Enquête officielleRapport sur les abus sexuels dans l’Église: le Conseil fédéral n’en veut pas
Balayant une motion de Carlo Sommaruga (PS/GE), le Gouvernement estime que ce sont les cantons qui doivent traiter les cas d’abus.
- par
- Eric Felley
«Le Conseil fédéral est très affecté par les révélations concernant l’Église catholique». Très affecté, mais cela n’ira pas plus loin. Dans sa réponse du 29 novembre dernier à une motion du conseiller aux États Carlo Sommaruga (PS/GE), le Conseil fédéral estime que la Confédération n’a «ni compétences ni responsabilités dans ce domaine».
Pour lui, la problématique des abus sexuels dans l’Église relève des cantons: «Le Conseil fédéral attend de toutes les autorités cantonales, y compris les ministères publics, qu’elles prennent leurs responsabilités». Cela vaut en particulier pour tous les cas révélés par l’étude de l’Université de Zurich publiée le 12 septembre dernier et commandée par l’Église elle-même.
Mais pour Carlo Sommaruga, cela ne suffit pas. La Confédération doit faire une enquête officielle et produire un rapport. «La récente étude de l’Université de Zurich indique qu’un travail de recherche plus complet reste à faire, note-t-il. (…) Le rapport présentera non seulement les responsabilités de l’Église catholique et de ses membres dans la commission des actes ou de leur occultation à la justice pénale civile, mais également l’éventuelle responsabilité des cantons et de la Confédération pour ne pas avoir pris les mesures adéquates pour protéger les enfants et déférer les responsables devant la justice».
13 ans plus tard
En 2010 - à la suite des scandales retentissants aux États-Unis, au Canada ou en Irlande - le Genevois avait déjà déposé une interpellation sur l’implication de la Confédération dans ce qui se passait en Suisse: «De manière choquante, le Conseil fédéral répondait n’avoir pris aucune initiative pour développer une stratégie de prévention de concert avec la Conférence des évêques suisses et qu’au surplus la réglementation des rapports entre l’Église et l’État est du ressort des cantons».
Pour le Genevois, il a fallu attendre 13 ans depuis son interpellation pour que le rapport de l’Université de Zurich montre l’étendue des dégâts avec plus de 1000 cas, révélant «des systèmes de protection au sein de l’Église des auteurs des abus et l’absence de communication systématique des crimes et délits aux autorités pénales civiles».
Mais 13 ans plus tard, la position de la Confédération n’a pas changé. Le Conseil fédéral évoque l’art. 72 de la Constitution fédérale concernant la réglementation des rapports entre l’Église et l’État, qui est du ressort des cantons. La motion sera traitée en plénum au Conseil des États le mercredi 20 décembre lors de la session d’hiver des Chambres fédérales.