Régulation de la TechSous pression, une experte américaine renonce à un poste clé au sein de l’UE
Fiona Scott Morton ne briguera finalement pas le poste d’économiste en cheffe de la concurrence. Sa nomination était notamment contestée par Emmanuel Macron.
Après une semaine de polémique centrée sur sa nationalité américaine et les doutes exprimés par Emmanuel Macron, l’économiste Fiona Scott Morton a annoncé qu’elle renonçait à briguer un poste clé de l’UE pour la régulation des géants de la tech. «Fiona Scott Morton m’a informée de sa décision de ne pas accepter le poste d’économiste en cheffe de la concurrence. Je l’accepte avec regret», a annoncé sur Twitter la vice-présidente de la Commission, Margrethe Vestager, principal soutien de cette candidature.
La nomination d’une ancienne de l’administration Obama, ex-consultante pour Amazon, Apple et Microsoft, a provoqué une vive polémique à Bruxelles. Emmanuel Macron s’était lui-même dit mardi «dubitatif» sur ce recrutement. «Étant donné la controverse politique provoquée par la sélection d’une non Européenne pour occuper ce poste et l’importance pour la direction générale (de la Concurrence) d’avoir le plein soutien de l’Union européenne (…), j’ai estimé que la meilleure chose était pour moi de me retirer», a écrit Fiona Scott Morton, dans sa lettre adressée à Vestager.
Des responsables politiques ont épinglé ses anciennes fonctions de responsable de l’analyse économique à la division antitrust du ministère américain de la Justice, entre 2011 et 2012, ou de consultante pour des grands groupes de la tech. Ils ont dénoncé de possibles conflits d’intérêts et le risque d’une ingérence de Washington dans des décisions de l’UE. La Commission européenne avait adressé vendredi une fin de non-recevoir au gouvernement français, qui avait officiellement réclamé l’annulation du recrutement de Scott Morton.
La Commission divisée
L’affaire menaçait de diviser profondément le collège des 27 commissaires à la tête de l’exécutif européen. Cinq d’entre eux ont écrit à la présidente Ursula von der Leyen pour réclamer une réévaluation de cette nomination.
La puissante Direction générale de la concurrence est chargée de veiller au bon fonctionnement de la concurrence dans l’Union européenne (UE) et d’enquêter notamment sur les abus de position dominante des géants du numérique, qui ont donné lieu à des amendes record, ces dernières années. La nomination de Scott Morton survenait au moment où l’UE doit mettre en œuvre de nouvelles législations ambitieuses pour réguler ce secteur.
Auditionnée au Parlement européen mardi soir, Vestager avait tenté, sans convaincre, de défendre son choix qui avait aussi reçu l’appui de Von der Leyen. «L’idée qu’elle a travaillé pour tous les Gafam et qu’à cause de cela, elle ne peut travailler sur le secteur des technologies, n’est tout simplement pas vraie», avait affirmé Vestager devant les eurodéputés, évoquant des collaborations comme «consultante» mais «jamais comme lobbyiste».
L’ouverture du poste aux candidatures non européennes apparaissait sur l’avis de vacance publié dès le mois de mars, avait-elle encore expliqué, justifiant ce choix par la rareté des compétences disponibles.