Votations du 18 juinLe grand rendez-vous de la Suisse avec la loi sur le climat
Après l’échec de la loi sur le CO₂ en juin 2021, le Parlement propose une nouvelle mouture pour réduire les gaz à effet de serre sur la voie de la transition énergétique.
- par
- Eric Felley
En juin 2021, le peuple suisse avait refusé la loi sur le CO₂ par 51,6% des voix. Conseillère fédérale en charge de l’environnement, Simonetta Sommaruga avait déclaré alors que ce n’était pas un rejet de toute politique climatique. Cette loi avait échoué principalement parce qu’elle prévoyait des taxes et l’UDC avait mené campagne sur ses conséquences financières pour le porte-monnaie des ménages. Le 18 juin 2023, le peuple se prononce à nouveau, mais sur un autre projet.
Le Parlement a repris le dossier du climat avec l’Initiative pour les glaciers, qui a été déposée à Berne le 27 novembre 2019 par l’Association suisse pour la protection du climat. Ce texte, qui veut interdire le pétrole et le gaz en 2050, a été le point de départ pour de longs débats au Parlement. Ils ont abouti à un contre-projet indirect nommé: «Loi fédérale sur les objectifs en matière de protection du climat, sur l’innovation et sur le renforcement de la sécurité énergétique», dit autrement: «la loi climat». Le 5 octobre, les initiants ont annoncé le retrait «conditionnel» de leur initiative en faveur de cette loi qu’ils jugent satisfaisante. Cependant l’UDC a lancé un référendum qui a abouti. Si le peuple suit l’UDC, l’initiative pourrait être réactivée et passer devant le peuple.
3,2 milliards de soutiens
La loi contient la création d’un calendrier plutôt souple pour parvenir à l’horizon 2050 à «zéro émission nette» de gaz à effet de serre afin de respecter les accords de Paris ratifiés par la Suisse en 2017. La loi contient également des incitations à la promotion de l’innovation pour se désengager des énergies fossiles. Elle assure la mise à disposition de 2 milliards de francs sur dix ans pour soutenir les propriétaires qui veulent remplacer leur système de chauffage polluant. Enfin, elle prévoit aussi 1,2 milliard pour aides les entreprises à innover dans leur consommation d’énergie. Cette fois, elle ne contient aucune taxe.
La Suisse trop petite
Déjà opposée avec succès à la loi sur le CO₂, l’UDC a lancé un référendum pour contrer la loi climat, déposé le 9 janvier dernier. Le conseiller national valaisan Michael Graber (UDC/VS), a qualifié ce contre-projet de «poison» pour l’économie, favorisant une «dictature écologiste». Vouloir atteindre la neutralité carbone en 2050 comme il le prévoit, cela reviendrait à interdire le mazout, l’essence, le diesel et le gaz. L’UDC argumente que le climat se joue à l’échelle mondiale et que la Suisse n’est responsable que d’un millième des émissions de CO2 dans le monde. Enfin, comme avec la loi sur le CO₂, l’UDC brandit une facture de plusieurs milliers de francs supplémentaires pour les ménages. Elle est soutenue dans sa campagne par GastroSuisse, qui estime que cela provoquera des charges insupportables pour ses membres.
Un large front économique face à l’UDC
En face, quelque 200 organisations, associations et entreprises se sont rassemblées sous le slogan de campagne «Protégeons ce qui compte». Parmi les soutiens à la loi, on trouve tous les partis sauf l’UDC, les cantons, EconomieSuisse, l’Union suisse des paysans, la Fédération suisse du tourisme, l’Union des villes suisses, l’Association suisse des locataires, le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB), l’association de l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (Swissmem), et les milieux immobiliers romands.
Un site réunit également les milieux de l’économie favorable à la loi: «L’économie suisse s’engage pour une loi climat libérale». On y trouve des entreprises comme Alpiq, Coop, Migros, Novartis ou des associations comme Constructionsuisse, HotellerieSuisse ou les Remontées Mécaniques Suisse.
Un test pour Albert Rösti
La campagne de votation représente un test pour le nouveau conseiller fédéral Albert Rösti. Alors qu’il était conseiller national, le Bernois avait été un des artisans du référendum. Aujourd’hui, en tant que ministre de l’énergie et de l’environnement, il se retrouve au sein du Conseil fédéral à défendre le texte du Parlement contre son propre parti.
Le 21 avril dernier, en compagnie du conseiller d’État valaisan Roberto Schmidt, président de la Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie, il a souligné: «Contrairement à la loi sur le CO2 rejetée par le peuple, ce texte ne contient ni interdiction, ni taxe, ni impôts supplémentaires». Albert Rösti a insisté sur les conséquences du réchauffement climatiques en Suisse, les crues, la sécheresse, les périodes de chaleur, les laves torrentielles et les chutes de pierres qui présentent un défi de plus en plus grand pour les cantons. Roberto Schmidt a expliqué que les dégâts dus au réchauffement coûtaient déjà 250 millions de francs par an pour le seul Valais.