Soudan«La situation humanitaire atteint un point de rupture»
Des raids aériens, des tirs et des explosions ont de nouveau secoué Khartoum lundi, malgré une trêve dans les combats entre l’armée et les paramilitaires.
La ville de Khartoum est «sous les avions de combat» tandis que des tirs et des explosions résonnent dans différents quartiers, selon des témoins. «L’échelle et la vitesse auxquelles se déroulent les événements au Soudan (sont) sans précédent», a estimé dimanche l’ONU, qui a dépêché dans la région son responsable pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.
«Je suis en route (…) afin d’étudier comment nous pouvons apporter une aide immédiate» aux habitants, a déclaré Griffiths, pour qui la «situation humanitaire atteint un point de rupture» dans le pays, l’un des plus pauvres du monde. Le pillage massif des bureaux et des entrepôts humanitaires a «épuisé la plupart de nos stocks», a-t-il dit.
Couloirs maintenus
Le chef de l’armée, Abdel Fattah al-Burhane, et le patron des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti, avaient accepté de prolonger dimanche à minuit le cessez-le-feu de trois jours. Mais depuis le début du conflit, plusieurs trêves ont été annoncées avant d’être aussitôt violées. Selon les experts, elles signifient surtout que les couloirs sécurisés pour les évacuations des étrangers sont maintenus et que les négociations, qui ont lieu à l’étranger, se poursuivent.
Jusqu’ici, les deux généraux répètent qu’ils refusent des négociations directes. Les combats ont fait 528 morts et 4599 blessés, selon des chiffres officiels largement sous-évalués. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) est parvenu dimanche à faire atterrir à Port-Soudan, à 850 kilomètres à l’est de Khartoum, un premier avion chargé de huit tonnes d’aide. Cela ne soignera que «1500 blessés», a-t-il prévenu.
L’ONU a recensé 75’000 personnes déplacées à l’intérieur du pays. Au moins 20’000 ont fui vers le Tchad, 6000 vers la Centrafrique et des milliers d’autres vers le Soudan du Sud et l’Éthiopie. Au total, jusqu’à 270’000 personnes, selon une estimation de l’ONU, pourraient fuir les combats qui touchent 12 des 18 États de ce pays de 45 millions d’habitants.
«Situation intenable»
Les habitants de la capitale, quand ils ne fuient pas, restent barricadés, essayant de survivre malgré les pénuries de nourriture, d’eau et d’électricité. L’État de Khartoum a donné «congé jusqu’à nouvel ordre» aux fonctionnaires, tandis que la police assure se déployer pour prévenir les pillages. La plupart des hôpitaux du pays sont hors service. Pour ceux fonctionnant encore, «la situation est intenable» car le matériel manque, a affirmé Majzoub Saad Ibrahim, médecin à Ad-Damir, au nord de Khartoum.
Plusieurs pays, dont la France, l’Allemagne et les États-Unis, ont évacué leurs ressortissants et d’autres étrangers. Le Canada a mis fin à ses évacuations «en raison des conditions dangereuses». Sur le front diplomatique, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Fayçal ben Farhane, a reçu dimanche un émissaire du général Burhane.