CARNET NOIRLe leader des groupes Pigalle et Les Garçons Bouchers n’est plus
François Hadji-Lazaro est mort samedi soir d’une septicémie, l’âge de 66 ans. Il avait marqué l’histoire de la scène alternative rock française.
Pigalle en reste sans voix: le leader du groupe du même nom et des Garçons bouchers, François Hadji-Lazaro, est décédé à 66 ans, après avoir marqué l’histoire de la scène alternative rock française. Le musicien au crâne rasé est décédé «samedi vers 23 h 55», a affirmé une responsable de sa maison de disques Universal France.
Le chanteur de Pigalle «avait des problèmes de santé depuis quelque temps»; il est décédé à l’hôpital d’une septicémie, a précisé son proche collaborateur et saxophoniste, Stef Gotkovski, louant «un musicien hors pair, et très créatif».
Sa voix gouailleuse de titi parisien restera attachée pour le grand public au tube des années 1990, «Dans la salle du bar-tabac de la rue des martyrs», chronique des rades de la capitale à une époque où, dans les bas-fonds de Paris, on peut encore «tout acheter tout vendre / le meilleur et le pire».
Gamin du XVe arrondissement, contaminé par la musique en écoutant Dylan, cet autodidacte à la carrure d’ogre, chanteur multi-instrumentiste, parolier et compositeur, maîtrise la guitare, mais aussi le banjo, l’accordéon, le violon, la cornemuse, ou la vielle…
C’est évidemment dans les couloirs du métro que ce Parigot jusqu’au bout des ongles trouve son premier public. Il abandonne son métier d’instituteur pour se lancer dans la musique. Fréquentant les mêmes bars et trinquant avec d’autres fondateurs du punk à texte comme les Wampas, ou Bérurier Noir, il racontera sa vision nocturne de la capitale dans les chansons de son groupe Pigalle, mêlant guitares hurlantes et écriture soignée, sourire et spleen.
Il fondera également les Garçons Bouchers, auteur de l’anti-tube de l’été «La Lambada on n’aime pas ça» (1990) et d’une reprise punk de «Viens voir les musiciens» de Charles Aznavour.
C’est lui qui a produit le premier album de la Mano Negra
Son empreinte musicale va au-delà de ses propres chansons: en 1985, il fonde la maison Boucherie Productions, pour tenter d’arracher le rock alternatif à la marginalité, sans se compromettre pour autant avec le showbiz. Il s’agissait de «l’un des premiers labels indépendants pour les groupes alternatifs qui ne voulaient pas dépendre d’une major», explique Stef Gotkovski.
Un label qui jouera un rôle important sur la scène alternative parisienne en donnant leur chance à de nombreux artistes émergents, avant de déposer le bilan en 2001. Non sans avoir produit une centaine d’albums et couvé les débuts d’artistes alors balbutiants comme la Mano Negra, dont il publiera en 1988 le premier simple («La Zarzamora») et le premier album («Patchanka»).
Colosse à bretelles
Engagé à gauche, amateur de vin, François Hadji-Lazaro s’était aussi lié d’amitié avec l’intellectuel Roland Topor, sortant même un album «François détexte Topor». Ses albums solos, plus récents, lorgnent plus du côté de la chanson rock.
Son physique de colosse à bretelles, crâne lisse et visage rond, a aussi tapé dans l’œil de réalisateurs, qui lui ont confié des seconds rôles ou de la figuration: il colle parfaitement à l’ambiance de «La cité des enfants perdus» de Jean-Pierre Jeunet, et apparaît notamment dans «Le Pacte des Loups». Il a également composé des musiques de films.
François Hadji-Lazaro avait fini par rejoindre la major Universal. Ces dernières années, l’ancien instituteur, père de deux enfants, s’était mis à décoiffer le jeune public, avec des livre-disques et des spectacles, intitulés notamment «Pouët» (2016) et «Atchoum» (2018).