Six policiers en procès pour l’homicide de Mike Ben Peter à Lausanne

Publié

JusticeSix policiers en procès pour l’homicide de Mike Ben Peter à Lausanne

En février 2018, un Nigérian de 41 ans était mort après un contrôle de police près de la gare de la capitale vaudoise. Les 12, 13 et 14 juin prochains, les six policiers impliqués doivent répondre d’homicide par négligence.

Eric Felley
par
Eric Felley
Un mois après la mort de Mike Ben Peter, la mobilisation avait été forte à Lausanne pour dénoncer les violences policières et racistes.

Un mois après la mort de Mike Ben Peter, la mobilisation avait été forte à Lausanne pour dénoncer les violences policières et racistes.

20 minutes/XFZ

Que s’est-il passé exactement le 28 février 2018 vers 23 heures, lors d’un contrôle de police près de la gare de Lausanne? C’est ce que devra déterminer le Tribunal d’arrondissement de Lausanne, lors du procès de six policiers prévu les 12, 13 et 14 juin prochain à Renens.

Ce funeste 28 février, Mike Ben Peter, un Nigérian de 41 ans, avait subi un contrôle de police antidrogue près de la gare de Lausanne. Sans statut légal en Suisse, l’homme avait résisté à son interpellation. Un policier municipal avait fait alors usage d’un spray au poivre et l’aurait frappé dans ses parties génitales. Cinq autres policiers sont venus en renfort et ont maintenu l’homme à terre, face contre terre, dans la position d’un plaquage ventral.

Finalement conduit à l’hôpital, l’homme, qui avait perdu connaissance, est décédé douze heures plus tard d’un arrêt cardiaque. Les mouvements de défense des migrants et les milieux antiracistes ont dénoncé la violence policière de cette intervention. Par la suite, ils ont tiré un parallèle avec la mort de George Floyd, décédé à Minneapolis le 25 mai 2020 lors d’un plaquage ventral qui avait été filmé par un passant. Ce qui n’est pas le cas pour l’intervention des policiers lausannois.

Collectif mobilisé

À la suite de ce drame, s’est formé le collectif Kiboko. Dans un communiqué publié ce lundi, il donne un avant-goût de la tension que ce procès va provoquer autour du décès de Mike: «La colère et la tristesse de celles et ceux qui le connaissaient ont permis déjouer la version mensongère de la police et le silence de l’État sur les circonstances de sa mort. En effet, une multitude d’organisations antiracistes se sont engagées dans un combat pour la vérité et contre la complaisance écœurante habituellement accordée aux forces de l’ordre par le Ministère Public».

Comme dans le procès des policiers de Minneapolis, les débats vont tourner autour de la qualification de leur infraction. Les policiers sont accusés par le Ministère public d’«homicide par négligence». Pour le
collectif Kiboko, ce chef d’accusation est pour le moins étonnant, écrit-il dans son communiqué, car il ne tient pas compte de «la terrifiante brutalité infligée intentionnellement à Mike Ben Peter par les six agents de police».

Négligence ou intention?

Dans un récent article du «Courrier», l’avocat de la famille, Me Simon Ntah, estime que le Ministère public aurait dû retenir «l’homicide intentionnel par dol éventuel», une accusation plus grave que la simple négligence. Selon lui, de dossier du procureur décrit «de manière précise les violences qui ont eu lieu. (…) En vingt ans de carrière, je n’ai pas le souvenir que lorsque plusieurs personnes se sont acharnées sur une seule, il n’ait été retenu que la négligence, ça heurte ne serait-ce que le sens commun», plaide-t-il.

En face, la défense plaidera l’acquittement, en avançant des causes multifactorielles qui ont conduit au décès, comme le surpoids (Mike pesait 138 kg pour 1,78 m), des troubles cardiaques ou encore le stress.

«Le combat n’est pas terminé»

Concernant la procédure judiciaire, le collectif Kiboko dit redouter des «collusions» entre les six agents, «voire des altérations de preuves comme cela a été le cas dans l’affaire d’Hervé Mandundu, tué par balles par la police en 2017 à Bex. (…) Le combat n’est pas terminé, les policiers qui ont tué Mike peuvent encore être acquittés, comme l’a été l’assassin d’Hervé qui en prime a touché des dédommagements considérables pour ses frais de justice».

Le collectif et une soixantaine d’organisations annoncent une manifestation le 3 juin prochain à̀ Lausanne «autour du procès dans le but de maintenir au maximum la pression politique».

Ton opinion