États-Unis toujours plus résignés«On ne peut rien faire pour arrêter la Corée du Nord»
Soucieux d’éviter une autre crise, en plus de l’invasion russe de l’Ukraine, avec les tirs de missiles de Pyongyang, les États-Unis cherchent à rassurer leurs alliés sur le fait qu’ils les défendront.
Après la série record de tirs nord-coréens, cette semaine, les États-Unis s’en tiennent à leur stratégie mêlant pression et offres de dialogue, résignés à l’idée qu’ils auront du mal à convaincre Pyongyang de changer de cap. La Corée du Nord, dont le dirigeant, Kim Jong-un, a rencontré à trois reprises le prédécesseur de Joe Biden, Donald Trump, sans parvenir à un accord, a tiré une trentaine de missiles mercredi et jeudi, puis quatre autres samedi. Il pourrait prochainement procéder, selon les Occidentaux, à un septième essai nucléaire.
«Je ne pense pas qu’on puisse faire quoi que ce soit pour arrêter la Corée du Nord», lâche Sue Mi Terry, ancienne analyste chargée de la péninsule coréenne pour la CIA, désormais directrice des études sur l’Asie au Woodrow Wilson International Center for Scholars. «Ils n’ont pu obtenir aucun accord avec Trump, alors que vont-ils obtenir de l’Administration Biden? Ils le savent. La seule chose qu’ils peuvent faire est de faire passer leur programme d’armement à l’étape supérieure.»
Aucune volonté à Pyongyang
Les États-Unis ont réagi aux derniers développements en prolongeant leurs exercices militaires avec la Corée du Sud et en déployant un bombardier supersonique capable d’emporter des armes nucléaires. Joe Biden devrait en outre apporter un soutien appuyé aux dirigeants sud-coréen et japonais lors de sommets en Asie du Sud-Est, ce mois-ci.
Il doit aussi rencontrer son homologue chinois Xi Jinping, qui s’est joint à la Russie pour mettre son veto, en mai, à une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU visant à renforcer les sanctions contre la Corée du Nord.
L’ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Linda Thomas-Greenfield, a critiqué, lors d’une réunion d’urgence, vendredi, le rôle de Pékin et Moscou dans l’attitude nord-coréenne, mais elle a également réaffirmé la volonté de l’Administration Biden de dialoguer avec l’État totalitaire. Selon des responsables américains, la Corée du Nord n’a montré aucune volonté de négocier.
«Beaucoup de lassitude»
Quant à Joe Biden, concentré sur l’Ukraine et qui pourrait perdre le contrôle du Congrès aux élections de mi-mandat, la discussion avec la Corée du Nord présente des risques élevés et peu de chances de succès. L’Administration américaine «n’a pas vraiment envie de s’impliquer vis-à-vis de la Corée du Nord», assure Frank Aum, ancien conseiller du Pentagone en la matière, évoquant «beaucoup de lassitude» sur ce dossier.
Joe Biden pourrait, selon Frank Aum, faire un geste afin d’apaiser les tensions, tel qu’un allègement des sanctions ou un moratoire sur le déploiement de nouveaux moyens militaires, mais cela serait perçu «comme une récompense pour la mauvaise conduite» de Pyongyang. «Les faits montrent toutefois clairement que la Corée du Nord ne réagit pas favorablement à la pression et qu’elle a tendance, à l’inverse, à mieux se comporter quand on engage un dialogue», analyse-t-il. La stratégie de Joe Biden de s’appuyer sur la Chine a peu de chances de réussir, selon l’analyste, Pékin étant «en désaccord total avec cette approche» des pressions.