France: la syrah, parade à la canicule et à la sécheresse d’un vignoble alsacien

Publié

FranceLa syrah, parade à la canicule et à la sécheresse d’un vignoble alsacien

Dans l’est de la France, le domaine du Clos Saint Landelin, près de Colmar, cherche à faire face au réchauffement climatique en cultivant un cépage traditionnellement présent dans le Sud.

Implanté à une vingtaine de kilomètres au sud de Colmar, dans une région avec une pluviométrie similaire à celle de Montpellier, le viticulteur alsacien Thomas Muré a choisi la syrah pour sa résistance à la chaleur mais aussi au froid.

Implanté à une vingtaine de kilomètres au sud de Colmar, dans une région avec une pluviométrie similaire à celle de Montpellier, le viticulteur alsacien Thomas Muré a choisi la syrah pour sa résistance à la chaleur mais aussi au froid.

AFP

Planter en Alsace la syrah, cépage présent traditionnellement dans des zones plus torrides, comme la vallée du Rhône, dans le sud de la France, ou l’Australie? C’est le défi relevé par le domaine viticole du Clos Saint Landelin, à une vingtaine de kilomètres au sud de Colmar, à proximité de la frontière allemande, soucieux de trouver une parade viticole au réchauffement climatique.

Sur 28 hectares, ses vignes produisent des vins de pinot noir, crémant, riesling ou gewurztraminer, protégées par les Ballons d’Alsace, deux sommets vosgiens. Mais avec une pluviométrie similaire à celle de Montpellier, «c’est l’endroit le plus sec d’Alsace», explique Thomas Muré, 42 ans, qui gère depuis quelques années, avec sa sœur Véronique, ce vignoble familial. Comme beaucoup d’autres, la région, déjà peu arrosée, n’a pas reçu une seule goutte de pluie depuis des semaines.

«Si le changement climatique continue dans cette même direction, qu’est-ce qu’on fait» pour adapter la production viticole et continuer à faire de «grands vins?» s’interroge Thomas Muré. Cette question, son père, René Muré, se l’est posée il y a plus d’une dizaine d’années. Il fallait alors trouver le cépage idoine, capable de mûrir «un tout petit peu plus lentement», de supporter la chaleur mais aussi les «hivers froids» alsaciens. La syrah a fini par s’imposer: en France, on retrouve ce cépage dans la vallée du Rhône, mais il est présent aussi en Suisse, Italie, Grèce, Afrique du Sud, au Liban ou en Australie, sous le nom de Shiraz.

Une cuvée confidentielle

En 2010, six rangs sont donc plantés sur le domaine, avec l’intention d’en étudier le comportement sur un terroir argilo-calcaire. Douze ans et six millésimes plus tard, le cépage noir donne en moyenne 300 bouteilles par an (soit à peine «0,3%» de la production du domaine), une cuvée pour l’heure confidentielle, commercialisée principalement dans un cercle d’habitués du Clos Saint Landelin, sous la dénomination «Vin de France», sans référence à l’Alsace puisque la syrah n’est pas considérée comme un cépage alsacien.

La syrah du Clos Saint Landelin donne en moyenne 300 bouteilles par an, commercialisées sous la dénomination «Vin de France», sans référence à l’Alsace.

La syrah du Clos Saint Landelin donne en moyenne 300 bouteilles par an, commercialisées sous la dénomination «Vin de France», sans référence à l’Alsace.

AFP

Une initiative qui fait des émules

Il «a tout de suite beaucoup intéressé nos clients», sommeliers ou particuliers, tous curieux de «goûter la première syrah produite en Alsace», explique Véronique Muré, 46 ans. «Il y a une demande», ce qui «nous a incités à passer» à une «vraie cuvée», avec la plantation «l’hiver dernier» d’une soixantaine d’ares de syrah supplémentaires, soit au total un peu moins de 70 ares, poursuit celle qui gère les aspects commerciaux et administratifs du Clos Saint Landelin. Ces nouveaux plants devraient donner leur première récolte «d’ici cinq ou six ans», estime-t-elle. «La viticulture, c’est toujours une histoire de patience.»

Au début, l’initiative a «surpris» le monde viticole alsacien, reconnaît Thomas, la syrah ne faisant pas partie des sept cépages alsaciens (pinots noir, blanc et gris, riesling, muscat, sylvaner et gewurztraminer). Pour autant, la profession est très consciente «du changement climatique» et «tout le monde cherche des solutions», poursuit-il. «Une poignée» de viticulteurs alsaciens leur a ainsi emboîté le pas pour planter également de la syrah, sans toutefois se lancer pour l’instant dans la commercialisation, glissent Thomas et Véronique.

Est-ce à dire qu’à terme, la syrah est appelée à se banaliser en Alsace? Difficile de s’avancer. Mais «si le réchauffement (climatique) continue, (…) alors la syrah a sa place en Alsace», veut croire Véronique.

(AFP)

Ton opinion

0 commentaires