Corse (F)Une manifestation en hommage à Yvan Colonna dégénère
Dimanche, à Ajaccio (F), de nouveaux affrontements ont émaillé une manifestation en hommage à Yvan Colonna, tué par un codétenu.
Une nouvelle manifestation pour Yvan Colonna, militant indépendantiste mortellement agressé en prison, a dégénéré dimanche à Ajaccio, avec de violents affrontements avec les forces de l’ordre, au risque de retarder l’ouverture des discussions annoncées avec le gouvernement autour d’une possible autonomie pour l’île.
Ces heurts entre plus d’une centaine de jeunes gens, souvent cagoulés et équipés de masques à gaz, et les policiers, ont débuté vers 16 heures devant la préfecture, aussitôt après l’arrivée du cortège des manifestants qui a réuni 4000 personnes selon la préfecture, 14’000 selon les organisateurs. Loin de se disperser, nombre de manifestants observaient, voire encourageaient les casseurs, a constaté l’AFP. D’autres entonnaient l’hymne corse, le «Dio vi salvi Regina».
Cocktails Molotov
Répondant aux jets de cocktails Molotov et de bombes agricoles, les policiers ont répliqué avec des lances à eau et des grenades lacrymogènes. Une trentaine de personnes ont été blessées, dont au moins une grièvement, selon les pompiers. Aucun bilan n’a été fourni chez les forces de l’ordre qui disposaient de leur propre service de secours, selon un officier des pompiers.
De même source, plusieurs véhicules ont été incendiés. En fin d’après-midi, les affrontements se poursuivaient près de la mairie, à quelque 500 mètres de la préfecture, où des fumées s’échappaient d’un immeuble dont une canalisation de gaz était en feu.
«Je suis venu pour honorer la mémoire d’Yvan Colonna»
Des heurts ont également été constatés aux abords de la caserne de CRS de Furiani, près de Bastia, déjà cible des manifestants dimanche. La manifestation s’était élancée vers 15 heures, sur le front de mer, derrière deux larges banderoles portant le désormais traditionnel slogan «État français assassin». Au milieu des dizaines de banderas, le drapeau corse frappé de la tête de Maure, émergeait un drapeau basque et un grand drapeau breton.
«Je suis venu pour honorer la mémoire d’Yvan Colonna, montrer qu’on est toujours là», a expliqué à l’AFP Camellu Tomasi, 23 ans, secrétaire de Ghjuventu Paolina, un syndicat étudiant, convaincu que la mobilisation se poursuivra jusqu’à la satisfaction de leurs revendications.
À l’origine de cette manifestation figure un collectif nationaliste formé après l’agression mortelle d’Yvan Colonna le 2 mars à la maison centrale d’Arles, où il purgeait une peine de prison à perpétuité pour l’assassinat du préfet Claude Erignac en 1998 à Ajaccio.
Ce collectif avait déjà été à l’origine des grandes manifestations des 6 et 13 mars à Corte et Bastia, qui s’étaient elles aussi achevées dans la violence. 7000 personnes s’étaient rassemblées à Bastia selon les autorités, 15’000 selon les organisateurs.
«On va se réveiller»
Face aux risques de débordement, le dispositif policier était plus important dimanche, mieux organisé et plus offensif, notamment devant la préfecture et le Palais de justice, qui avait été la cible des manifestants le 9 mars, avec un incendie dans la salle des pas perdus. Des contrôles préventifs avant la manifestation avaient permis la saisie de plusieurs dizaines de projectiles, dont des dizaines de boules de pétanque.
Aux grilles de la préfecture, le visage d’Yvan Colonna au pochoir sur un drap blanc avait été accroché par des manifestants. Y figuraient également les citations «on va se réveiller», «moi j’ai confiance», extraites d’une vidéo diffusée la semaine dernière par BFMTV, où le berger de Cargèse disait en janvier à un codétenu sa conviction que la Corse sera un jour indépendante. Son frère, Stéphane Colonna, se trouvait dimanche en tête de la manifestation, entouré de très jeunes manifestants, des enfants pour certains, qui reprenaient en chœur le cri d’«État français assassin».