulière. C’est beaucoup trop prématuré.»
«Un risque résiduel mais réel»
Même point de vue de sa collègue Isabelle Moret (PLR/VD). «Je pense que le risque nucléaire est un risque résiduel mais réel», souligne-t-elle. Elle se souvient avoir elle-même reçu des comprimés d’iode du temps où elle résidait à Berne en 2011, en raison de la proximité avec la centrale de Mühleberg. «Cela m’avait beaucoup marquée, bien plus que la catastrophe de Fukushima et c’est ce qui avait déterminé mon engagement à sortir à terme du nucléaire actuel». Quant à prendre des précautions en amont aujourd’hui, la Vaudoise se montre résignée et n’en voit pas l’intérêt. «Malheureusement, les moyens de se prévenir des accidents nucléaires à l’étranger sont extrêmement limités». Et de rappeler que durant la catastrophe de Tchernobyl, personne n’avait dû prendre de comprimés d’iode.
Quant au socialiste vaudois Pierre-Yves Maillard, également membre de la CSSS-N, il balaie le sujet avec agacement. «Bien sûr, la situation est tendue et des risques existent. Poutine veut faire peur pour s’imposer. Donc nous devons résister et ne pas entrer dans ce jeu pervers. Nous devons résister à la peur en général. On ne peut pas toujours anticiper le pire et vivre dans un état de panique constante. Il faut que cette société vive, que nos jeunes comprennent les risques mais ne soient pas plongés en permanence dans l’angoisse extrême, insiste-t-il. Pour l’instant, il faut s’occuper de ce qui existe, de la solidarité avec le peuple ukrainien, apporter un soutien, accueillir les réfugiés, etc. Pour l’heure, c’est ça le sujet. Et on s’adaptera si la situation empire.»